La diaspora togolaise au Nigeria a organisé hier jeudi 25 juillet 2019, à Lagos au Nigéria, une marche pacifique de protestation contre le 4ème mandat de Faure Gnassingbé. La manifestation a vu la participation de milliers de Togolais engagés dans la lutte pour la démocratie au Togo. Les manifestants ont salué la mémoire des compatriotes tombés au cours de cette lutte et exprimé leur soutien aux blessés et aux détenus. Dans la déclaration ci-dessous, lue au point de chute de la manifestation, la diaspora togolaise au Nigeria exige le cantonnement de l’armée dans les casernes, la libération des détenus des manifestations pacifiques et de tous les détenus politiques, la liberté de mouvement et la sécurité du leader du Parti National Panafricain (PNP), Tikpi Salifou Atchadam, la mise en place d’une transition chargée des réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales et l’organisation des élections présidentielle, législatives et locales.
Déclaration
Avant tout propos, permettez-moi de rendre un hommage mérité à la diaspora togolaise au Nigéria qui n’a jamais faibli depuis le 19 août 2017. Aujourd’hui encore vous avez confirmé ce qui est devenu pour vous une tradition.
La diaspora togolaise au Nigéria, par ma voix, manque de mots pour reconnaître l’engagement, la bravoure et la détermination de tous les Togolais de la diaspora partout dans le monde.
La grande manifestation de ce jour est l’occasion pour la diaspora togolaise au Nigéria de saluer la mémoire de nos compatriotes tombés au cours de cette lutte pour la première alternance dans notre pays. Elle ne manque pas d’exprimer son soutien sans faille aux blessés, aux détenus des manifestations pacifiques, ainsi qu’à tous les détenus politiques.
Notre profonde gratitude à l’endroit des autorités de la République Fédérale du Nigéria, particulièrement à son Excellence Monsieur le Président Muhammadu Buhari, pour l’hospitalité légendaire dont nous jouissons ici, et pour les efforts qu’il n’a cessé de déployer pour l’avènement de la démocratie dans notre pays le Togo. Merci aux citoyens Nigérians pour l’hospitalité et le respect réciproque.
Aux forces de sécurité ici présentes pour assurer la sécurité des manifestants, nous disons Merci. Chez nous au Togo, pour une telle manifestation, il faut s’attendre à des arrestations arbitraires, des blessés, des morts. Vive la démocratie au Nigéria et partout en Afrique.
D’après une sagesse africaine : « à celui qui vous aide à couvrir votre chambre, on ne cache pas les cordes ».
En effet, des mouvements de 1990 à la Conférence nationale souveraine de 1991, notre pays est entré dans une phase qui va accoucher de la Constitution du 14 octobre 1992.
Cette Constitution obtenue de haute lutte, avec beaucoup de sacrifices en vies humaines et en dégâts matériels inestimables, a été victime de toilettages successifs de la part du régime en place.
Depuis 1992 s’est ouvert dans notre pays un cycle infernal : élections truquées – violations massives des droits humains – dialogues – élections truquées. Pour tout témoignage, de nombreux rapports sont disponibles.
Au bout de trente-huit (38) ans de pouvoir, Gnassingbé Eyadéma meurt en 2005. Il fut remplacé, d’autorité, par son fils Faure Gnassigbé. Après de graves et massives violations des droits humains, un accord est signé entre le pouvoir et l’opposition en 2006.
L’Accord politique global (APG) prévoit des réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales en vue de la normalisation de la vie politique dans notre pays. Cet accord ne sera pas respecté par le régime en place.
De 2006 à 2017, aucune réforme ne sera faite. Vingt-sept (27) dialogues n’ont pas permis au peuple togolais de sortir de la crise socio-politique. La mauvaise foi du pouvoir n’est plus à démontrer. A chaque fois, il signe des accords qu’il refuse de respecter ensuite.
Depuis le 19 août 2017, le peuple debout exige le retour à la Constitution de 1992 et l’effectivité du droit de vote de la diaspora. Acculé, le pouvoir sollicite un dialogue avec l’opposition. Un dialogue est ouvert à Lomé sous l’égide de la CEDEAO, avec à sa tête le Président Muhammadu Buhari.
A l’issue de ce vingt-huitième (28ème) dialogue, la CEDEAO impose une feuille de route aux deux parties, pouvoir et opposition. Le pouvoir écarte la feuille de route et rejette la Constitution élaborée par l’expert constitutionnaliste recruté par la CEDEAO. Rappelons que cet expert était chargé de produire une constitution harmonisée avec toutes les Constitutions en vigueur dans les Etats de l’espace CEDEAO.
Après avoir écarté la feuille de route de la CEDEAO, le pouvoir organise des élections législatives avec un taux d’abstention s’élevant jusqu’à quatre-vingt-quinze pour cent (95%). Quant aux élections locales, le taux d’abstention est de quatre-vingt-huit pour cent (88%).
Il en résulte qu’au Togo, cinq pour cent (5%) de la population a élu des députés à l’Assemblée nationale, et douze pour cent (12%) de la population a élu des conseillers communaux.
Le Togo reste le seul pays en Afrique de l’Ouest à n’avoir pas connu d’alternance. De 1967 à 2020, soit cinquante-trois (53) ans, une seule et même famille est au pouvoir au Togo. Et à chaque fois que le peuple togolais se soulève pour exiger, de façon pacifique, l’alternance, il est toujours victime d’une violence extrême de la part des forces de défense et des forces de sécurité.
En ce moment même, les villes de Mango, Bafilo, Sokodé et certains quartiers ciblés de la capitale, Lomé, sont toujours victimes de siège militaire. Quarante (40) détenus des manifestations pacifiques croupissent toujours en prison.
Malgré tout, le peuple togolais, assoiffé d’alternance, de démocratie et de prospérité pour tous, ne désarme point. Le peuple togolais toujours debout sur le territoire national et dans la diaspora crie : Liberté ! Justice ! Alternance ! Il est prêt à se battre jusqu’au bout pour ces valeurs universelles.
A l’approche de 2020, la tension est perceptible partout. Faure Gnassingbé exprime son intention de se représenter pour un quatrième mandat à la tête du Togo. Aujourd’hui, aucun Chef d’Etat de la sous-région ne peut se le permettre. Le peuple togolais est prêt à lui barrer la route vers ce quatrième (4ème) mandat.
La situation actuelle au Togo constitue un risque réel pour toute la sous-région. C’est pourquoi, de cette modeste tribune, devant vous tous ici présents, nous voulons lancer un appel solennel à tous les Chefs d’Etat de la CEDEAO, de déconseiller Faure Gnassingbé par rapport à son quatrième (4ème) mandat. Il doit y renoncer.
En tout cas, le peuple togolais, soudé comme un seul homme, ne se laissera pas faire. La famille Gnassingbé veut nous imposer une monarchie ; nous n’en voulons pas. Nous nous tenons prêts à nous battre jusqu’au bout. Le semblant de calme que l’on observe en ce moment au Togo est un calme précaire et surtout trompeur. A tout moment, tout peut basculer.
C’est l’occasion pour nous d’exprimer nos vives félicitations au Président de la République du Niger, Son Excellence Monsieur le Président Mahamadou Issoufou pour son élection à la tête de la CEDEAO.
Le peuple togolais sait qu’il peut compter sur son engagement ferme pour une Afrique démocratique et prospère. Sous son mandat, il ne doit être question dans un Etat de la CEDEAO, quel qu’il soit, de quatrième (4ème) mandat.
Ce quatrième mandat de Faure serait une honte non seulement pour l’Afrique de l’Ouest, mais aussi pour toute l’Afrique entière. Si Faure Gnassingbé est Président du Togo, il n’est pas moins un chef d’Etat ouest-africain, un chef d’Etat africain. Donc, c’est aussi au nom de la dignité et de la fierté des peuples ouest-africains et des peuples africains que nous nous préparons à tout faire pour barrer la route à Faure Gnassingbé au Togo.
Nous avons beaucoup appris dans ce pays frère qu’est le Nigéria. Ce pays nous a enseigné beaucoup de choses, notamment l’alternance politique au sommet de l’Etat. Nous voyons que le Président actuel du Nigéria n’est pas le fils d’un ancien Président. Nous constatons que le Président actuel du Nigéria n’est pas un fils du Président Yakubu Gowon, Président au Nigéria en 1967. Nous savons aussi qu’Aso Rock n’est pas une résidence familiale.
L’amour pour son pays commande que l’on ramène chez soi ce qu’il a vu et vécu de meilleur ailleurs. Nous avons vu l’alternance ici au Nigéria. Nous avons le devoir de la transporter chez nous au Togo.
La diaspora togolaise au Nigéria a entendu l’appel de la mère patrie. En réponse, les milliers de Togolais que nous sommes au Nigéria se tiennent déjà prêts pour répondre sur le territoire national aux côtés de nos compatriotes restés au pays pour des manifestations pacifiques, destinées à libérer définitivement notre pays de la dictature qui continue de vider notre pays de ses femmes, de ses hommes et de ses ressources diverses.
La diaspora togolaise partout en Afrique de l’Ouest doit se préparer pour ce retour des patriotes pacifistes. Le nombre est notre force. En ce jour du 25 juillet 2019, la diaspora togolaise au Nigéria a donné sa parole au peuple togolais et à la mère patrie en danger de monarchisation.
Nous avons l’impérieux devoir de sortir notre pays le Togo du cycle infernal élections truquées – violences – dialogue – élections truquées. 2020 est le terminus de cette dictature. Au passage à niveau, le peuple d’abord.
Nous sommes persuadés que toute la diaspora togolaise de par le monde sera d’accord avec nos exigences destinées à résoudre de façon définitive et durable la crise qui secoue notre pays depuis le 13 janvier 1963.
La diaspora togolaise au Nigéria exige : le cantonnement de l’armée dans les casernes; la libération des détenus des manifestations pacifiques et de tous les détenus politiques ; la liberté de mouvement et la sécurité du leader du Parti National Panafricain (PNP), Tikpi Salifu Atchadam ; la mise en place d’une transition chargée des réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales ; l’organisation des élections présidentielle, législatives et locales.
Non au 4ème mandat de Faure ! Non au 4ème mandat de Faure ! Non au 4ème mandat de Faure.
Lagos, le 25 juillet 2019
La diaspora togolaise au Nigéria