Le Secrétariat d’Etat américain, fidèle à sa tradition depuis presque 40 ans, a sorti son rapport annuel sur la situation des droits de l’Homme dans le monde. En ce qui concerne le Togo, l’édition 2017 de ce rapport qui sert essentiellement à informer le président Trump et son administration, donc une girouette avant toute rencontre avec des chefs d’État du monde et des membres de la société civile, a peint un tableau moins reluisant en matière de respect des droits humains.
… Togo, mauvais élève !
Ce rapport 2017 sur la situation des droits humains dans le monde fait cas de plusieurs violations des droits humains au Togo dont la privation arbitraire de la liberté, le recours excessif à la force par les forces de sécurité, l’absence de procédure régulière et les conditions dures et potentiellement mortelles dans les prisons et les centres de détention. Ce n’est pas tout.
Ce rapport du Secrétariat d’Etat américain a également mis en exergue, les cas d’arrestations arbitraires, d’influence de l’Exécutif sur le pouvoir judiciaire, de restriction de la liberté de réunion, de corruption institutionnalisée, de criminalisation des comportements sexuels entre personnes de même sexe et traite des personnes. Aussi, ce rapport relève des cas de corruption endémique dans l’administration, de discrimination contre les personnes handicapées, les femmes ainsi que de maltraitance des enfants.
Bref, le pouvoir de Lomé est encore épinglé par l’administration américaine pour le non-respect des droits de l’Homme au Togo. Classant, de fait, le pays dans la classe des mauvais élèves en matière de respect des droits humains.
Le decor
De toute analyse faite, il en ressort que ce rapport vient révéler au grand jour, le vrai visage du pouvoir de Faure Gnassingbé. En effet, après son accession mouvementée à la tête du Togo en 2005, suite au décès de son père, Faure Gnassingbé a semblé, les mois suivants, enfiler le manteau d’un démocrate. Ce semblant de «conformité aux normes démocratiques», et son chantier de réconciliation nationale, au travers de la signature de l’Accord Politique Global (Apg) et la mise en place de la Cvjr, à la suite des violences nées de son élection en 2005 n’aura finalement duré que cinq (5) ans. A partir de 2010, les Togolais ont découvert un autre Faure Gnassingbé.
Autant de dysfonctionnements de nouveau mis à jour par l’administration américaine. Sur plusieurs plans, tout semble dire que les droits de l’homme sont sérieusement menacés au Togo. C’est un secret de polichinelle, depuis août 2017, le Togo traverse une crise sociopolitique sans précédent. Le pouvoir de Faure n’a jamais été aussi contesté. Mais après quelques mois de manifestations politiques, les droits et libertés sont désormais étouffés. A Sokodé, à Bafilo ou encore à Mango, les manifestations publiques y sont toujours interdites. Des violences sont exercées sur les manifestants, à chaque fois qu’une manifestation publique est projetée. Des Bataillons de militaires à tous les coins de rue, des check point à presque chaque entrée de la capitale, Lomé laisse carrément l’image d’une ville en état de siège depuis quelques semaines. Comme conséquence, l’économie nationale est fragilisée. Pendant ce temps, aucune volonté politique ne semble germer, dans l’optique de venir aux termes de cette crise politique aux désagréments économiques dévastateurs.
De la mauvaise publicité pour le pouvoir de Lomé
Ce rapport du Département américain, au-delà de son objectivité, vient constituer une mauvaise publicité pour le pouvoir de Lomé qui postule pourtant pour plusieurs programmes auprès des partenaires en développement dont le Millenium Challenge Corporation (Mcc) initié par le gouvernement américain.
Et pour cause, les organisations non gouvernementales prennent pour référence, ce rapport qu’elles consultent pour établir leurs propres rapports et programmes. Par ailleurs, les Nations unies et d’autres organes internationaux, pour leur part, s’y réfèreront également lorsqu’il s’agirait d’examiner la situation des droits de l’Homme au Togo. De même les universitaires s’en serviront dans leurs recherches et la préparation de leurs cours, sans oublier les entreprises et d’autres organisations à but lucratif qui y feront recours pour évaluer les risques liés aux investissements et au développement du commerce à l’échelon international. Mais aussi et surtout, le département américain de la Justice et les avocats des droits de l’homme consultent ce rapport dans les affaires de demande d’asile.
C’est dire donc que le gouvernement togolais, sans le savoir, scie l’arbre sur lequel il est perché. Car, des cas de corruption, de surpopulation carcérale, de favoritisme, de mauvaise gouvernance, d’impunité, de restrictions de liberté d’expression et de manifestation et d’autres discriminations liées aux ethnies sans oublier les violations des droits des enfants au Togo dont fait cas ce rapport ne sont pas de nature a encourager les partenaires en développement à composer avec le Togo. Encore moins les investisseurs qui hésiteront à privilégier, dans leur plan d’affaire, la direction Togo.
Source : Fraternité No.270 du 09 mai 2018