Problématique du retour des députés ANC à l’Assemblée nationale
Faure Gnassingbé confronté aux menaces de Gilchrist Olympio de retirer ses ministres du gouvernement
Le mercredi 28 mai 2010 se célébrait un mariage historique au Togo. Ce jour-là, le plus éclairé de la « Grande royale » et l’« Opposant ménopausé » se dirent oui et s’engagèrent pour la vie. Résister aux épreuves pour sauver le foyer, ne pas succomber à la tentation, voilà des conseils types souvent donnés aux nouveaux époux ; et les « mariés » du 28 mai 2010 ont tant bien que mal su supporter les épreuves. Mais depuis le vendredi 7 octobre dernier, jour où la Cour de Justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) rendit son verdict dans l’affaire d’exclusion de l’Assemblée nationale des neuf (09) des députés se réclamant de l’Alliance nationale pour le changement (Anc), la survie de ce mariage est plus que problématique. Mieux, le divorce est dans l’air.
Aboudou Assouma qui accorde une interview pour rechanter le morceau de l’« insusceptibilité » de recours des décisions de la Cour constitutionnelle, le site officiel republicoftogo qui enclenche la campagne d’intoxication, le gouvernement qui sort un communiqué tenant lieu de mise au point sur le verdict rendu, les émissions débats habituelles sur les chaînes télés du clan consacrées au sujet, les « grandes gueules » du régime y envoyés pour interpréter la décision et nier l’évidence…c’est le décor après le verdict officiel rendu ce vendredi 7 octobre par la Cour de Justice sous régionale, signe de la panique générale qui s’est emparée du pouvoir. Qu’est-ce qui peut bien expliquer une telle agitation ? Comment une simple décision de justice peut-elle susciter autant de gesticulations ? Ce sont là les questions qui triturent les méninges. La cause, c’est simplement la peur des dégâts collatéraux que l’application à la lettre de ce verdict allait engendrer. Ce que les yeux du commun des Togolais ne voient pas forcément.
En effet la Cour de Justice de la Cédéao condamnait l’Etat togolais à « réparer la violation des droits de l’Homme des requérants » et à « payer à chacun, le montant de trois millions de francs CFA ». L’argent n’est absolument pas un problème pour le régime Faure Gnassingbé. S’il ne s’agissait que d’espèces sonnantes et trébuchantes pour régler ce problème, c’aurait été vite fait, même si l’Etat togolais était sommé de payer plusieurs dizaines de milliards de FCFA à chacun des neuf députés. Il suffirait juste de puiser un peu dans la fortune laissée par le « Vieux » et qui est à la source des querelles au sein de la fratrie. Le problème, c’est la réparation du préjudice. Même si le pouvoir Faure Gnassingbé entretient la polémique, il sait très bien que la réparation requise, ce n’est rien d’autre que la réintégration des députés injustement exclus à l’Assemblée nationale. Le reste n’est que diversion pour faire perdre du temps. Mais Faure Gnassingbé finira par se plier à la décision ; au cas contraire il va s’attirer les foudres de la Communauté sous régionale.
Comment réintégrer ces neuf députés Anc fraîchement revenus du purgatoire sans créer de frustrations dans les rangs de l’Union des forces de changement (Ufc) ? C’est l’énigme du sphinx que devra résoudre le « Leader nouveau ». Ananigolou Komla, Adjima Kossi Mensa, Koevikoko Folly, Olympio Adébléwo Kossi, Tokoro Adignon, Kpeky Touhtou, Aziakou Kodjo, Koudodji Koffi Dankua et Dokouvi Messah Nathey, ce sont là les noms des suppléants sur les listes Ufc aux législatives du 14 octobre 2007, des proches pour la plupart de Gilchrist Olympio, venus remplacer les neuf (09) exclus de l’Anc le 22 novembre 2010. Les obligés de l’« Opposant antique » étaient pompeusement accueillis à l’Assemblée nationale le mardi 6 décembre 2010, juste deux semaines après l’exclusion scélérate de leurs collègues. Réintégrer à l’Assemblée nationale Ahli Komla Bruce, Isabelle Ameganvi, Patrick Lawson, Jean-pierre Fabre, Kodjo Atakpamey, Tchagnaou Ouro-Akpo, Akakpo Attikpa, Kwami Manti et Yao Victor Ketoglo à qui la Cour de Justice de la Cédéao vient de donner raison, induit nécessairement qu’il faut faire libérer le plancher à leurs remplaçants de fortune, qui se trouvent être des protégés de Gilchrist Olympio. Et c’est ici que l’équation est compliquée pour Faure Gnassingbé ; car on ne saurait toucher aux obligés de l’« Opposant périmé » sans susciter son courroux.
Et justement il nous revient que, flairant le risque, Gilchrist Olympio menacerait de retirer ses sept (07) sous-fifres du gouvernement. Il y a de quoi faire couler de la bile chez le « Maréchal », vu que déjà toutes les promesses faites par l’« Esprit nouveau » dans l’accord « historique » du 28 mai 2010 n’ont pas été respectées. C’est à peine deux des protégés de Gilchrist Olympio qui ont été nommés préfets. Quant aux postes d’ambassadeurs, maires, directeurs de sociétés, aucun n’a été pour l’instant offert à l’Ufc, et toutes les propositions faites par le « Vieux » seraient rejetées. Mais il se pose la question de la faisabilité d’un tel rêve – c’en est vraiment un –, quand on sait que ses envoyés au gouvernement ont déjà pris goût aux délices et ont poussé la bédaine. Pour le diplômé de la Fondation Konrad Adenauer par exemple qui trimait dans un de ces établissements privés du côté d’Agoè pour tromper la faim, on parie qu’il faudrait une grue allemande pour le déloger. En tout cas on attend de voir l’issue de cette affaire.
Tino Kossi
source : groupe liberté hebdo togo