Le secteur des voitures d’occasion au Togo est décidément un repaire de magouilles, des activités louches voire criminelles. Une vaste enquête de la DEA avait déjà établi qu’elle servait au Togo à couvrir le trafic de drogue et le blanchiment d’argent pour le compte du Hezbollah palestinien, une organisation terroriste selon les USA, et plusieurs pays européens. Mais il n’y a pas que les Libanais liés au parti de Dieu qui trouvent leurs comptes dans le commerce de ces voitures d’occasion. D’autres aussi y font la pluie et le beau temps, et la plupart du temps, avec la complicité des sommités du pays.
C’est le cas Mark Antoine, un mystérieux personnage, de moralité douteuse, renvoyé du Benin voisin qui a atterri au Togo sans aucun franc en poche et dormait à la belle étoile. Le Togo étant un pays de paradoxe où ce sont généralement les individus au profil douteux et bizarre qui font la pluie et le beau temps, le sieur Mark Antoine qui était presqu’un sans abri arrivé au Togo, est devenu aujourd’hui par les magouilles de toute sorte un Crésus sous les Tropiques, et ceci, avec la complicité au sein de l’appareil de l’Etat.
Nous avons suffisamment écrit sur ce monsieur et ses méthodes de fraudes. Pour rappel, tout a commencé le 12 juin 2003 par la prise d’un arrêté du ministre du Commerce, de l’Industrie, des Transports et du Développement de la Zone franche d’alors, le sieur Dama Dramani accordant à la STCA (Société Togolaise de Contrôle Automobile) un agrément pour l’immatriculation provisoire et la visite technique obligatoire des véhicules d’occasion en transit au Togo.
Chose curieuse, l’arrêté accordant l’agrément à la S TCA a été signé le même jour que celui du cahier de charges ; en d’autres termes, c’est un marché gré à gré qui avait été accordé par Dama Dramani au sieur Mark Antoine à l’époque. Un autre arrêté datant toujours du 12 juin et cosigné du ministre de l’Economie et des Finances et celui du Commerce, de l’Industrie et des Transports fixe la structure des prix de la prestation de service d’immatriculation provisoire et de visite technique obligatoire par la STCA. Selon l’article 1er de cet arrêté : « Le prix de la prestation de service d’immatriculation provisoire et de visite technique obligatoire des véhicules d’occasion en transit au Togo par la STCA est fixé à 10 000 Fcfa par véhicule ». L’article 2 précise la redevance de l’Etat en ces termes : « Sur le montant prévu à l’article 1er ci-dessus, la STCA verse à l’Etat une redevance de 2 250 f cfa par véhicule traité. Ladite redevance perçue par la régie des recettes de la Direction des Transports Routiers est constatée mensuellement par une quittance délivrée à la STCA et portant mention de l’objet du règlement. »
C’est ainsi que Mark Antoine est rentré dans le juteux commerce des véhicules d’occasion au Togo et a commencé par tisser sa toile de magouille, de fraude et de corruption et surtout d’évasion fiscale.
Le système de fraude de Mark Antoine
Le Directeur de la STCA, Mark Antoine, devenu par la force des choses Consul honoraire du Canada au Togo, un titre qu’il utilise pour couvrir ses activités délictueuses est un magouilleur sans commune mesure. La fraude, il l’a commencée par son propre nom puisque celui qu’il porte actuellement n’est pas le vrai. Il se nommait Mark Ferré, et après des ennuis judiciaires en France où il était recherché, il s’installe au Canada et prend la nationalité canadienne sous le nom de Mark Antoine. Une fois l’agrément à lui accordé, il n’a jamais respecté le cahier de charges, dont le point 9 portant sanction dit ceci : « L’avertissement est prononcé en cas de retard de deux (2) jours calendaires dans le reversement de la redevance due au terme d’une échéance. L’amende est infligée en cas de : mauvaise prestation ; non-respect des prescriptions techniques lors des opérations de visites techniques et d’immatriculation provisoire ; retard de sept (7) jours calendaires dans le reversement de la redevance due au terme d’une échéance. Dans ce cas, le montant de l’amende est égal à 50% des sommes dues. Le retrait de l’agrément est prononcé en cas de : Confection, impression et/ou pose frauduleuse de plaques d’immatriculation provisoire ; retard de trente (30) jours calendaires dans le reversement de la redevance au terme d’une échéance ; le retrait de l’agrément est assorti d’une amende égale à 50% du montant des sommes dues. Les sanctions sont applicables immédiatement sans préjudice des dispositions du code pénal en matière de délit ». Dès le début des activités de la STCA, le sulfureux Mark Antoine a passé outre ces dispositions du cahier de charges. Il a commencé les activités à partir d’octobre 2007, mais ne les a déclarées qu’en novembre de la même année.
La première redevance a été payée le 31 mai 2008, soit plus de 7 mois après le début des activités de la STCA sans qu’aucune suite n’ait été donnée de la part des autorités en charge du dossier, notamment le ministère du Transport, la Direction générale des Transports et la Direction des Transports routiers. De novembre 2007 à mai 2008, la STCA a déclaré avoir traité 22799 véhicules. Elle a versé à l’Etat selon le cahier de charges, 51 297 750F pendant que la STCA empochait 176 692 250F. Du 1er juin au 31 décembre 2008, la STCA a déclaré avoir traité 20753 véhicules, mais n’a versé à l’Etat que 46 694 250F gardant pour elle 160 835 750F. Sur la deuxième redevance payée le 31 décembre 2008, il y a eu selon nos investigations, une fraude de plus de sept mille (7000) véhicules.
En réalité selon nos informations, le sieur Mark Antoine dispose d’une technique très futée de marquage des véhicules permettant de faire la fraude sur le nombre des véhicules traités. Il apparaît donc que c’est la moitié des véhicules traités qu’il déclare à l’Etat. Ce qui signifie qu’il engrange le double des chiffres que nous avons révélés ci-dessus et ensuite il spolie l’Etat de la moitié des redevances. Le retard dans le payement de la redevance de l’Etat est devenu une pratique du sieur Mark Antoine. Le 13 juin 2008, dans une lettre de règlement adressée aux services des transports, il s’excusait du retard pris et promettait de verser désormais les redevances conformément aux cahiers de charges. Mais rien n’y fit. Le 26 janvier 2009, c’est avec un retard de six (6) mois qu’il versa les redevances à l’Etat, toujours avec la bienveillance des services chargé de faire respecter le cahier de charges. Nonobstant ces manquements graves, les fraudes et les violations du cahier de charges, Mark Antoine a continué, avec l’appui de ses complices au sommet de l’Etat, à tisser sa toile.
De la STCA au départ, il ajoute la STAC (Société togolaise d’assistance commerciale), juste une gymnastique de sigles. L’assurance des véhicules en transit tombe désormais dans ses mains, et ceci, au détriment des démarcheurs. Les services d’assurance sont obligés de lui verser 2000 F sur chaque véhicule, un véritable pactole qu’il empoche. Avec la STAC, il a installé sans aucune assurance et règle de sécurité élémentaire, des pompes d’essence dans l’enceinte des parcs automobiles pour ravitailler les voitures en transit. Un autre filon qui lui rapporte des dizaines de millions par mois. Toujours avec son réseau, il prend possession d’UNIPARK au détriment de BANAMBA par une alchimie juridique du Président de la Cour Suprême, le sulfureux Abalo Pétchélébia. La cerise sur le gâteau, il lance, en intelligence avec l’ancien Directeur général des douanes, Ably-Bidamon, la COTEC (Compagnie togolaise d’évaluation et de contrôle) pour soi disant lutter contre les fraudes et renflouer les caisses de l’Etat, et ceci, à travers une méthode qui permet de connaître la valeur réelle du véhicule. Cette fameuse COTEC de Mark Antoine, Marc Bidamon et comparses a fait augmenter de façon exponentielle les frais de dédouanement des véhicules d’occasion au Togo passant de 600 000 à 800 000 F voire plus.
Résultat, le flux des véhicules importés a sensiblement diminué, les recettes aussi, mais la mafia elle, s’est énormément enrichie. Pour asseoir son système obscur ou du moins sa nébuleuse, Mark Antoine n’hésite pas à graisser les pattes à certaines personnalités du pays, et notamment celles qui sont chargées de surveiller ses activités.
Un réseau de corruption
En dehors des fraudes sur le nombre des véhicules traités qui permettent à la STCA de contourner le fisc, Mark Antoine a installé un vaste réseau de corruption des cadres de l’administration douanière, des services des impôts, des juges, des responsables du service des transports routiers, de certains officiers des FAT et même des journalistes etc. A la justice, les soupçons de corruption pèsent sur le juge Abalo Pétchélébia, le Président de la Cour Suprême qu’Aboudou Assouma avait présenté comme l’un des juges les plus corrompus.
Le 03 avril 2009, à peine nommé à la tête de la Cour Suprême, il prend une ordonnance de rétractation du sursis à exécution qui frappait l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Lomé en 2007 dans le litige qui opposait la société UNIPARK à la société Banamba. En sautant le verrou du sursis, Abalo Pétchélébia permettait à Mark Antoine de s’emparer du Parc alors que le dossier n’était pas définitivement clos devant la Justice. Est-ce après ce service rendu que Mark Antoine lui a offert un groupe électrogène d’une valeur de 6 millions de francs CFA qu’une société de vente de matériels lourds est allée installer dans sa maison au village ?
Les douanes aussi participent aux magouilles à la STCA. Les services togolais opèrent des retenues sur les véhicules traités par la STCA. En deux ans, les fonds que les services des douanes devaient reverser à la STCA se chiffraient à 400 millions F CFA. Lors de la réception de ces fonds, le sieur Mark Antoine gratifia un haut responsable des douanes de 10 millions de francs remis main à main. D’autres cadres des douanes togolaises bénéficient régulièrement de la bienveillance du tout-puissant Mark Antoine qui dispose également de ses ramifications aux services des impôts. Là, c’est un certain Adoyi qui est à la manœuvre. Très proche de Mark Antoine, ce monsieur a créé un cabinet d’audit qui se charge de faire l’état financier de la STCA. Pour cacher la manœuvre, il a placé à la tête du cabinet un certain Arouna qui, en réalité, est un faire-valoir. Cet agent indélicat des impôts qui aide Mark Antoine à frauder au fisc perçoit à titre de bonus une somme de 300 000 F par mois à la STCA, sous le faux nom de S. A. Eyana. La Direction du Transport routier n’est pas du reste. Selon l’arrêté interministériel N° 013 /MCITDZF/MEFD/DTR en son article 2, c’est elle qui perçoit mensuellement les redevances de l’Etat. En d’autres termes, c’est elle qui a la charge de contrôler strictement le nombre de véhicules traités par la STCA. Comment se fait-il que le sieur Mark Antoine déclare seulement la moitié des véhicules traités sans que la Direction des Transports routiers n’arrive pas à détecter l’anomalie ?
De l’avis de plusieurs sources, c’est de connivence avec la Direction des Transports routiers et particulièrement de ses responsables que le DG de la STCA organise la fraude pour priver le Trésor public de dizaines de millions de francs. Ces responsables de la Direction des Transports routiers sont régulièrement arrosés à la fin de chaque mois par le fameux Mark Antoine.
Il y a enfin des journalistes qui participent aussi au festin délictueux du tout-puissant DG de la STCA par des émargements mensuels. Certainement qu’à la sortie de ce dossier, ils nous répondront en présentant leur bienfaiteur comme l’homme d’affaires le plus propre du Togo.
Mark Antoine a créé aussi une clinique chargée de contrôler les employés. Une clinique gérée par un chirurgien dont la femme tient la cantine de la STCA.
Dans nos investigations, il apparaît que le sieur Mark Antoine utilise au moins 20% de son chiffre d’affaires pour corrompre les juges, les avocats, les journalistes, les cadres des impôts et des douanes, des officiers des FAT, des responsables et agents du Service des Transports routiers pendant que ses employés togolais tirent le diable par la queue ou sont souvent traités moins que des hommes. Comment peut-il en être autrement lorsqu’un pays souverain laisse entre les mains d’un expatrié de sulfureuse réputation, la latitude de créer lui seul au moins cinq sociétés (STCA, STAC, COTEC, UNIPARK etc) pour contrôler toute la chaine de traitement des voitures d’occasion ? N’y- a-t-il pas des Togolais capables d’investir dans ce domaine pour le bien de notre propre pays ?
Mark Antoine et l’évasion fiscale
A l’image de tous les hommes d’affaires véreux qui sont venus faire fortune au Togo avant de repartir sans leur pays, le sieur Mark Antoine dispose de plusieurs astuces pour sortir l’argent du Togo qu’il envoie bonnement dans les paradis fiscaux. L’ANR qui jette souvent son dévolu sur les pauvres commerçants à l’aéroport ne voit généralement rien du côté du DG de la STCA. Avec une fortune transférée à l’extérieur, celui qui était arrivé au Togo sans aucun franc n’hésite pas à dire à qui veut l’entendre qu’il envisage l’achat d’une grande demeure résidentielle dans un pays de l’Amérique Latine.
L’une des méthodes d’évasion fiscale est le transfert à chaque fin du mois d’une somme de onze mille euro (11 000 £) soit 7. 205 000 francs CFA sur le compte de son fils en France, comme l’atteste un document dont nous nous sommes procuré copie. Le transfert se fait chaque fin du mois à la BTCI. Cette somme correspond, selon Mark Antoine, au salaire de son fils qui se trouve être le responsable du système informatique de la COTEC. Si le fils gagne autant et dépasse même le salaire officiel du Président de la République du Togo qui est de 7 millions F CFA, que gagne alors le père ? A y voir de près, c’est une évasion fiscale organisée par le sieur Mark Antoine vers l’extérieur, conservant sur un compte ici de petites sommes pour faire croire aux gens qu’il ne gagne pas grand-chose. Enfin il est à noter que le sieur Mark Antoine n’ayant aucun niveau, c’est sa femme Anara Makachevna Sovetovna de nationalité russe qui coordonne tout ce réseau de mafieux.
Au bout du compte, cette nébuleuse a réussi à faire augmenter les frais de dédouanement des voitures d’occasion par la création à la chaine des sociétés les unes aussi bidon que les autres. Le paradoxe est que quand le pauvre Togolais s’échine à payer des frais élevés des douanes pour sortir du port un véhicule, Mark Antoine et ses comparses eux, s’arrangent pour mettre une grande partie des recettes dans leurs propres poches au détriment du Trésor public. Comment peut-on laisser une telle situation perdurer ? Comment le gouvernement togolais qui multiplie les discours sur la bonne gouvernance peut-il laisser un expatrié ruiner l’économie de tout un pays ?
Interpellé récemment sur la question au Parlement, le ministre de l’Economie et des Finances, l’homme à la rigueur sélective Adji Otèth Ayassor, a trouvé des arguments pour ne pas répondre à l’invitation des députés. Certainement qu’il en sait aussi sur les magouilles qui ont actuellement cours dans la filière des véhicules d’occasion. A suivre.
Ferdi-Nando et Afreepress
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