Pacôme Adjrourouvi aurait-il retrouvé le bon sens ? C’est la question qui nous est venue à l’esprit lorsque nous avons parcouru le message de l’homme lors de la cérémonie d’installation du Haut Conseil pour les Togolais de l’Extérieur (HCTE) organisée par le ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration africaine et des Togolais de l’Extérieur, Robert Dussey. Pour Pacôme Adjrourouvi, la diaspora togolaise a besoin d’être représenté à l’Assemblée nationale. Un réveil tardif pour cet ancien conseiller de Faure Gnassingbé.
En effet, les initiatives dont on ne voit presque jamais les fruits se poursuivent au sein du gouvernement. Tout est fait pour faire croire que le Togo s’est engagé sur la voie du développement. Il faut donc faire appel aux étrangers, mais surtout à la diaspora togolaise qui constitue une manne financière. Mais là n’est pas ce qui nous intéresse dans cette sortie de l’avocat franco-togolais.
Intervenant en tant que 4ème Vice-présent de l’Assemblée nationale, Pacôme Adjrourouvi a salué l’initiative d’installation d’une entité destinée à la diaspora togolaise. Pour lui, il s’agit d’un premier pas du gouvernement pour créer les conditions d’une implication plus inclusive de la diaspora togolaise dans le processus du développement du pays. « Aujourd’hui, a-t-il déclaré, la diaspora est un levier du développement économique des pays africains. Et le Togo ne fait pas exception ».
Très inspiré sur le sujet, l’ancien adjoint au maire d’Evry (France) souligne qu’une implication effective de la diaspora dans le développement économique du Togo passe par sa représentation au sein de l’Assemblée nationale, citant, entre autres, l’exemple du Sénégal. « Si j’ai une chose à dire au ministre Robert Dussey, c’est de faire en sorte que ce travail de qualité que vous venez d’abattre et qui va indiscutablement contribuer au rayonnement du pays, soit une réussite. Mais vous ne pouvez pas finir ce travail, sans aller dans le sens de ceux qui vous ont devancé. Vous devez faire tout pour doter la diaspora d’une représentation nationale. C’est-à-dire que le Togo, tout comme le Sénégal, puisse disposer des députés représentant la diaspora à l’Assemblée nationale », a martelé le député.
Surprise ! Personne ne s’y attendait, du moins ceux qui connaissent cet avocat, son parcours et son rôle au sein de la dictature en place. C’est surprenant parce que Pacôme Adjrourouvi n’est pas un néophyte en ce qui concerne les questions liées à la diaspora. Dans une de ses biographies, il est présenté comme membre fondateur du Collectif des avocats togolais de la diaspora (Catod), organisation dont il a aussi assuré la présidence.
Au Togo, il a été Conseiller du chef de l’Etat. « « En réalité, Me Adjourouvi a longtemps conseillé, sans étiquette officielle, le chef de l’État sur des questions de politique internationale », croit savoir un avocat togolais proche de l’intéressé », écrit Jeune Afrique dans un article publié le 17 mai 2017.
Dans une interview accordée à un média togolais en avril 2018, Pacôme Adjrourouvi a indiqué que les autorités togolaises estiment que cette diaspora qui participe d’une façon assez importante à la vie du pays doit être organisée et suivie. « Ma nomination auprès du Chef de l’Etat n’est pas fortuite, pas du tout. Elle procède de la volonté du Chef de l’Etat de prendre à bras le corps les préoccupations et la problématique entière liées à la diaspora (…) Ma présence aux côtés du Chef de l’Etat, ma nomination est un signal fort à l’endroit de la diaspora dont les problèmes ne sont pas inconnus des autorités togolaises qui s’emploient à leur trouver des réponses immédiates », avait-il dit.
Mais quand il s’est agi des revendications de la diaspora, le conseiller s’est lâché, imputant les problèmes à la classe politique de l’opposition. « Il faut reconnaître qu’il y a de l’intoxication qui vient de part et d’autre, de certains acteurs politiques qui se servent de cette diaspora pour arriver à des fins inavouées. Il y a des responsables politiques, pas tous, mais certains, qui instrumentalisent cette diaspora pour la braquer contre les autorités de ce pays. Les tentatives de déstabilisation orchestrées par cette diaspora-là qui nie les réalités, n’aboutissent pas toujours », a-t-il claironné.
Un déni de la réalité. Et pour cause, depuis des décennies, la diaspora togolaise a exprimé le besoin de participer politiquement à la vie du pays. Elle en a toujours été empêchée et ce ne sont pas les conseils de Me Adjrourouvi qui viendraient contredire les pratiques au sein du régime. Au lieu de reconnaitre les frustrations de la diaspora togolaise et y apporter des solutions, l’avocat, aujourd’hui parmi les députés nommés le 20 décembre 2018, accuse l’opposition. Il ne fait aucun doute que c’est la posture qu’il a adoptée au cours de son poste de Conseiller.
Aujourd’hui, il pense que la diaspora a besoin d’être représentée au sein du Parlement. Il feint d’oublier que lorsqu’il était conseiller de Faure Gnassingbé, l’une des revendications des manifestations populaires était le vote de la diaspora. Malheureusement, il y a vu une manipulation de l’opposition.
G.A.
source : Liberté