Il était absent du territoire national depuis des mois, laissant son parti se poser en catastrophe tel un avion en détresse, heurté par de gros et petits projectiles qui l’ont touché en plein vol. Il s’agit de Gilchrist Olympio, le président national de l’Union des forces du changement (UFC), et «chef de file de l’opposition». Opposant charismatique devenu anecdotique, puisque kaléidoscopique, Gilchrist a refoulé le sol togolais le 09 juin après un long séjour en France et au Ghana, d’après ses proches. Mais à peine arrivé, il se réfugie dans ses tours de magie, pensant comme en 2010, duper le peuple
I ls sont finis les jours de gloire, jours d’allégresse, de louanges, d’adorations ou de vénérations, ces jours où, de la frontière Kodjoviakopé au centre-ville, Lomé refusait du monde, totalement acquis à la cause du « yovovia » (le petit blanc). Réunie sous un soleil de plomb ou sous de fortes averses orageuses, une fourmilière humaine, pleine de vie et d’allant, enthousiaste et heureuse de retrouver son seul leader qui faisait frémir la vieille dictature, cet essaim de jeunes gens, d’adultes, de vieux et de vieilles, allait et venait, chantant fièrement à la gloire de Gilchrist Olympio, seul opposant qui incarnait le rêve d’alternance démocratique et de changement politique au Togo. Mais le jeudi dernier, 09 juin 2022, ils n’étaient qu’une brochette de gens, sept au total d’après nos informations, à accueillir Gilchrist en catimini, puisque loin des caméras et des cliquetis des appareils photo. Il était comme jadis descendu à la frontière de Kodjoviakopé (frontière TogoGhana), et est tristement rentré chez lui dans le silence de la rue. Ne dit-on pas que quand la musique change, la danse change ? Eh oui, « on peut tromper une partie du peuple tout le temps et tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps », dixit Abraham Lincoln, l’ancien président américain qui aurait pu ajouter que toute trahison a un prix. Gilchrist a tourné dos au peuple, le peuple a tourné dos à Gilchrist. Et aujourd’hui, l’homme n’est plus que l’ombre de lui-même. Triste sort ! Mais l’essentiel qu’il convient de retenir de son retour, reste ses premières déclarations rapportées par nos confrères de Afreepress : « Je suis très heureux de vous retrouver tous en pleine forme. Je vous remercie également pour votre détermination à poursuivre la lutte politique et je remercie également Dieu pour ça. C’est vrai qu’à certain âge, on n’est plus en forme comme avant, mais je vous rassure que j’en ai encore un peu pour poursuivre la lutte ». Attendez ! de quelle lutte parle exactement M. Gilchrist Olympio ? Celle qu’il a lui-même galvaudée, « marchandée » pour reprendre certains de ses compatriotes Togolais, très contrariés depuis son ralliement au régime RPTUNIR ? Grand qu’il fut, Gilchrist se laisse aujourd’hui humilié comme un petit monsieur par les rejetons d’un système politique antique et revanchard, et qui jamais, n’oublient les affronts subis. C’est le lieu de rappeler qu’agacé par sa situation et la situation de son parti qui bat de l’aile après l’accord politique UFC-RPT du 26 mai 2010, Gilchrist cracha ses vérités au pouvoir de son allié Faure Gnassingbé. Il dit : « Le régime a continué à travers des calculs politiciens à court terme, à saper les fondements de cet accord de gouvernement, le rendant ainsi partiellement inopérant ». Puis, retrouvant son mordant d’antan, il ajouta : « Le régime RPT-UNIR a planté les graines du désespoir et des instabilités qui risquent maintenant à nouveau d’enflammer notre pays, si le pouvoir en place ignore trop longtemps cette contestation légitime » du peuple. C’était lors du soulèvement populaire du 19 août 2017, impulsé par le PNP de Salifou Tikpi Atchadam. De ce coup de gueule, Gilchrist Olympio, le Chef national de l’UFC, a annoncé sa retraite politique. Il n’en fallait pas plus pour provoquer l’ire de son nouvel ami, mieux son allié. Réponse du berger à la bergère, Faure Gnassingbé, répliqua à la sortie du patron de l’UFC en ces termes : « Le parti de Gilchrist Olympio s’est, entre-temps, divisé, et la majorité a rejoint l’ANC de Jean-Pierre Fabre. L’essentiel de sa propre famille biologique est également resté au sein de l’opposition. Ce sont ses proches qui ont exercé des pressions sur lui afin qu’il adopte cette position, tout en annonçant sa retraite politique ». Mais une année après l’échange des mots discourtois entre alliés, Gilchrist Olympio que le ministre Gilbert Bawara traitait d’« Amnésique », s’est retrouvé tout sourire dans les bras de Faure Gnassingbé, devenant à l’issue des élections législatives de décembre 2018, le Chef de file de l’opposition avec plusieurs de ses proches siégeant à l’Assemblée nationale.
Des « députés nommés », ainsi qu’ils sont souvent étiquetés par certains Togolais. « J’en ai encore un peu pour poursuivre la lutte », avait-il déclaré. Une phrase qui rappelle fortement celle qu’il a prononcé en 2005 : « S’ils osent voler cette fois-ci les élections, il y aura trois grandes choses ». A l’époque, les militants et partisans de son parti, et tous les Togolais qui se battaient courageusement pour l’avènement de l’alternance, et donc de la démocratie au Togo, l’ont applaudi à tout rompre. Mais la suite demeure une affaire de triste souvenir. Quatre-cents (400) à cinq cents (500) personnes ont été tuées selon les Nations unies. Quant à Gilchrist Olympio, il est resté introuvable sur les sentiers et ses « trois grandes choses » promises au peuple en cas d’un énième holp-up électoral, synonyme d’un nouveau passage en force du régime cinquantenaire, ses « trois grandes choses », n’étaient alors que des slogans, de vaines incantations pour endormir un peuple, assoiffé du changement. Mais ce qui constant, c’est que l’espérance à un Togo nouveau reste si forte au sein de la masse combattante pour l’alternance et, en dépit du fait que la nuit soit encore longue, l’espoir qu’un jour nouveau viendra est si fort que le peuple ne se lasse jamais dans sa vraie lutte pour le changement. Pour Gilchrist Olympio, il n’est, pour l’heure, tard pour bien faire. Il peut encore retrouver la vraie lutte du peuple togolais avant qu’il ne soit vraiment tard.
La Manchette N° 0204 du 15 Juin 202