L’organisation communautaire s’est une deuxième fois réunie en sommet extraordinaire ce 10 août 2023 à Abuja au Nigeria pour débattre de la crise nigérienne. De purement économique cette institution devient politique et outrepasse ses prérogatives.
La CEDEAO est une organisation pour promouvoir le développement économique de ses membres et aucun texte l’instituant n’a intégré un volet politique à sa création en 1975. Même la charte additionnelle de 1993 insère simplement la prévention et la gestion des conflits sans jamais faire référence d’une ingérence politique dans les affaires intérieures de ses États membres. Pis encore aucun article n’ordonne le déploiement d’une force militaire dans un de ses États.
Comment d’une organisation purement économique qui suppose la libre circulation des personnes et des biens, cette CEDEAO incapable de s’unir pour créer une monnaie commune, une mutualisation des ressources pour une industrialisation, un développement économique et des infrastructures, est-elle devenue un organisme purement politique laissant de côté les idéaux qui ont nécessité sa création?
Certes militairement elle était intervenue en Sierra-Leone, au Libéria, en Guinée-Bissau, en Côte-d’Ivoire, en Gambie, au Mali mais c’était en outrepassant ses prérogatives.
Hier à Abuja lors du deuxième sommet extraordinaire sur le Niger, les États de la CEDEAO n’ont montré que des muscles en affirmant ordonner l’activation immédiate de sa force d’intervention et le déploiement de la force en attente. Mais comment ce déploiement va-t-il se faire? Avec combien d’hommes? Quelles logistiques dans un Niger si vaste et un désert si immense dans lequel sévissent différents groupes djihadistes?
Le Secrétaire d’État américain Antony Bliken tard dans la soirée du jeudi a douché l’ardeur belliqueuse de Ouattara Alassane qui dans un tour de menton a attesté que la CEDEAO avait ordonné une intervention militaire immédiate et que son pays allait fournir entre 850 et 1100 hommes, le Bénin, le Sénégal et le Nigéria fourniront aussi des troupes et que le reste des pays les rejoindront plus tard (très vague). Ce qui contredit les propos de Bola Ahmed Tinubu l’hôte du sommet qui entend «donner la priorité aux négociations diplomatiques et au dialogue qui sont les piliers de notre approche».
Les Américains veulent une «résolution pacifique» à la crise au Niger a répété Blinken. «Les États-Unis apprécient la détermination de la CEDEAO a exploré toutes les options pour une résolution pacifique de la crise» dit un communiqué du département d’État. Cela suppose qu’aucun appui financier, logistique ou militaire n’est envisagé en cas d’utilisation de la force. La Cedeao a-t-elle les moyens pour mener une guerre contre 4 de ses pays membres à savoir le Niger, la Guinée, le Mali et le Burkina ces deux derniers fortement armés et soutenus par la Russie? Ou bien compte-t-elle sur le soutien de la France qui, sans l’appui logistique des USA, s’est toujours enlisée seule dans des guerres?
La sagesse suppose de trouver une issue pacifique à la crise au Niger car une guerre fera exploser tout le Sahel et l’Afrique de l’Ouest.
Anani Sossou