Ne doivent-elles pas se dérouler en octobre 2012 si les règles et le calendrier sont respectés ? Bien sûr qu’on est habitué depuis des décennies au fait que rien de tout cela n’est jamais scrupuleusement respecté, la règle de toutes les règles au Togo étant l’arbitraire, c’est-à-dire ce qui arrange le régime et donc ce qu’il décide. Mais, au moins si les échéances sont respectées ( nous pouvons nous permettre le luxe de le supposer ), cela signifierait que l’on en parle certainement dans les États-majors des partis. Peut-être n’en parle-t-on pas encore, estimant, à tort à mon humble avis, qu’on en est loin, que le mois d’octobre est loin. Ou si on en parle c’est peut-être sans oser encore élever la voix. En chuchotant.
En attendant…En attendant quoi ? Que le pouvoir en place se manifeste d’abord à ce sujet ? Qu’il fixe les dates, non pas forcément définitives, mais peut-être au moins comme un ballon d’essai aux fins de voir comment réagiraient les partis : s’ils se préparent et pourraient éventuellement….Mais encore là, éventuellement quoi ?
Jouer le jeu quelles qu’en soient les règles que le pouvoir seul aura fixées comme à l’accoutumée ? Qui prônerait un boycott propre à arranger le pouvoir ? Qui manifesterait de l’enthousiasme étant assez naïf pour croire au Père Noël ( bien que nous soyons déjà loin du mois de décembre ) ? Qui se rapprocherait éventuellement du RPT ou de l’UFC-AGO, n’ayant, en la circonstance, aucune autre solution que de chercher à profiter d’un tel ralliement ?
Disons aussi que c’est un peu de la diversion, pour l’heure, de réunir des gens, au sein du CPCD par exemple, pour disserter sur le type de régime qu’il faut au Togo, les élections municipales et sénatoriales etc. dont rien n’est précis, rien n’est sûr, alors que concrètement, le plus important devrait se passer dans neuf mois. Ces sujets-là, je veux dire sénatoriales, municipales, type de régime… devraient peut-être nous occuper afin d’éviter de parler de contestations des élections précédentes, en particulier de la présidentielle de mars 2010, contestations désormais considérées comme définitivement enterrées(selon le bon sens reconnu aux Togolais en matière politique sur lequel le régime peut compter puisqu’il en profite toujours pour se maintenir), de découpage électoral, de vote des Togolais de l’étranger, de dispositif à mettre en place pour limiter les fraudes( puisqu’on ne peut les éviter ), de transparence des élections etc.
En réalité, le principe même des élections est devenu au Togo un sac en peau de hérisson, selon le proverbe : xlɔmadɔkotoku sɔsɔa dɔe, ma-sɔ-ma-sɔa dɔe ( le prendre est pénible ; ne pas le prendre est pénible). Mais pourquoi fabriquer, posséder un sac en peau de hérisson si on doit craindre de s’en servir parce que ses piquants nous blessent au flanc, au dos, à la cuisse… ? Il est vrai que nous avons presque toujours été, d’une manière ou d’une autre blessés, meurtris.
Que les piquants frottant contre notre peau nous provoquent au moins des démangeaisons. Des irritations d’esprit. Et le système sait bien comment s’y prendre pour mettre l’opposition dans cet embarras : quand lancer l’annonce des élections faisant l’effet d’une bombe pour que cette opposition éclate en morceaux. Qu’ayant partout des démangeaisons, nous nous agitions, nous nous grattions frileusement.
Cette conséquence inéluctable est la division de l’opposition ou la réapparition des démangeaisons, des divisions, même si l’on tente par la suite de recoller les morceaux, fait bien, naturellement, l’affaire du pouvoir. Car les partis qui vont y aller savent qu’ils ont très peu de chances de changer quoi que ce soit à la situation au Togo et ceux qui ne voudront pas y aller aussi savent que le boycott n’est pas une solution.
En effet, lorsque l’on a affaire à un pouvoir, ou plutôt à une machine qui ne sait que gagner, gagner par tous les moyens, que peut-on faire ? Le laisser gagner en ayant au moins la conscience de n’avoir pas contribué a faire triompher la fraude et les violences qui l’accompagnent ( cas des partisans du boycott ) ou vouloir à tout prix y croire, en étant conscient que l’on a plus de chances d’être dupe qu’autre chose. Enfin, on peut se dire aussi que, si on arrive à gagner quelques sièges, on ferait peut-être avancer certaines causes.
Cette thèse a certainement été celle de certains chefs de partis de l’opposition, sincères, qui ont même frôlé la majorité des sièges sans jamais l’atteindre. Enfin, aujourd’hui, les responsables de ces partis savent pourquoi ils ne l’ont pas atteinte. Inutile de rappeler que ce n’est pas parce qu’ils n’auraient pas suffisamment bénéficié du suffrage des citoyens. L’autre problème est aussi de penser que même ayant frôlé la majorité, si ces partis sont, par accident, capables de contrecarrer le plan, la volonté du pouvoir, celui-ci a les moyens de réduire le nombre de leurs sièges qui représente un obstacle à sa volonté de s’approprier la totalité des pouvoirs, un véritable danger pour lui.
Ne parlons pas de la capacité du pouvoir à manœuvrer en sorte que le parti majoritaire à l’Assemblée Nationale, s’il n’est pas celui du système, ne soit pas celui du gouvernement, c’est-à-dire celui dans lequel est désigné le Premier Ministre. Cela rappellerait un certain match Agboyibo vs Edem Kodjo à l’issue duquel l’arbitre suprême a tranché en faveur de ce dernier. C’est-à-dire en fin de compte selon ce qui l’arrange, lui l’arbitre, bien entendu. Qu’y pouvions-nous ? À cette occasion comme á d’autres, colère, contestations, manifestations de la population n’ont jamais réussi à fléchir le système, à changer quoi que ce soit.
En sorte que nos responsables de partis doivent se tourmenter, le cœur battant lorsqu’ils entendent parler d’élection législatives ou d’élections tout court. Je comprends qu’il n’est pas facile d’être à leur place. Mais, n’ont-ils pas un peu contribué eux-mêmes à créer cette situation qui aujourd’hui retombe comme une massue et les assomme, les écrase sans qu’ils trouvent jamais le moyen d’y échapper ?
Je ne fais que sortir les tam-tam sur la place publique. Que ceux qui savent les jouer et veulent les jouer viennent. Que ceux qui veulent venir chanter viennent. Que ceux qui veulent venir danser viennent. Mais que ceux qui veulent aussi rester simples spectateurs soient simples spectateurs. Mais, les tam-tam étant présents, je ne crois pas que qui que ce soit puisse y être indifférent.
L’expérience nous a appris deux choses :
Premièrement, tout se joue comme dans un conte de Yévi Golotoé à l’ego légendaire dont la tricherie est le principe même de vie, qui serait malade de devoir partager quoi que ce soit avec les autres.
Pour attirer l’attention sur soi lors d’une réception où il s’est pourtant fait accompagner, il dispose du plus gros, du plus puissant, du plus retentissant tam-tam, concédant aux autres de tout petits juste pour mettre en valeur le sien propre, pouvant jouer les sons les plus écrasants qui étouffent tous ceux des autres.
Deuxièmement, lorsque nous jouons, nous jouons de manière cacophonique, souvent les uns contre les autres. Ou bien nous jouons dans une fausse harmonie.
De ces deux comportements, il découle que non seulement aucun de nos tam-tam ne peut rivaliser, seul, avec celui de Yévi, mais aussi qu’aucun de nous ne peut jamais tout seul se faire entendre face au grondement du tam-tam de Yévi. Est-il besoin de rappeler que presque toujours, c’est Yévi qui nous a fait chanter( dans plus d’un sens du terme), nous a fait danser aux différents rythmes de son tam-tam, nous menant parfois, comme des « singes savants » de foire en foire ? Et nous dansons, chantons, grimaçons pour le plus grand bien de Yévi triomphant.
Un conseil ou une suggestion : que ceux qui jouent leur tam-tam déjà, mais dans leur chambre respective les sortent eux aussi sur la place publique.
Une question : est-il possible d’arracher à Yévi, le gros tam-tam usurpé, de le restituer au peuple, de le jouer pour le peuple, selon les rythmes voulus par le peuple afin que le peuple chante ses propres chansons et danse selon ses propres désirs ?
Sénouvo Agbota ZINSOU
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