« Les pays où la démocratie est absente ont certainement trouvé la formule de la colle la plus efficace, ce qui justifierait la longévité du pouvoir de leurs chefs d’Etats » (Sadek Belhamissi)
La duplicité et le machiavélisme des autocrates africains sont sans limites. La présidentielle américaine a révélé le cynisme et l’hypocrisie du club des dirigeants africains. Comme ses homologues, l’octogénaire dictateur du Cameroun Paul Biya n’a pas attendu l’officialisation de la victoire de Joe Biden pour lui adresser ses chaleureuses félicitations. « M. le Président élu Joe Biden, il me plaît de vous adresser mes vives et chaleureuses félicitations, vœux de succès dans l’exercice de votre haute fonction. Je vous assure de ma disponibilité à contribuer au renforcement des excellentes relations entre nos pays », a écrit le patriarche camerounais.
Coïncidence pour coïncidence, l’élection présidentielle américaine intervient au moment où Paul Biya célèbre avec panache ses 38 de pouvoir au Cameroun. Chaque 6 novembre, -date anniversaire de l’accession au pouvoir de Paul Biya- est commémoré avec faste. Militants et sympathisants du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti présidentiel se donnent rendez-vous dans des manifestations et meetings pour fêter l’événement. Pour l’anniversaire de cette année, il n’y a pas eu de flonflons.
Paul Biya était habitué très jeune aux ors de la République. Chargé de mission à la présidence de la République dans le gouvernement d’Ahmadou Ahidjo dès 1962, Paul Biya deviendra Premier ministre, en 1975, avant la démission du chef de l’Etat, en 1982. Il s’engouffre dans la brèche et devient le second président de la République du Cameroun, le 6 novembre 1982. Depuis, il s’est arc-bouté au pouvoir en faisant et défaisant la constitution et en multipliant les mandats présidentiels.
Aujourd’hui, malgré le long règne (38 ans), le poids de l’âge (87 ans), la santé fragile, la sénilité, le pays profondément divisé et en proie à des crises et violences avec le conflit séparatiste des régions anglophones, le vieil homme ne compte pas lâcher une once de pouvoir et ambitionne de mourir au trône. Il est l’un des chefs d’Etat qui ont le plus duré au pouvoir.
«En Afrique, on ne peut pas désigner quelqu’un du doigt en disant qu’il est un ancien chef», aimait répéter l’ancien président ivoirien Félix Houphouët-Boigny. Pour ainsi dire que l’alternance politique n’est pas la valeur la mieux partagée sur le continent. Paul Biya aussi y va de ses préceptes. « Dure au pouvoir qui peut », avait-t-il déclaré en 2015 lors d’une visite de François Hollande au Cameroun.
Pendant les 38 années de présidence de Paul Biya, de 1982 à 2020, sept (07) présidents américains se sont succédé aux Etats-Unis dont Joe Biden qu’il vient de saluer chaleureusement, alors que lui-même s’accroche au pouvoir comme une chauve-souris. Paul Biya a vu également six (06) présidents en France dont Emmanuel Macron qui est de 43 ans son cadet.
Pendant que Paul Biya se soude au pouvoir, pas moins de 11 chefs d’Etat se sont succédé au Nigeria, Olusegun Obasanjo et Muhammadu Buhari ayant été à deux reprises présidents, 8 au Niger, 5 au Ghana, etc. L’octogénaire dictateur camerounais est le prototype des dirigeants accros au pouvoir. Et c’est lui qui s’extasie sur la démocratie américaine suite à l’élection de Joe Biden.
Médard AMETEPE
Source : Liberté