Après une accalmie imposée suite aux violentes manifestations de juin et juillet 2025, Faure Gnassingbé a repris, depuis fin septembre, ses multiples voyages à travers le monde. Sommets, forums, conférences internationales… le président du conseil multiplie les déplacements à grand frais. Pendant ce temps, le pays, étranglé par la dette et l’inflation, peine à financer ses services publics essentiels.
Faure Gnassingbé sillonne le ciel. Le désormais président du conseil cumule conférences diplomatiques et missions internationales : Sommet de Luanda sur le financement des infrastructures en Afrique, Processus d’Aqaba à Rome, Forum Émirats-Tchad à Abu Dhabi, Forum UK-Afrique francophone… Des déplacements intensifs… mais à quel prix pour un pays déjà sous assistance respiratoire économique ?
Le coût exact de chaque voyage présidentiel reste inconnu, mais une estimation basée sur les pratiques dans la région permet d’avoir une idée. Un seul déplacement peut mobiliser des dizaines de véhicules pour le cortège officiel, plusieurs avions, des hôtels de luxe, des repas, des indemnités pour le personnel accompagnant, ainsi que des mesures de sécurité renforcées (agents, équipements, hélicoptères ou véhicules blindés selon les destinations).
Ces voyages peuvent facilement coûter plusieurs centaines de milliers d’euros, voire dépasser le million, selon la durée et la destination, un montant qui aurait pu servir à améliorer les infrastructures locales ou soutenir les services sociaux essentiels.
Selon la dernière parution du magazine ivoirien Sika Finance du 12 novembre 2025, plus de la moitié des recettes fiscales du Togo a été consacrée au remboursement de la dette au premier semestre 2025. Cette situation explique à elle seule l’asphyxie économique du pays.
Dans ce contexte, même si ces voyages peuvent être perçus comme des « investissements diplomatiques » pour le régime de Lomé, pour le citoyen lambda, il s’agit d’un luxe que le pays ne peut pas se permettre.
Le Togo connaît une inflation qui étrangle les ménages, des infrastructures délabrées et un chômage excessif des jeunes. Des économistes interrogés dans la sous-région parlent de « décalage stratégique » : un État hyperactif à l’extérieur mais sous-financé et paralysé à l’intérieur. La question qui dérange reste : « qui paie la facture ? »
Dans un État transparent, le coût de chaque déplacement devrait être inscrit dans les documents budgétaires, soumis au contrôle parlementaire, audité par la Cour des comptes et rendu public par le ministère des Finances.
Au Togo, les dépenses liées aux voyages présidentiels sont souvent classées dans les charges générales de la Présidence de la République. Il est donc impossible pour le citoyen de savoir combien de milliards cumulent ces déplacements, ce qui suscite une inquiétude légitime.
Au-delà des finances publiques, les nombreux déplacements de Faure Gnassingbé alimentent un sentiment d’abandon au sein des populations : un président absent, un gouvernement silencieux, des priorités nationales délaissées.
Pendant que Faure Gnassingbé parle d’intégration, de souveraineté africaine et de corridors stratégiques à Abu Dhabi, sa population se nourrit du riz offert par le Japon et s’éclaire en milieu rural grâce aux panneaux solaires offerts par la Chine. L’eau potable reste un luxe, les routes praticables et des salaires décents, un mirage.
La fracture entre l’agenda international du chef de l’État et les priorités nationales risque de devenir, à terme, un coût politique plus lourd encore que les dépenses elles-mêmes.
François BANGANE
source ; lalternative.info
















