Deux mois après le séjour au Togo d’Ali Bongo Ondimba, ce dernier accueille Faure Gnassingbé. La visite de travail et d’amitié va durer 48 heures. On annonce des visites de sites semblables à ceux dont dispose le Togo déjà. Du tourisme qui traduit le ridicule de ces visites à répétition.
Dans notre précédente parution, nous avons consacré un article à la tournée de Faure Gnassingbé dans certaines préfectures, vraisemblablement dans le cadre d’une précampagne électorale. On le croyait enfin revenu au bercail pour un long séjour. Ce n’est pas le cas. Et pour cause, depuis ce lundi, le globe-trotteur togolais a repris les airs. Dans la journée de ce lundi 30 janvier 2023, il a été signalé dans la capitale gabonaise, Libreville. « Le Président de la République, Son Excellence Faure Essozimna Gnassingbé, effectue à partir de ce jour, une visite de travail et d’amitié en République du Gabon. Ce déplacement du chef de l’État intervient deux mois après la visite officielle de son homologue gabonais, Son Excellence Ali Bongo Ondimba, à Lomé. Les deux chefs d’État qui avaient eu, à cette occasion, des échanges fructueux sur plusieurs questions d’intérêt commun et domaines de coopération, avaient convenu de poursuivre les partages d’expériences », lit-on dans le communiqué publié par la Présidence de la République.
Selon le même communiqué, dans l’optique de poursuivre des partages d’expériences, le président de la République et sa délégation « visiteront notamment la zone d’investissement spéciale de Nkok et le Port minéralier d’Owendo. Au préalable, les deux chefs d’État s’entretiendront en tête-à-tête sur des sujets d’intérêt bilatéral et continental ». Voilà ainsi décrit le programme de cette visite présidentielle au Gabon.
Et comme on peut le déduire du communiqué officiel, cette visite n’est que ce que certains appellent dans le jargon politique togolais « le retour de l’ascenseur ». En effet, du 30 novembre au 1er décembre 2022, Ali Bongo Ondimba a séjourné à Lomé. Malgré son état de santé de « fer » et toutes les polémiques qui l’entourent, le leader gabonais a réussi la prouesse de faire une série de visites de terrain. Il a été sur le site de la forêt artificielle classée de Lili, située dans la région maritime à 50km de Lomé, et visité la Plateforme industrielle d’Adétikopé (PIA). Le Président Ali Bongo Ondimba était également dans le Data centre, au Port autonome de Lomé et le Palais de Lomé pour une visite touristique.
Un parcours pareil a été préparé pour le séjour de Faure Gnassingbé en terre gabonaise puisqu’il est indiqué qu’en plus des échanges en tête-à-tête, le chef de l’Etat togolais « devrait visiter notamment la zone d’investissement spéciale de Nkok, qui a le même modèle de développement que la Plateforme industrielle d’Adétikopé, et le port minéralier d’Owendo ». Bref, dans ce séjour, Faure Gnassingbé ne va rien découvrir de nouveau au Gabon, comme son ami Ali Bongo Ondimba n’en a pas découvert lors de son séjour au Togo.
Le ridicule s’installe
Au cours de l’année écoulée, Faure Gnassingbé et Ali Bongo Ondimba se sont rencontrés à plusieurs reprises. Et officiellement, il s’agit toujours de visites de travail et d’amitié, comme le précisent les tweets de la présidence de la République du Gabon en ces termes : « Ce séjour du Président de la République Togolaise s’inscrit dans le cadre du raffermissement des liens d’amitié, de fraternité et de coopération qui unissent les deux pays ».
On s’interroge sur le genre d’amitié qui lie les deux hommes. Faure Gnassingbé et Ali Bondgon Ondimba sont-ils si copains ? Peu importe les réponses à cette question. En dehors du fait qu’ils partagent la même boulimie du pouvoir, les deux hommes sont des héritiers d’anciens chefs d’Etat morts au pouvoir : Gnassingbé Eyadéma au Togo, Omar Bongo au Gabon. Et tout porte à croire qu’ils ne comptent pas non plus lâcher le pouvoir, malgré le désaveu manifeste de leurs différentes populations. Y mourir est peut-être une option qu’ils cultivent. Il y a aussi le fait que le Togo et le Gabon sont des pays réfractaires au respect des droits de l’homme et où la corruption est un sport national. Ce qui différencie Faure Gnassingbé et Ali Bongo, c’est peut-être leurs côtés diplomatiques. L’un est versatile, vacillant d’un bord à l’autre selon ses intérêts, l’autre semble attaché à la Françafrique.
Dans la réalité, ces visites à répétition, au-delà du fait qu’elles montrent que les deux hommes se sentent de plus en plus proches, dénotent aussi du ridicule qui s’installe. Pour des chefs d’Etat, sortir de leur pays se doit d’être pour des raisons suffisamment fortes. Si on doit sortir de son pays, engager des dépenses colossales pour aller visiter un port ou un site industriel, cela ne sied pas. C’est de la gabegie. Les ministres ne peuvent même pas se prêter à ce jeu d’enfant. C’est le rôle des techniciens. Mais comme dans nos pays, la fonction présidentielle est dévaluée par des comportements rétrogrades, le chef de l’Etat s’offre le plaisir d’aller visiter des ports qui sont semblables à ce dont le pays dispose déjà. C’est le ridicule.
G.A.