Dans la foulée des manifestations de fin juin qui ont fait une demi-douzaine de morts, le gouvernement togolais a lancé des mandats d’arrêt contre les membres du Mouvement du 6 Juin (M66), initiateurs de la marche pacifique qui a tourné à une répression sanglante. Pour les autorités togolaises, les blogueurs et artistes qui composent le M66, cherchent à déstabiliser le Togo. La seule option est de les traquer, eux qui troublent la quiétude de Faure Gnassingbé et aller les cueillir dans leur cachette.
« Les pays où ces gens-là résident sont appelés à collaborer. Quand on lance un mandat d’arrêt international, il doit y avoir une suite. Quel que soit l’endroit où ils se trouvent, on ira les chercher », a martelé le ministre de la sécurité, Calixte Madjoulba.
Le ministre de l’administration territoriale, Hodabalo Awaté a, à son tour, montré ses muscles, allant jusqu’à assimiler les membres M66 à des « terroristes ». « Cela relève globalement des tentatives de déstabilisation de la sous-région. C’est du terrorisme quand on invite les gens à la violence gratuite », a-t-il renchéri.
Et comme au Togo, on se croit le nombril du monde à qui on doit obéir au doigt et à l’œil, un ministre togolais débarque à Paris avec certainement des mallettes bourrées de fric pour demander aux dirigeants du « pays des droits de l’homme » d’extrader les ressortissants togolais qui y vivent, simplement parce qu’ils ont appelé à des manifestations auxquelles les populations avaient massivement répondu. Et le ministre est convaincu que Emmanuel Macron allait mettre à sa disposition un cargo avec à son bord, ses concitoyens dont la tête est mise à prix qu’il allait ramener à Lomé.
Le pouvoir de Faure Gnassingbé a tiré à terre. Cela aurait été peut-être possible si le Togo était un Etat respectueux des droits de l’homme. Malheureusement dans les geôles de la dictature au Togo, croupissent depuis des années, une centaine d’innocents politiques. Les tortures et les refus de soins à certains gravement affectés par les conditions de détention ont entrainé la mort d’une dizaine parmi ces prisonniers politiques. De plus, des enlèvements de militants des droits de l’homme, d’activistes, bref de voix dissidentes, sont devenus le lot quotidien de la jeunesse togolaise. La preuve, mercredi 03 septembre 2025, deux jeunes, membres de la Synergie des élèves et étudiants du Togo (SEET), Abel Yawo Atitso et Lamboni Abdoul Zoulkaneini ont été enlevés à Lomé.
C’est dans ce climat de répression que le régime de Faure Gnassingbé a dépêché à Paris, Pacôme Adjourouvi, ministre des droits de l’Homme, accompagné de son collègue de l’Enseignement supérieur, Kanka-Malick Natchaba, aux fins d’obtenir des autorités françaises l’extradition des membres du M66.
« En visite dans la capitale française, fin juillet, le ministre des droits de l’homme du président du Conseil Faure Gnassingbé, Pacôme Adjourouvi, a introduit auprès des services judiciaires français une requête d’extradition visant une poignée de militants togolais vivant dans l’Hexagone. Cette démarche fait suite à l’émission par son gouvernement, au début du même mois, d’un mandat d’arrêt International à leur encontre », rapporte Africa Intelligence.
Mais la tentative a connu un échec cuisant. Selon le journal français en ligne, ce n’est pas la première fois que les autorités togolaises essuient le refus de Paris de livrer les ressortissants vivant sur le sol français pour des motifs politiques. Le confrère rappelle que « déjà, en 2002, des tentatives de la part du prédécesseur et père de Faure Gnassingbé, Gnassingbé Eyadema, d’obtenir le répartement de son ex-premier ministre Agbéyomé Kodjo s’étaient soldées par un échec ».
Aussi, en 2013, une forte délégation conduite par Atcha Titikpina, ministre de la sécurité d’alors, s’était transportée en Afrique du Sud, pensant naïvement se faire livrer l’homme d’affaires Sow Bertin Agba contre lequel un mandat d’arrêt international avait été émis. La délégation s’était vu opposer un refus catégorique. Petit lot de consolation, Titikpina et siens ont profité de leur séjour pour faire du tourisme au pays de Nelson Mandela. C’est à la même distraction que se sont livrés à Paris, Pacôme Adjourouvi et Kanka-Malick Natchaba.
M.A.
Source : Liberté