« Même les paranoïaques ont des ennemis. C’est vrai, mais les paranoïaques schizophrènes en ont deux fois plus » (Hervé Le Tellier)
Le règne au long cours des Gnassingbé est jalonné par des complots plus ou moins imaginaires. Le père a toujours été obnubilé par des coups d’Etat. Le fils est sur ses traces et souffre d’une crise de complotite aiguë. Faure Gnassingbé semble davantage accaparé par les intrigues qui viseraient sa personne que par une gestion efficace du pays.
L’arrestation de Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson, coordonnatrice de la Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK) et de M. Gérard Djossou, responsable de la DMK, accusés d’« atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat » est la preuve irréfutable que le régime de Faure Gnassingbé glisse inexorablement. Ces interpellations au sein de l’opposition interviennent à la suite d’une manifestation programmée par les responsables de la DMK pour, entre autres, exiger le rétablissement de la vérité des urnes pour le scrutin présidentiel du 22 février 2020, l’arrêt des poursuites judiciaires contre le véritable vainqueur de l’élection présidentielle Agbéyomé Kodjo, l’acharnement judiciaire contre les journalistes et la publication du rapport d’audit commandité par le pouvoir dans l’affaire de Pétrolegate, etc.
A en croire le procureur de la République, Blaise Essolisam Poyodi, l’enquête aurait révélé que Mme Adjamagbo-Johnson « était en possession de documents en lien avec le plan de déstabilisation du pays. » Assez extraordinaire ! Bienvenue dans la Corée du Nord de l’Afrique ! Depuis 7 mois, un officier supérieur des Forces Armées Togolaises, le lieutenant-colonel Bitala Madjoulba, commandant du 1er Bataillon d’intervention Rapide (BIR), a été abattu dans son bureau une balle dans le cou, mais l’enquête diligentée ressemble à la marche de l’écrevisse : un pas en avant, au moins deux pas en arrière. Même pour des séries de braquages perpétrés à Lomé, les enquêtes ouvertes n’ont jamais été fermées.
Mais quand il est question d’interpeller les responsables et militants de l’opposition, le Procureur de la République et les super flics de Faure Gnassingbé sont plus efficaces que les agents de KGB et de la CIA réunis.
Cette sombre affaire d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat rappelle celle des incendies criminels des marchés de Kara et de Lomé. Le régime avait profité d’une série de manifestations de rues les « Derniers tours de Jéricho » programmées par l’opposition et des organisations de défense des droits de l’homme regroupées au sein du Collectif « Sauvons le Togo », pour mettre le feu aux deux grands marchés du Togo pour ensuite faire porter la responsabilité aux responsables l’opposition dans le dessein perfide de les neutraliser.
La fameuse affaire dite « Tiger Révolution » pour laquelle des dizaines de militants du Parti National Panafricain (PNP) ont été arrêtés et embastillés, accusés de vouloir déstabiliser les institutions de la République avec des amulettes et des machettes rouillées témoigne de la fébrilité et de la paranoïa du pouvoir de Faure Gnassingbé qui voit des coups d’Etat partout.
Aujourd’hui, on parle de coup d’Etat par des « documents ». Hier, c’était un coup d’Etat par « clé USB » impliquant le demi-frère du chef de l’Etat, Kpatcha Gnassingbé et ses coaccusés condamnés à 20 ans de réclusion criminelle à la suite d’un procès expéditif. Hier encore c’est l’ancien bras droit et faiseur de roi de Faure Gnassingbé, Pascal Akoussoulèlou Bodjona qui était tombé en disgrâce pour des ambitions présidentielles supposées et ses relations ambiguës avec certains ténors de l’opposition.
« Celui qui se sent surveillé devient cent fois plus paranoïaque et dangereux que celui qui l’est réellement », disait Jean Dion. Le régime de Faure Gnassingbé est pris dans un tel tourbillon de schizophrénie qu’il a dû même avoir recours à un logiciel espion israélien très sophistiqué « Pegasus » pour épier les opposants et les religieux catholiques.
Médard AMETEPE
Source : Liberté