« Si extrêmes que soient les canailles, ils ne le sont jamais autant que les honnêtes gens ». Dans Le Journal d’une femme de chambre, Octave de MIRABEAU fait l’éloge des bâtisseurs, ceux qui comprennent ce que vaut la vie, la responsabilité qui leur incombe dans la solidarité diachronique et synchronique pour participer dignement à l’aventure humanitaire, à l’édification d’un véritable mieux-être de notre terre, de nos populations. Le sens du devoir envers soi-même et des autres dans l’appréciation juste et heureuse du partage pour faire grandir notre présent en partage et la postérité est une éducation, une culture à diffuser et à maintenir dans toutes les couches sociales de nos pays.
C’est la conscience des valeurs qui nous enrichit et féconde la planète. Le continent africain est malheureusement dans une terrible perte de la qualité des hommes, c’est-à-dire, des leaders dont la stérilité spirituelle et les ambitions creuses n’ont que de greffons de cupidité, d’avidité du gain personnel, d’enrichissement illicite. Ils sont dans une connivence cruelle avec un cercle mafieux, composé souvent de la légion étrangère et des amis véreux pour déposséder nos populations de ce que le ciel et la providence ont si bien pourvu nos terres, nos pays.
De quelle quantité humaine sont nos propres dirigeants qui choisissent la voie de la prédation de l’espace géographique, socio-politique, économico-social dont ils prétendent assurer la régence ?
Le cri strident des Africains contre le bradage des ressources de nos sols et sous-sol n’est-il pas une puissance d’éveil de tous les compartiments de la vie pour une mobilisation générale contre les pratiques qui condamnent l’Afrique à la misère, à la mort lente, certaine?
Qu’avons-nous à réserver à tous ceux qui contribuent à la destruction de nos pays, de notre postérité ?
1) Des leaders sans leadership
Dans un monde de verre où se lisent les intérêts et le devenir des peuples, les vrais leaders de nos pays, et ils sont si rares, savent la nature du combat qu’il faut engager au bénéfice de leurs peuples. Les intérêts économiques, sociaux, politiques, géostratégiques se défendent impitoyablement et les hommes d’Etat dignes de respect ne savent pas renoncer à la sécurité de leurs peuples, aux ressources qui permettent aux populations d’assumer leur autosuffisance, leur émancipation.
Il est choquant et renversant de voir encore en Afrique des dirigeants, des personnalités absconses au narcissisme puant s’agiter dans une idiote effervescence de cupidité qui œuvre, dans une vallée de crime, pour spolier nos populations avec des complicités monstrueuses en cédant les ressources de nos pays à des forces de démolition de l’Afrique.
Au nom de quel principe et sous quel prétexte peut-on à ce siècle demeurer dans l’instinct primaire tout à fait du nègre incongru, maladroit et jouet de l’occupant ou de l’esclavagiste pour laisser entrer des mains noires étrangères les fortunes de nos terres, de nos pays pour se contenter des dividendes insalubres qu’on en tire personnellement ?
Il y a toujours des falots de leaders d’une perversité effroyable de conscience et aux petites idées qui croient que les frimes et les cartels sont des pouvoirs auxquels, il faut s’adosser pour gouverner en protégeant leurs intérêts avec des promesses de ristournes. Les dirigeants en mal de légalité sont une calamité pour nos pays, parce qu’ils cherchent partout des soutiens, même les plus diaboliques, pour se maintenir au pouvoir avec des contreparties qui ne sont que de vraies rançons sur les ressources et les richesses de nos terres. Cette façon macabre de gouverner nos Etats est un scandale qu’il faut expliquer aux populations dans une croisade pour affirmer la sacralité de ce dont la nature nous a pourvu pour nous permettre de vivre, de faire grandir nos enfants dans un monde de concurrence et des compétences, où nous avons absolument besoin de nos ressources pour nous former, nous développer, affirmer notre existence.
Le sens civique, patriotique, moral et humain est la grande puissance d’élévation des peuples qui se bâtissent dans l’âpreté du travail et dans la fierté des potentialités que la providence a mise à la disposition de chaque peuple pour bien en user. Ceux qui ont gaspillé leurs ressources naturelles et qui ne savent pas se créer des richesses dans la juste solidarité des échanges avec nous travaillent à la spoliation pour nous priver des ressorts de notre propre évolution.
Nous avons honte des dirigeants africains qui sont toujours d’un degré de conscience plate pour demeurer dans la bassesse de la prédation des ressources de l’Afrique. Il faut voir comment les enfants d’Afrique meurent dans la Méditerranée et tout ce que la diaspora africaine subit dans les pays pilleurs de richesses et qui demeurent dans le carcan esclavagiste pour comprendre l’urgence à préserver nos fortunes, à les mettre en valeur, pour que, de droit, le partage des biens de la collectivité nationale recrée la confiance et l’espoir dans nos pays.
Il est proprement idiot de vouloir être roi sans être capable de nourrir son royaume, de créer les conditions de l’épanouissement des citoyens, de garantir leur sécurité, leur avenir. Les rois ne sont pas faits par des voleurs, des véreux, des flatteurs, des vampires, des pieuvres avides du sang du peuple.
Les manœuvres pour être au sommet en culminant avec une échelle de sottises motivent Paul VALERY à dire dans Monsieur Teste : « Je ne sais pas ce qu’est la conscience d’un sot …».
2) La guerre totale des peuples d’Afrique
Il est insoutenable pour tous les Africains que leurs propres richesses soient entre les mains des puissances d’argent, pendant qu’ils crèvent de faim, de soif. Le dénuement n’est pas acceptable pour tous ceux qui savent évaluer les fortunes sur lesquelles ils sont assis. Les raisons d’un éveil ravageur sont dans l’intensité du supplice imposé à la grande majorité des Africains par les politiciens de bas-étage qui ne font que le bonheur pour eux-mêmes en détruisant de sang-froid les richesses de nos pays par le bradage qui prive les populations de nombreuses opportunités pour se sortir de la précarité révoltante et mortifère.
Vivre chez soi comme un étranger perdu sur une terre qui le rebute, qui le chasse est la chose la plus inconcevable pour tout citoyen. C’est pourquoi le mal du bradage de nos terres et des ressources de notre sol est une destruction absolue qui appelle à un mouvement patriotique incandescent de toutes les catégories socio-professionnelles et de tous les groupes de pressions comme les chefs traditionnels, les artistes, le clergé, les écrivains, les défenseurs des Droits humains, les professionnels des médias, les syndicats de tous les travailleurs, les amicales…
Le destin de ce continent appartient en propre aux Africains. Ils sont prêts à accepter le combat de survie sur leur sol, dans leurs pays respectifs. Un mouvement panafricain contre le bradage des richesses du continent est facile à susciter, parce que face au désastre, des réponses se formulent d’elles -mêmes pour endiguer les prolongations des catastrophes.
Il n’existe nulle part dans le monde des peuples qui ont cédé leurs terres, les richesses à des envahisseurs et qui ont réussi à se construire, à bâtir leur avenir, à propulser leurs enfants vers les hauteurs de l’émancipation et du développement. En Afrique du Sud, au Brésil, en Australie, en Nouvelle Zélande, les désastres de l’accaparement des terres des autochtones illustrent le futur de cette politique insensée de cession massive à des étrangers de nos domaines agricoles, miniers.
En Centrafrique, un grand mouvement de réactivité de la conscience nationale est allumé par le clergé catholique pour mener le front du refus contre les envahisseurs indélicats. Cette exemplarité du clergé centrafricain doit s’étendre à tout le continent ainsi qu’à toutes les instances sociales, politiques de nos pays. Cette nouvelle ère contre les faussaires et les tendances esclavagistes de dépossession du trésor africain appelle tout naturellement notre pays, le Togo, à un sursaut national pour sauver nos terres, préserver la postérité contre la déchéance, la misère.
Le parlement togolais, quelle que soit sa couleur, ne peut faire l’économie d’une réactivité contre le phénomène qui sévit sur notre sol sans tomber dans le gouffre de l’immoralité et de la bêtise. Mais, la société civile et les organisations des Droits de l’homme ont la tâche la plus ardue pour des séances d’explications simples à nos populations qui sacrifient l’avenir de nos progénitures dans une liquidation de nos terres arables et qui condamnent les enfants du Togo à être étrangers chez eux. Le mouvement du peuple, la mobilisation, est une arme efficace contre les gouvernants qui sont dans l’apathie ou dans la pratique du phénomène de bradage. Nous comptons beaucoup sur la mobilisation comme, du reste, NAPOLEON, cité par LAS CASAS, dans Le Mémorial de Sainte-Hélène : « Les hommes qui ont changé l’univers n’y sont jamais parvenus en gagnant des chefs ; mais en remuant des masses ».
Didier Dossavi
Alternative Togo