Le Front Citoyen Togo Debout (FCTD) n’est pas d’accord sur le fait que les facilitateurs du dialogue intertogolais aient donné une date indicative pour l’organisation des élections. Ils l’ont exprimé à travers une déclaration dont voici la teneur !
PROTESTATION DU FRONT CITOYEN TOGO DEBOUT CONTRE LA PRETENDUE DATE INDICATIVE DE LA CEDEAO POUR LA TENUE DES ELECTIONS AU TOGO
Chers journalistes des médias nationaux et internationaux,
Chers concitoyens togolais,
Le mercredi 27 juin dernier, sous la facilitation de la CEDEAO, le dialogue inter-togolais a repris ses travaux et a sorti un communiqué annonçant probablement les couleurs du sommet des chefs d’Etat du 31 juillet prochain. Ce communiqué nous interpelle et nous voulons attirer, d’une part, l’attention de la CEDEAO sur les dangers réels qu’elle fait courir à la Nation et à la démocratie togolaises en projetant la tenue des élections en novembre 2018 alors que les réformes ne sont pas faites et, d’autre part, appeler le peuple togolais à la vigilance et à la mobilisation.
A- A l’endroit des Facilitateurs et des Chefs d’Etat et de Gouvernements de la CEDEAO
Excellences Messieurs les Présidents de la République du Ghana et de la République de la Guinée, le peuple togolais ne saura jamais assez vous remercier pour vos implications et engagements pour une sortie pacifique de la crise togolaise qui dure depuis des mois. Dans votre communiqué du 27 juin 2018, trois points apparaissent rationnellement importants et louables :
➢ La libération des détenus arrêtés dans le cadre des manifestations publiques,
➢ La restauration de la liberté de manifestation pacifique publique sur tout le territoire et la levée de l’état de siège de fait,
➢ La suspension de la préparation unilatérale des élections par le Gouvernement.
Nous vous témoignons une fois de plus notre gratitude. Cependant, le point concernant le souhait d’aller aux élections législatives avant fin novembre 2018 reste très problématique.
Cette problématique est née de l’interprétation divergente que les principaux acteurs du dialogue font de votre communiqué quant à la question électorale : là où la facilitation émet ou évoque un souhait, le pouvoir en place brandit « l’impératif réaffirmé » de la tenue des élections en novembre 2018.
Nous n’avons cessé de dire que le problème togolais n’est pas fondamentalement un problème d’élections. Nous avons organisé plusieurs fois des élections mais cela n’a produit aucun effet. Suffit-il d’organiser des élections dans n’importe quelles conditions pour 2 prétendre être un Etat de droit démocratique? Si le pouvoir en place refuse de faire les réformes constitutionnelles et institutionnelles recommandées par l’APG, la CVJR, le HCRRUN, c’est parce que ces réformes constituent les clés d’un réel changement.
Pourquoi ne ferait-on pas les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales avant l’organisation de toutes sortes d’élections ?
Excellences, Messieurs les Facilitateurs, comment concilier votre décision de suspension des préparatifs unilatéraux des élections par le pouvoir et en même temps votre souhait d’aller aux élections en novembre 2018 ?
Excellences, Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernements de la CEDEAO, la solution pacifique ne peut pas provenir uniquement de la fixation d’une date pour les élections, futelle à titre indicatif. Cela risque de replonger le Togo dans une phase sombre et susceptible de constituer une menace à la paix et à la stabilité au Togo et dans la sous-région. Aucune élection ne sera crédible sans les réformes : réforme du cadre électoral, du code électoral et aussi la révision du fichier électoral, du découpage électoral, de la composition de la CENI et de la Cour Constitutionnelle.
Si la CEDEAO ne veut plus être, réellement, un simple syndicat des chefs d’Etat, comme l’a si bien dit le Professeur Alpha Condé de la Guinée, il est temps que la CEDEAO soit une institution qui écoute les peuples et non seulement préserve les intérêts des dirigeants.
La CEDEAO a laissé un très mauvais souvenir en 2005 dans la mémoire des Togolais. Il serait salutaire pour elle d’être en 2018 une institution crédible afin de jouer son rôle. Messieurs les chefs d’Etat et de Gouvernements de la CEDEAO, la démocratie est-elle réellement un pilier de l’espace que vous voulez construire entre les peuples ou bien juste un simple slogan ? Comment professer les mots de CEDEAO des peuples sans écouter les désirs des peuples ?
Oui à une résolution de la crise qui n’humilie personne, oui au langage diplomatique mais on ne peut plus occulter la vérité. Car elle a aussi une fonction réparatrice et éducative. La falsification de la vérité entretient les rancœurs, les frustrations et ne construit pas la destinée d’un peuple.
Excellences, Messieurs les Facilitateurs et tous les autres chefs d’Etat de la CEDEAO, aucun compromis ne se fera plus sur le dos du peuple togolais. La société civile responsable à laquelle aspirent nos Etats pour une ère démocratique n’acceptera plus n’importe quelle décision en l’occurrence une feuille de route qui conduise aux élections sans réformes préalables et majeures des institutions et du cadre électoral. La volonté du peuple togolais opprimé, meurtri et assujetti, sorti depuis des mois dans les rues, croupissant dans la misère et la déliquescence de ses structures élémentaires, ses aspirations profondes, sa soif palpable du changement et de l’alternance, doivent être prises en compte. Ce que vos peuples respectifs n’accepteraient pas, ne le proposez pas au peuple togolais.
Vous avez ainsi une responsabilité et un test de crédibilité à passer devant le peuple togolais, devant les peuples africains, devant le monde entier et devant l’Histoire.
B- A l’endroit du peuple togolais, seul détenteur de la souveraineté nationale
Vaillant Peuple Togolais, depuis le 19 août 2017, après avoir, tant de mois, fait confiance aux gouvernants qui devraient normalement œuvrer pour le bien-être de chacun et de tous, tu as décidé de prendre ton destin en main.
Ta bravoure, ta détermination, ta mobilisation malgré les multiples intimidations, les arrestations de masse, les violations, les violentes répressions des forces de sécurité, ont été exemplaires.
Même dans ces actes ignobles, tu trouves en toi la force intérieure de reconnaître en tes bourreaux la valeur de l’humanité partagée. Car sans les réduire à leurs actes barbares, tu affirmes qu’ils sont avant tout tes frères et tes sœurs et tu espères qu’ils retrouveront, un jour, en eux, grâce à la raison, ce qui nous lie et nous réunit : l’humanité.
Jeunesse togolaise, dois-tu oublier ces figures africaines devenues célèbres et mondiales par ce qu’elles incarnent : Nelson MANDELA, figure de la résistance et de la liberté, Thomas SANKARA, figure du refus de l’assujettissement et de la révolte contre toute forme d’oppression ?
Jeunesse togolaise, ton histoire elle-même est jonchée de grandes figures et ainsi tu te souviens sans cesse de tes aïeux qui ont lutté pour ton indépendance, l’indépendance de ton Pays, l’indépendance de ta Patrie.
L’évocation de toutes ces figures est pour nous dire que la lutte actuelle s’inscrit dans la logique des hommes et des femmes qui ont compris que ce sont leurs choix et déterminations qui font l’histoire et donnent un sens aux faits et aux combats, car sans nous les faits se suivent sans l’espoir d’un avenir meilleur.
Si notre pays s’est illustré négativement sur le continent, par l’assassinat du président Sylvanus OLYMPIO, il garde encore une chance prodigieuse d’entrer dans l’Histoire de façon positive et de faire entrer tout un continent dans l’histoire par la détermination citoyenne. L’ère de l’Etat de droit démocratique est à nos portes pour que plus rien ne soit comme avant. Et ce sera notre hommage à toutes les victimes de cette dure et longue lutte : Abdoulaye YACOUBOU, Anselme SINANDARE, Sinalengue DOUTI, Mohamed SADJO, Noudjinoudine ALABI, Afissou SIBABI, Bastou OURO-KEFIA, le commissaire Agnon MOUZOU, Louis ANOUMOU… ; elle est encore longue, la liste des martyrs de l’oppression et de la répression.
Concitoyens togolais, dans la vie de tout peuple, il y a des moments décisifs et déterminants. Nos aïeux l’ont prouvé en leur temps, en disant non à l’oppression pour défendre la liberté. Ce moment est encore venu pour nous aujourd’hui de ne plus subir, ni la volonté d’une minorité qui ne veut pas les réformes et l’alternance au Togo, ni les décisions injustes et contraires à nos profondes aspirations, qui proviendraient de la CEDEAO. Dire NON au souhait d’organiser les élections sans les réformes est un devoir citoyen.
Nous disons aux dirigeants de notre espace communautaire CEDEAO que le peuple togolais, comme l’a fait le peuple burkinabais, reste vigilant et qu’il n’acceptera plus de décisions injustes résultant d’une mauvaise appréciation de la crise que nous vivons.
Pour le FCTD, la CEDEAO a lancé un « ballon d’essai » au peuple togolais et il faut que ce peuple y apporte une réponse appropriée ; et cette réponse, c’est la mobilisation intense.
C’est pourquoi le FRONT CITOYEN TOGO DEBOUT lance un appel à toutes les forces vives du Togo pour barrer la route à tous ceux qui œuvrent pour le maintien du régime oppresseur.
Pour faire entendre nos voix et surtout exercer notre droit de veille citoyenne, nous invitons toute la population à se tenir prête et à répondre massivement aux activités de sensibilisation et de mobilisation qui sont programmées comme suit :
– un grand meeting le vendredi 20 juillet 2018 à Akassimé, Haboukopé,
– des émissions d’explication et d’information sur les médias
– des conférences publiques
– un grand rassemblement vers la fin du mois de juillet, avant le sommet des chefs d’Etat et de Gouvernements.
La sensibilisation, la mobilisation et la détermination restent les seules armes du peuple !
« TOGO DEBOUT, LUTTONS SANS DEFAILLANCE » !
Fait à Lomé, le 04 Juillet 2018,
Le Front Citoyen Togo Debout
Je vous remercie !