S’il fallait trouver le génie togolais en politique, ce serait cette aisance des politiques à vite trouver des sigles en C pour définir leurs fréquentes rencontres d’échanges et de négociations politiques. CPDC, CPDC rénové, CNAP… puis CPC (Cadre Permanent de Concertation). Au Togo, l’inspiration n’en manque pas quand il s’agit de trouver des sigles d’appui aux retrouvailles régulières entre le parti au pouvoir et ses chères oppositions. Mais à la fin, que dalle ! L’on ne retiendra qu’un grand marché de dupes que les uns et les autres ont volontairement souscrit pour être dupés. C’est cela !
Cadre Permanent de Concertation (CPC), c’est la nouvelle trouvaille de l’Exécutif togolais pour embarquer ses opposants dans un tunnel sans bout, un piège sans fin. Grand marché de dupes, à la fin, le CPC ne profitera qu’à l’initiateur, heureux d’avoir accompli son plan du début. Ce sera l’heureux aboutissement pour un régime qui se réjouira de s’être bien amusé de ses chers opposants pour proroger son bail à vie sur le Togo. De la Conférence Nationale à l’Accord Politique Global, en passant par l’Accord Cadre de Lomé, sans faire abstraction de tous les cadres de discussions qui se sont succédés, le régime RPT/UNIR n’a jamais changé d’ambitions, de prévisions, de prétentions et d’objectif. Se maintenir indéfiniment à la tête de l’État du Togo, reste son objectif ultime depuis son demi-siècle de gouvernance. Alors, dans toutes ses initiatives, il tient solidement compte que la finalité de son projet quelles que soient les fausses ouvertures politiques qu’il assure concéder à l’opposition. Or, bon an mal an, sa stratégie de conversation du pouvoir reste la même. Tikpi Atchadam : « Le RPT/UNIR n’a jamais changé de fonctionnement… Quand on veut faire avancer les choses, le RPT oppose un non catégorique. Et quand il a des difficultés, il crée une commission. Quand il a des difficultés avec la commission, il demande un dialogue. Quand vous arrivez au dialogue, il fait tout pour bloquer le consensus.
S’il ne peut pas bloquer le consensus, de guerre lasse, il accepte l’accord qu’il signe mais qu’il ne va jamais respecter. Il revient en ce moment au non catégorique ». Depuis des années, le régime a toujours fonctionné ainsi. Mais ce qui est curieux, c’est qu’en trente années et plus de lutte politique, l’opposition s’est aussi laissée prendre au piège. Accompagnatrice du régime dans ses initiatives de dialogue, l’opposition ne se réveille et ne se découvre que lorsqu’elle se trouve en plein piège, presque son siège, vu que c’est là où elle se retrouve souvent, c’est-à-dire, dans le piège du régime. Cadre Permanent de Concertation, le CPC ne fera pas exception à la règle. Car, la finalité de son projet est déjà connue. Et après les régionales, un nouveau cadre s’ouvrira sur les mêmes discussions politiques afin de préparer les législatives. Ce sera, plus tard, le tour de la présidentielle. Puis, le fameux cycle reprendra pour un gros zéro, c’est cela, le Togo. Alors, espérer l’aboutissement heureux d’un dialogue politique entre le pouvoir et ses oppositions pour l’instauration d’une démocratie véritable, c’est croire que pour bientôt, le soleil se lèvera à l’ouest pour se coucher à l’est. Ce jour-là, Dieu même sera étonné. Sérieux ! Le jour où le régime togolais sera préparé à lâcher le pouvoir, l’on pourra, en effet, parler de vrai dialogue. Or, ce jour ne peut exister que dans un rêve, malheureusement.
La Manchette N° 0204 du 15 Juin 2022