J’imagine volontiers le tique que chacun d’entre-vous a eu à la lecture du titre de cet article. Comment est-il possible de soutenir que l’argent ne serait pas la principale clé du développement, alors que tout le monde, dans nos pays comme ailleurs, ne cherche que ce sésame pour s’affranchir du besoin, de la domination, des diktats d’autrui et de la contrainte à la soumission ?
Dès l’instant où les individus les plus inspirants actuels que nous avons dans nos sociétés, sont effectivement ceux-là qui, de n’importe quelle manière, ont de l’argent, l’ont accumulé ou l’accumulent, n’en manquent pas pour acquérir tous les biens matériels dont ils pensent avoir besoin pour vivre heureux et ainsi narguer, si nécessaire, leurs semblables en les soumettant à leurs désidératas, il est logique que l’on doute de la pertinence de mon affirmation tendant à remettre en cause la puissance de l’argent dans le processus d’épanouissement des citoyens et de développement d’un pays.
Mais il suffit aussi de noter, une fois pour de bon, que l’argent est une fabrication de l’homme, pour là aussi comprendre, que ce dernier peut décider, de son propre gré, de ne plus en faire un outil indispensable à sa vie, sans que cela ne déséquilibre son processus évolutif.
Tout ceci pour dire simplement que nos dirigeants font une grave erreur en ne cherchant que l’argent pour développer nos pays au point de devenir de véritables mendiants auprès des pseudos puissants du monde, alors que le chemin le plus court, le plus sûr et le plus efficace pour atteindre un tel but est de chercher ou de créer des hommes et femmes de valeurs, des citoyens intelligents et intègres, capables avec peu, de produire beaucoup dans tous les domaines possibles de la vie.
C’est l’être humain en effet qui est la mesure de toute chose, il doit avoir nécessairement préséance sur toutes les autres considérations si effectivement l’on tient à l’évolution effective d’un pays. C’est en vérité une question de bon sens et de raison.Voyez-vous, les animaux n’ont pas de monnaie d’échanges, ils n’utilisent pas l’argent, mais ils ne sont pour autant pas moins heureux. Pourquoi ?
Simplement parce qu’ils travaillent plus sur les principes qui gouvernent le vivre ensemble, promeuvent entre eux, les règles de la vie communautaire, s’entraident et se protègent contre l’ennemi, privilégient la solidarité, le respect de la hiérarchie sociale ainsi que les tâches spécifiques dévolues à chaque individu dans leur société.
L’idéal pour l’espèce humaine est précisément d’appliquer les mêmes principes de vie en visant en premier, le bien-être de son prochain, sa paix intérieure, son bonheur et son épanouissement, avec ou sans argent.
Ce n’est qu’avec un tel état d’esprit que chaque individu peut gagner en confiance et ainsi user aisément de ses facultés, de son intelligence pour se rendre utile, à tous points de vue pour sa société. Lorsque chaque individu est productif, équilibré et heureux de contribuer à créer le bien commun, alors ses idées et ses actions produisent immanquablement de l’argent, tant recherché et tant convoité pour assurer le développement.
Autrement, sans avoir travaillé en amont pour obtenir des citoyens intellectuellement, culturellement, moralement et spirituellement forts, toute perspective de développement est vouée d’emblée à l’échec, même avec les milliards mis à disposition. Car étant entendu qu’en amont, aucun travail efficient n’a été fait pour accroitre la capacité d’absorption judicieuse de l’argent par les citoyens, ceux-ci, lorsqu’ils le trouvent, sont enclins à le dilapider ou à le stocker comme s’il était une fin en soi, alors qu’il n’est qu’un moyen pour réaliser de grandes et nobles choses.En réalité, c’est ce que tous les pays que l’on repère aujourd’hui comme développés, ont eu à faire, travailler prioritairement sur les individus par un système éducatif efficace, la promotion des valeurs endogènes permettant le vivre ensemble et une série de qualités qui permettent d’exhumer en chaque citoyen sa meilleure version.
Un pays comme les Émirats Arabes Unis n’a certainement pas mendié auprès des puissants du monde avant de se construite en moins de cinquante ans à partir d’un désert sévère, tout comme la Chine qui, il y’a trois décennies, comptait parmi les pauvres du monde.
Le fait que jusqu’à présent, après plus de six décennies d’indépendance, nos pays n’ont pas encore fait la voie à leur développement, s’explique essentiellement par l’incohérence des choix politiques qui ne visent pas l’être humain, comme la première richesse à promouvoir.
Comment serait-il possible que nos pays se développent alors que le citoyen qui doit en être le moteur, est perçu très souvent, comme un clochard, un va-nu-pieds ou un simple garçon de courses que les dirigeants briment, étouffent, intimident et apeurent chaque fois que nécessaire ? Investir sur le citoyen en tant que clé du développement dans son sens le plus complet, voilà le seul acte d’intelligence qui est attendu d’un dirigeant réellement visionnaire.
Luc Abaki