Lettre ouverte au chef de l’État Faure Essossimna GNASSINGBÉ au sujet de la Situation des EV du Togo; de M ADANI Koffi Katoré, 15 janvier 2024
Excellence Monsieur le Président de la République Togolaise,
Il y a quelques jours que circule sur les réseaux sociaux une lettre ouverte portant mon nom mais ne précisant aucun destinataire.
J’aimerais par la présente m’adresser directement à vous qui en tout état de cause avez le dernier mot au sujet de la situation qui y est présentée ainsi que des propositions qui y sont faites.
Permettez, je vous en supplie humblement, que je vous transcrive exactement ce que j’avais écrit, occasion d’éviter des altérations éventuelles que l’on peut être appelé à faire face avec les réseaux sociaux.
<<J’aimerais m’adresser en ce 22/12/2023 à toute personne de bonne volonté à travers cette lettre ouverte dans l’espoir que chacun puisse jouer sa partition en termes de réflexions et d’actions pour un mieux être des Enseignants Volontaires du Togo en situation très inconfortable.
Je porte le nom ADANI Koffi Katoré. J’ai fait l’expérience de l’enseignement en tant que volontaire depuis 2015 au Lycée de Yokélé à Kpalimé et j’ai abandonné volontairement la craie en 2020 au Lycée de Notsè pour me chercher autrement. J’ai repris la craie il y a à peine un mois pour deux raisons : soulager le lycée Tabligbo souffrant cruellement de manque de professeur de philosophie, et avoir une source de revenu complémentaire stable bien qu’insignifiante. Mon intention n’est pas de revenir faire carrière dans l’enseignement mais j’ai été dans une profonde angoisse terrible depuis la présentation du contrat de travail de l’établissement, un contrat assez curieux.
En effet, qu’il soit possible de mettre fin aux services d’un enseignant volontaire au cours de l’année scolaire en cours, parce que l’État a envoyé des enseignants titulaires, c’est non seulement de l’ingratitude mais aussi et surtout une humiliation. Ainsi, je préfère pour ma part reprendre la tangente avant qu’on ne me dise éventuellement de m’en aller.
Cette réaction est pour moi, une façon de dénoncer le traitement qui est réservé aux EV de tout le Togo et dont le contrat en question (similaire un peu partout) n’est qu’une expression flagrante.
D’abord le »pseudo salaire » pour la plupart des EV ne fait même pas le SMIG tant vanté par nos chers autorités depuis quelques années; c’est donc moins de 52.500 par mois avec la cherté actuelle de la vie, alors que les EV font le même travail et parfois ou même souvent plus que les titulaires qui ont un statut et une situation pas très rose mais relativement acceptable surtout avec les améliorations de ces dernières années. Ensuite on dit à l’EV qu’il se peut qu’il soit coupé de ce pseudo salaire en plein cours d’année.! Comment donc peut-il avoir le minimum de tranquillité d’esprit pour pouvoir continuer à transmettre efficacement la connaissance aux élèves, sachant qu’on lui dira bientôt » va tant d’ici, nous avons fini de t’exploiter » ?
Finalement l’avenir même des apprenants tient-il à cœur l’administration publique qui a pu laisser voir le jour et semble nourrir une telle situation ?
Quant à vous très chers parents d’élèves, les EV qui ‘vous’ sauvent au moment où l’État était tout a fait incapable ( l’État fait assez d’efforts louables mais ne couvre pas les besoins en enseignants !), vous êtes prêts à leur dire qu’ils ne valaient pas autant à vos yeux, et que ceux qui valent vraiment sont en route, c’est bien ça ?…
Le budget préétabli pour l’année et qui permettrait de payer les volontaires si l’État n’envoyait pas de titulaire, cet argent va s’envoler dès que l’État envoie des titulaires, et c’est pour cela que les volontaires ne pourront plus être payés jusqu’à la fin de l’année.. c’est bien ça ? (…)
En tout cas j’ai besoin pour ma part d’au moins un mois de réflexion au sujet de ce contrat et la probabilité que je continue après les un mois est actuellement de 00%. Toutefois, comme la nuit porte conseil et qu’il y a au moins 30 nuits pour cette période de réflexion, je crois que de bonnes décisions seront au rendez-vous soit de ma part, soit de la part de l’employeur, soit des deux côtés.
Ce qui m’importe vraiment, ce n’est pas du tout moi en tant que moi, mais l’ensemble des EV du Togo.
Ce que je propose concrètement après discussion avec plusieurs collègues volontaires est une seule chose en trois points :
Je propose la naissance d’un mouvement pacifique : Synergie des EV du Togo pour la paix et la stabilité dans les écoles. SEVT-PSE.(à améliorer)
L’idée c’est de garantir la paix et la stabilité ; pas de créer du désordre, de la tension, de l’instabilité.
Que faire pour garantir cette stabilité ? :
1- Écouter les EV, leur donner de la considération et du respect. Leur être reconnaissant en pensées, en paroles, par actions et par omissions, pour le sacrifice qu’ils consentent sur le terrain.
2- Garantir aux EV un minimum de stabilité d’esprit en garantissant la non rupture du ‘salaire’ au cours de l’année, que l’Etat envoie des fonctionnaires ou pas. Le salaire restant pour l’année ne saurait combler la valeur du sacrifice d’être EV.
3- Penser à comment intégrer tout volontaire ayant fait au moins 3 ans dans le volontariat avec un résultat satisfaisant, indépendamment des concours généraux. Si certains EV n’avaient pas compétences pourquoi les utilisait-on pendant des années ?. L’échec à un concours, surtout avec autant de candidats pour si peu de poste n’est pas pour moi un signe de non compétences ! Il faut donc un traitement spécial pour ceux qui sont dans la pratique durant plusieurs années déjà.
La nécessité d’avoir un document officiel fixant le statut particulier des EV du Togo semble être une nécessité non négligeable. Il faudrait également penser sérieusement et clairement à »l’Enseignant souffrant » des écoles privées et confessionnelles. Il est question de l’éducation, il est question de l’avenir de la nation !
Cette proposition donnera t-il un bon fruit ? À chacun de jouer sa partition : les EV eux-mêmes, les parents d’élèves, les élèves, les enseignants titulaires anciens comme nouveaux, les organisations de la société civile, le gouvernement, les hommes religieux, les organisations internationales, etc… Moi j’ai fait ma part à travers cet écrit et mon élan de démission probable.
Quant à vous chers EV, personne ne mènera vraiment cette noble lutte à votre place. Mais lutter ne signifie pas non plus la guerre dépourvue de sagesse. Je suis sûr que nos autorités seront fortement sensibles à ces mots qui ne sont autres que vos mots. Vous devez suivre ce dossier de près comme plaidoyer dans un esprit filial et patriote.
Aussi, aimerais-je vous déconseiller l’abandon de poste ainsi que tout acte de violence. Veuillez trouver dans mon abandon provisoire l’expression synthétique de vos déceptions et désirs d’abandon, et prenez courage pour tenir nos apprenants en attendant de voir ce que sera la situation d’ici fin janvier 2024.
Mes salutations filiales à tous.
M ADANI K. K., pauvre fils de l’or de l’humanité, la terre de nos aïeux, le Togo!>>
Vous faisant part de ma pleine disposition à vous rencontrer et dans la ferme conviction que vous porterez une attention particulière à cette situation dont la solution est dans vos mains, veuillez agréer Excellence Monsieur le Président, Faure Essozimna GNASSINGBE, l’expression de ma profonde considération.
Votre fils
ADANI Koffi Katoré