Qui est-ce? Dans un pays où la justice sait si bien charger des innocents et dédouaner des corrompus, il est parfois mieux de porter des gants blindés, à l’épreuve de certaines surprises. Même si au final, les faits rapportés sont avérés.
Il a été juge d’instruction, procureur de la République et actuellement président de tribunal. Son train de vie, pour ceux qui le connaissent, est bien au-dessus de celui d’un magistrat. Et ce ne sont pas les émoluments de sa fonction qui l’ont rendu riche, mais bien les « à-côtés» du métier. Pendant longtemps, il fut juge d’instruction. Mais saviez-vous que l’homme s’était enrichi indûment alors qu’il occupait cette position? Et la source de sa richesse est venue des … Colombiens !
Des langues se sont déliées au fil du temps au sein de la prison civile de Lomé. Il fut un moment où la justice togolaise avait mis la main sur des trafiquants de drogue d’origine colombienne. Et notre futur prétendant au sein du Conseil supérieur de la magistrature avait senti une occasion en or pour se faire du fric. Le juge d’instruction étant celui qui instruit les dossiers, il est en mesure de faire ou de défaire la vie d’un homme. Les trafiquants colombiens ayant très vite compris la procédure, avaient déboursé es sommes en chiffres terminés par beaucoup de zéros. Premier indice.
Le deuxième indice qui tire sa source du premier, c’est qu’il confie à ses proches qu’il ambitionne de figurer parmi les milliardaires avant les élections présidentielles prochaines.
Un autre élément qui peut aider à résoudre le puzzle, il est un homme de réseaux, et pendant qu’un responsable d’un réseau croupit à la prison civile de Lomé, la femme du prétendant au CSM circulait dans sa localité à bord d’une voiture estampillée au nom du réseau en question. Et ce n’est pas fini.
Le 8 juillet dernier, notre magistrat a failli en venir aux mains avec un ancien détenu dans un supermarché. L’ancien tôlard racontait des faits relatifs à son séjour carcéral à des amis et expliquait le rôle flou joué par notre magistrat qui, curieusement, était dans le supermarché et avait entendu la conversation. Alors il se serait enflammé, accusant l’ancien détenu de le provoquer. N’eut été les autres, un véritable pugilat aurait pu éclater.
Au cas où toutes ces pistes ne permettent pas à sa hiérarchie et son entourage de le reconnaître, nous ajoutons la cerise sur le gâteau: il a obtenu son diplôme de 3ème cycle, option Magistrature à l’Ecole nationale d’administration en 2000. Ah, un tout dernier indice, il aime à se faire appeler « tout puissant » dans sa localité.
Le mandat de l’actuel CSM est arrivé à terme. Enfin. Et si pendant longtemps, cette institution a brillé par sa partialité — les menus fretins sont sanctionnés sévèrement pour des peccadilles alors que les gros poissons et leurs progénitures reçoivent l’absolution-, on veut croire que la nouvelle équipe choisira une autre voie plus humaine et plus impartiale dans le règlement des faits se rapportant à l’éthique et la déontologie du magistrat. Car, aucun magistrat, fut-il «suprême », ne doit plus jamais être au-dessus des textes de loi qui régissent le corps.
Aussi, la nouvelle équipe doit comprendre qu’à l’heure des technologies de l’information et de la communication, tous leurs faits et gestes seront scrutés à la loupe, et surtout leur passé ressurgira pour les rattraper. Comme ce fut le cas pour… l’homme des lots!
Abbé Fana
Source : Liberté N°2978 du Jeudi 08 Août 2019