Il est l’un des rescapés de cet odieux attentat qui a visé un convoi de l’UFC à Soudou le 5 mai 1992. 28 après, il se remémore cette journée noire et porte toujours les séquelles. Lui c’est Elliott OHIN, Vice-président de l’UFC. Il a accepté volontiers nous accorder une interview pour revenir ce cet évènement qui le hante toujours.
J.D : 5 mai 1992- 5 mai 2020 : 28 ans déjà que le Togo a connu l’un des évènements horribles de son histoire politique. Il s’agit de l’attentat de Soudou. Cet odieux attentat a coûté la vie à plusieurs de vos camarades de lutte à l’époque dont Marc Messan Atidépé. Vous étiez du convoi. Vous conservez des souvenirs de ce sombre 5 mai 1992.
Elliott OHIN : Ce qui s’est passé ce sombre 5 mai 1992 est horrible. Personnellement, même en essayant d’enlever cela de ma mémoire, les cicatrices que je peux éviter de voir sont toujours présentes sur mon corps. Des petits morceaux de plomb sont restés dans ma chair. J’étais déchiré du haut de ma cuisse jusqu’au bas ventre. Nous avons été attaqués avec des balles explosives ce qui explique la présence la présence de ces morceaux de plomb dans notre chair. Ce fut horrible, le Docteur Atidepe fut mortellement touché au cou et Monsieur Olympio criblé de balles juste derrière moi dans la voiture. Comment peut-on oublier cette barbarie qui dépasse l’imagination humaine
Apparemment, vous étiez les miraculés de cet attentat puisque vous étiez juste aux côtés de Marc Messan Atidépé?
Je pense avoir déjà répondu à cette question dans la précédente. Permettez-moi de ne pas revenir sur cette barbarie inhumaine
28 ans après, on peine à faire la lumière sur cette affaire et à situer les responsabilités. N’est-ce pas un affront pour les victimes et leur proche ?
C’est vrai que les résultats de l’enquête de la fusillade des membres de L’UFC ainsi que son Président ne sont jamais connus. Même si la CVJR a auditionné des gens sur les circonstances dans lesquelles les choses se sont passées, il n’en est pas moins qu’on rende public les résultats de l’enquête diligentée. Le fait de ne pas rendre public les résultats de l’enquête après des décennies donne l’impression que le pouvoir en place ne veut pas faire la lumière sur les exactions commises.
L’UFC estime que si des enquêtes ont été ouvertes suites à l’attentat, il est aussi judicieux que les gens soient informés des résultats obtenus.
La réconciliation n’est pas l’ignorance d’un passé mais l’inclusion, la compréhension du passé, de la vérité.
« Une nation qui ne sait pas faire face à son passé ne peut pas avoir de futur ».
Gilchrist Olympio était la principale cible. Miraculeusement il s’en est sorti. Il garde surement des séquelles. Quid de vous-mêmes ?
Cela va de soi que la principale cible était Monsieur Olympio. Le succès incontestable de nos tournées de sensibilisation à travers tout le pays est sûrement la raison qui a poussé le commanditaire de cet attentat à vouloir mettre fin à la vie du leader de L’UFC.
Aujourd’hui nous rendons grâce à Dieu pour sa vie mais, malheureusement nous avons perdu plusieurs sympathisants et compagnon de lutte dont le Docteur Marc Atidepe.
Des séquelles, il en garde, entre autres, l’utilisation d’une canne pour se déplacer maintenant dérive de ces séquelles.
Au niveau de l’UFC, que représente cette journée pour vous ?
Pour nous à L’UFC, le 5 mai est une journée de deuil. Nous avons toujours commémoré ce jour pour nous rappeler de tous ceux qui sont tombés sur le champ de bataille, nous leur renouvelions notre engagement d’aller jusqu’au bout de la lutte pour laquelle ils sont morts.
Nous rendons grâce à Dieu pour tous ses bienfaits.
Avez-vous prévu quelque chose pour honorer la mémoire des disparus ?
Une messe est dite en mémoire de tous ceux qui sont morts. Cette année, nous serons en communion d’esprit puisque les églises sont fermées. Nous irons aussi déposer des gerbes sur les tombes de nos illustres disparus parmi lesquels nous comptons le Docteur Marc Atidepe.
Votre collaboration avec le RPT n’a-t-il pas permis de tirer une croix sur ce passé douloureux ?
Vous savez, le sacrifice de L’UFC en signant un accord avec le RPT était destiné à dépassionner le débat en vue de parvenir à un vrai apaisement socio politique et une vraie réconciliation entre les togolais.
C’est vrai qu’aucune collaboration efficace ne peut se nouer dans la haine. On pardonne mais, on n’oublie pas et les cicatrices indélébiles sont d’ailleurs là pour nous rappeler ce passé douloureux.
La violence politique fait partie des armes redoutables du régime en place. Pensez-vous qu’on s’en sortira un jour et que proposez-vous ?
« Quiconque triomphe par la force va au bout de sa puissance ». Citation de Staline au lendemain des accords de Yalta. Nous disons à L’UFC que cela ne doit être le cas au Togo. Voilà pourquoi nous estimons que pour faciliter la reconstruction, il s’avère indispensable de mettre en exergue toute la vérité sur les situations qui ont laissées des marques quasi-indélébiles dans la mémoire de ceux qui les ont vécues et même de leurs descendants d’aujourd’hui et de demain.
Le règne de la violence supprime le discours politique et engendre des règlements de compte interminables
Votre mot de fin
La réconciliation me paraît d’autant plus malaisée lorsque la lumière n’est pas faite sur le passé. « Lorsque le passé n’éclaire plus l’avenir, l’esprit marche dans les ténèbres ».
Tirons donc des leçons de notre passé afin de nous attaquer sans aucun calcul à notre futur qui est uniquement dans le domaine de la volonté.
L’UFC appelle donc le peuple à défier le fatalisme, la résignation, le désenchantement ou la désespérance pour faire du Togo l’or de l’humanité. Nous avons la foi mais, Dieu a le pouvoir.
Merci!
Réalisé par J.D