Le vendredi 25 mai dernier, malgré la contestation généralisée suscitée par l’élaboration unilatérale du Code électoral par le pouvoir et la tentative de son imposition à toute la classe politique, le texte a été transmis à l’Assemblée nationale et voté par les députés du couple Unir(Rpt)-Ufc. Avec cette adoption au forceps, la marche vers les élections législatives et locales à venir semble irréversible, et plus rien ne saurait l’arrêter. Quant à l’issue de ces scrutins, elle est plus qu’incertaine. Avec cette logique de la force, certains partis majeurs de l’opposition ne seront-ils pas tentés de boycotter ces échéances ? Qu’est-ce qui fait courir tant la défunte ( sic) Union des forces de changement (Ufc) du vestige humain Gilchrist Olympio ?
La tentation du boycott
C’est certain, le pouvoir en place est dans une logique de verrouillage du processus électoral, et tout est fait quotidiennement à dessein pour estomaquer l’opposition et la pousser à « déconner ». Les discussions ouvertes à la pelle ne sont qu’une manière subtile pour obtenir sa caution. Devant l’unilatéralisme du gouvernement dans la définition du cadre électoral et l’élaboration des textes y relatifs malgré le dialogue et le consensus prônés par l’Accord politique global (Apg), le passage en force opéré malgré la contestation généralisée du projet de Code électoral, il y a de quoi pour des partis de l’opposition être tentés de bouder les prochains scrutins. Pour éviter de cautionner un hold-up préparé à l’avance, avec la définition des règles du jeu par le pouvoir tout seul, l’acheminement de kits de la RD Congo déjà conditionnés pour la fraude, et bien d’autres actions à venir.
Au cours du meeting du samedi 12 mai dernier qui a suivi la marche de ce jour du Front républicain pour l’alternance et le changement (Frac), le leader de l’Alliance nationale pour le changement (Anc), Jean-Pierre Fabre a menacé en des termes à peine voilés que son parti boycotterait les élections, si les réformes électorales ne sont pas conduites de façon consensuelle. Cette idée doit sans doute effleurer les esprits dans d’autres partis qui sont contre la façon de procéder du pouvoir. Le boycott serait la réaction légitime à cette attitude du régime. Mais ces déclarations doivent viser juste à mettre la pression sur le gouvernement afin qu’il révise son comportement et fasse les choses de façon civilisée. Car, il faut l’avouer, un boycott des législatives et des locales à venir serait un suicide politique, l’erreur de trop à éviter de commettre. L’expérience de 2002 est encore vivace dans les esprits. C’est le boycott décidé par l’opposition qui a pavé la voie en décembre 2002 au tripatouillage de la Constitution de 1992 pour permettre à Eyadéma de rempiler en 2003. Et pour l’une des rares fois, nous avons trouvé un Nicolas Lawson lucide, la tête sur les épaules, raffraîchir la mémoire à ses pairs de l’opposition : « Nous avons laissé faire en 2002, et nous payons les conséquences aujourd’hui. Les conditions aujourd’hui pour organiser les élections…nous les avons eues hier ». Sweet Nico, devrait-on dire.
Le branle-bas à l’Ufc
Une délégation du parti, conduite par son président national, Son Excellentissime Gilchrist Olympio était samedi et dimanche derniers dans le Kloto, précisément à Kpele-Adeta et à Danyi-Apeyeme, dans le cadre de leur précampagne électorale. Cette visite a permis au « Leader charismatique » et à ses lieutenants de rencontrer les militants et sympathisants du parti – s’il en existe encore – du coin et d’avoir des échanges « fructueux et conviviaux » avec eux. « Le seul Togolais qui s’est le plus sacrifié pour ce pays, c’est bien Gilchrist Olympio. Si aujourd’hui, les chefs traditionnels acceptent de s’afficher publiquement à un meeting de l’opposition, c’est que les choses ont beaucoup évolué au Togo », a tenu à souligner le seul diplômé de la fondation Conrad Adenauer, nous avons nommé Djimon Oré, qui a mis cette pseudo évolution à l’actif de son parti et indiqué que « de tous les partis politiques du Togo, l’Ufc est le mieux organisé et le plus serein pour faire face aux échéances électorales à venir ». Bien qu’on ne soit pas encore en campagne électorale, il n’a pas manqué d’appeler ouvertement les populations à accorder leurs suffrages au parti « jaune ». Le vestige Gilchrist Olympio est venu, lui, promettre, comme depuis quelque temps, d’apporter le développement et la prospérité aux populations, insister sur la nécessité pour le gouvernement togolais de relancer la filière agricole dans la région, la construction de routes, d’ouvrages d’adduction d’eau, l’électrification de ces localités et la prise en compte de leurs besoins dans les politiques de développement. La foule (sic) de gens transportés sur les lieux de rencontre à l’aide des véhicules de l’Etat faisait du bruit, criant par moments des « détia kpoéléyi !!! ».
Cette sortie dans ces deux localités se situe dans le cadre d’une tournée générale de prise de contact et de sensibilisation à travers les préfectures et les différents cantons enclenchée par le parti depuis février dernier et qui a vu l’« Opposant historique » aller dans le Zio, l’Est-Mono, les Lacs, l’Oti, le Vo. Et cette tournée devra se poursuivre jusqu’aux législatives, apprend-on. Qu’est-ce qui, diantre, fait tant courir Gilchrist Olympio qui n’arrive même pas lors de ses meetings de sensibilisation à Lomé, jadis son fief électoral, à remplir d’une cabine téléphonique l’assistance présente ? L’Ufc qui est vomie par le peuple togolais, croit-elle vraiment gagner ces législatives et locales à venir ? Sur quoi compte au juste ce parti pour faire autant de show ?
Le scénario de la « gagne »
Pour les observateurs avisés, tous les faits énumérés plus haut font partie d’un scénario élaboré dans les arcanes du pouvoir. Le plan ficelé consisterait à estomaquer l’opposition, en fait ses partis majeurs capables de rivaliser avec le Rpt/Unir et l’Ufc dans les urnes (Anc, Car, Obuts, Cdpa) par les actes et prises de décisions et les pousser à boycotter les législatives et locales à venir. Et la dynamique devra continuer, avec la composition très prochaine des différentes structures impliquées dans l’administration électorale, à l’instar de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), ses démembrements que sont les Céli, etc. Tout boycott qui donnerait ainsi les mains libres au pouvoir pour dérouler et les sièges au parlement seront partagés comme un butin. Une bonne partie de ces sièges sera attribuée au parti de Faure Gnassingbé, un certain nombre offert à l’Ufc et quelques miettes à d’autres partis ou candidats indépendants, juste pour simuler la pluralité politique de l’Assemblée nationale, comme c’était le cas en 1999 avec le Rassemblement pour le soutien à la démocratie et le développement (Rsdd) d’un certain Harry Octaviano Olympio. Nicolas Lawson a aussi flairé la manœuvre et a tenu à la révéler. « Malgré les protestations, l’Ufc s’associe à l’Unir pour nous mettre devant le fait accompli. Leur souhait serait notre boycott des élections législatives et locales afin de les laisser poursuivre leur concubinage désastreux, leur politique de saccage social, le pillage des ressources nationales, l’endettement faramineux du pays avec leurs complices étrangers, la prolétarisation de notre jeunesse, l’immoralité et la destruction de notre société », a-t-il souligné dans un communiqué daté du lundi 28 mai dernier.
Plus concrètement, avec un boycott de l’opposition, le partage verra ainsi l’Unir l’emporter dans les fiefs du Rpt, et l’Ufc dans les siens d’antan. Et pour justifier cette éventuelle domination électorale, les avocats du diable argueront que le parti « xoxotsoin » de Faure Gnassingbé a récupéré l’électorat de l’ancien parti unique et est même allé au-delà, que celui de son collaborateur Gilchrist Olympio a aussi conservé le sien traditionnel malgré la scission qu’elle a connue. Ces images de la tournée de l’Ufc seront brandies comme la preuve de leur travail de mobilisation, pour clouer le bec aux détracteurs. Et l’opposition, mais aussi les populations n’auront que leurs yeux pour pleurer.
Tino Kossi
liberte-togo.com
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