Recherché par Interpol depuis le mois de mars, le grand argentier du régime de Kadhafi bénéficiait d’un passeport diplomatique nigérien de complaisance – établi à la demande des autorités françaises – qui lui garantissait l’immunité.
Recherché par Interpol, Bachir Saleh, l’homme qui sait tout des affaires franco-libyennes, a vécu tranquillement à Paris jusqu’à début mai. Chronique d’une fuite annoncée.
Il est reparti aussi mystérieusement qu’il était arrivé. Après avoir séjourné ces derniers mois en France grâce à un titre de séjour délivré par le ministère de l’Intérieur, Bachir Saleh ex-directeur de cabinet du défunt colonel Kadhafi et grand argentier du régime, a pu quitter Paris au début de mai. Sans être inquiété, et en emportant avec lui tous les secrets du rapprochement franco-libyen opéré sous l’ère Sarkozy. Pourtant, Bachir Saleh Bachir de son nom complet, 65 ans, faisait l’objet, depuis mars, d’une notice rouge diffusée sur Internet par Interpol en vue de son extradition vers Tripoli, qui le réclame pour « fraude ». L’homme, qui gérait naguère le Libyan African Portfolio (LAP, fonds d’investissement pour l’Afrique), doté de 40 milliards de dollars, est également visé par des sanctions économiques aux Etats-Unis.
Soupçons de financement de la campagne 2007 de Sarkozy
Le grand public a découvert son nom entre les deux tours de l’élection présidentielle. Le 28 avril, le site Mediapart publie un « document officiel libyen » qui démontrerait qu’en décembre 2006 le régime de Kadhafi avait décidé de financer la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy, à hauteur de 50 millions d’euros. Cette note, adressée à Bachir Saleh, confirmerait « l’accord de principe » [de financement] sur la foi d’une réunion du 6 octobre 2006, à laquelle auraient participé, outre Saleh, Brice Hortefeux, alors ministre des Collectivités territoriales et proche de Nicolas Sarkozy, ainsi que Ziad Takieddine, intermédiaire du rapprochement entre les deux pays. Les personnes citées démentent aussitôt avoir assisté à cette réunion ou avoir eu connaissance de l’existence d’un tel document. Le 30 avril, Nicolas Sarkozy porte plainte pour « diffusion de fausse nouvelle ». Le lendemain, nouveau coup de théâtre: Al-Baghdadi al-Mahmoudi, ex-Premier ministre de Kadhafi, détenu en Tunisie, confirme la thèse du financement politique…
Dans le même temps, les plus hautes autorités françaises multiplient les déclarations, parfois contradictoires, sur les conditions de séjour de Saleh sur le territoire: « accueilli en France en accord avec Tripoli » ou bénéficiant d’une « autorisation de séjour provisoire au titre de la vie privée et familiale ». François Fillon déclare qu’il n’y a « aucune trace de mandat d’arrêt international à son encontre » et qu’il bénéficie d’un « passeport diplomatique nigérien », synonyme d’immunité.
AFP / lexpress.fr
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