Le Togo, dirigé par la même famille depuis 1967, a institutionnalisé une tradition de répression de l’espace civique : arrestations et emprisonnements arbitraires de défenseurs des droits humains, d’activistes pro-démocratie, de journalistes et d’opposants politiques, entachés de décès en détention ou au sortir de détention, interdictions de manifestations comme de réunions privées, dégradation de la liberté d’expression et de la presse avec des suspensions abusives de journaux… Une tradition qui, après une légère décrispation au début des années 2010 avec la dépénalisation des délits de presse, est redevenue la norme à partir d’août 2017 avec la mobilisation populaire pour le retour à la Constitution originelle de 1992 (dont l’article 59 limitait à deux le nombre de mandats présidentiels) et le droit de vote de la diaspora.
On compte ainsi entre août 2017 et octobre 2022 au moins 546 personnes arrêtées pour leurs opinions dont nombre d’entre elles seront torturées en détention. 11 personnes décéderont des suites de ces pratiques. On dénombre également 18 assassinats par les forces de défenses et de sécurité, 10 journaux suspendus ou simplement interdits de parution pour avoir critiqué le pouvoir et 29 manifestations, dont 10 dans des lieux privés, seront interdites par les autorités.
Le présent rapport commence par faire une analyse des textes juridiques de l’État du Togo en matière des droits humains, mettant en lumière les dispositions liberticides actuellement en vigueur au Togo. Il compile ensuite les différents cas d’arrestations, d’interdictions de manifestation et de réunion et les coupures d’internet afin de démontrer leur récurrence et la dynamique de rétrécissement de l’espace civique à l’œuvre depuis 2017 au Togo. Le rapport se termine par une emphase sur les piètres conditions carcérales, la culture de la torture, et enfin l’impunité dont bénéficient les forces de l’ordre même lorsqu’elles commettent des homicides.
Quelques chiffres clés du rapport :
Depuis le 19 aout 2017 : au moins 546 arrestations
Le Togo, dirigé par la même famille depuis 1967, a institutionnalisé une tradition de répression de l’espace civique, qui est redevenue la norme à partir d’août 2017 avec la mobilisation populaire pour le retour à la Constitution originelle de 1992. On compte ainsi entre août 2017 et octobre 2022 au moins 546 personnes arrêtées pour leurs opinions dont nombre d’entre elles seront torturées en détention. 11 personnes décéderont des suites de ces pratiques. On dénombre également 18 assassinats par les forces de défenses et de sécurité.
Libertés de presse et d’opinion sous cloche
-Au moins 9 journaux suspendus et 1 journal interdit
Alors que la Constitution garantit la liberté d’expression, y compris celle de la presse, les pouvoirs publics ont limité l’exercice de ce droit. La loi impose des sanctions à l’encontre de journalistes qui se seraient rendus coupables de « graves erreurs ». Ainsi, depuis août 2017, neuf journaux ont été suspendus et un a été purement et simplement interdit.
Le Togo est classé 100ème sur 180 par le classement mondial de la liberté de la presse de Reporters Sans Frontières. Il a perdu 26 places depuis 2021 où il était classé 74ème.
Violation des libertés de réunion et de manifestation
– Au moins 19 manifestations interdites
Les restrictions apportées dans la loi du 16 mai 2011 fixant les conditions d’exercice de la liberté de réunion et de manifestation n’ont pas empêché les grandes manifestations de 2012 et 2017. Comme l’a annoncé Gilbert BAWARA, porte-parole du gouvernement togolais. Pour « qu’il n’y ait plus jamais de 19 août 2017 »l’Assemblée nationale a adopté à la hâte, le 12 août 2019, une nouvelle loi modifiant la loi de 2011 et durcissant les conditions d’exercice de ces libertés.
Depuis l’interdiction de la manifestation du 19 aout 2017 dans certaines villes, au moins 19 manifestations sur la voie publique et 10 réunions devant se tenir dans des lieux privés ont été interdites au Togo.
-Au moins 10 réunions dans les lieux privés interdites
Alors que les manifestations du parti au pouvoir et de ses ailes marchantes ne souffrent d’aucune entrave, y compris pendant les périodes dites d’urgence sanitaire et d’urgence sécuritaire, les manifestations et réunions organisées par les partis d’opposition ou des organisation de la société civile sont interdites.
Les coupures d’internet pour empêcher la société civile de s’organiser
-Au moins 3 coupures et perturbations d’internet et réseaux sociaux
Le Togo a coupé le réseau internet à deux reprises en 2017 : du 5 au 10 septembre et du 19 au 21 septembre. Puis, le 22 février 2020, jour de l’élection présidentielle, les autorités ont coupé les services messagerie instantanée.
Il s’agit d’un moyen efficace pour empêcher les citoyens de communiquer entre eux et de s’organiser. Ces coupures empêchent également la société civile de documenter et dénoncer les violations des droits humains et la répression par les forces de sécurité.
En plus de couper internet, le gouvernement coupe l’accès à certains sites de la société civile ou de partis d’opposition. Ainsi, les sites de Tournons La Page, Dynamique Monseigneur Kpodzro. Togo Debout et de la Campagne de TLP sur la limitation des mandats sont bloqués sur les réseaux mobiles du Togo