L´intelligente réaction de l´opposition malienne face aux tatônnements incohérents de la CEDEAO doit avoir fait réfléchir dans les états majors des partis politiques au Togo. La cohérence, la responsabilité et la discipline avec lesquelles nos frères opposants de Bamako mènent leurs actions doivent avoir rappelé à l´opposition togolaise son manque de patriotisme, sa méchanceté, son opposition à l´opposition et surtout son amateurisme. Au Togo, être opposant est devenu depuis longtemps une fin en soi pour beaucoup de leaders qui n´ont aucune ambition réelle pour faire aboutir la lutte du peuple qui dure depuis bientôt quatre décennies. Les élections présidentielles organisées depuis plusieurs années aux conditions du régime de dictature, et auxquelles l´opposition avait toujours pris part, malgré les imperfections pourtant dénoncées par la même opposition, sont devenues un baromètre pour des leaders qui rêvent d´être les opposants les mieux adulés par le pouvoir Gnassingbé.
Le sabotage ou la trahison des travaux de la C14 qui avaient consisté à refuser de faire sortir les masses pour manifester par le ou les leaders qui se reconnaîtront, leur comportement bizarre après leur cuisante défaite et l´éclatante victoire d´un des leurs au dernier scrutin présidentiel de février 2020 sont des preuves palpables que beaucoup des soi-disant opposants avaient menti au peuple des décennies durant, alors qu´ils s´activaient dans l´ombre pour le maintien du régime de Faure Gnassingbé. Quand quelqu´un vous accuse de traître ou d´ennemi du peuple, et que vous ne ressemblez en rien à ce dont on vous accuse, votre premier réflexe est de poser des actes en faveur du peuple, malgré les critiques et les attaques personnelles, pour faire mentir vos détracteurs. On ne s´enferme pas dans le silence en refusant de soutenir celui qui est le mieux placé pour amener l´alternance pour laquelle on prétend lutter depuis des décennies. Ce comportement anti-peuple qui favorise plutôt le maintien au pouvoir du régime contre lequel on prétend lutter, fut observé depuis février 2020, pas seulement chez un leader de l´opposition, mais malheureusement chez presque tous ceux-là qui se disent leaders de partis politiques, ayant participé ou non aux élections.
Nous voulons rappeler qu´au Togo le pouvoir traîne toujours dans la rue. Affaiblis par les scandales et surtout par les crimes humains de toutes sortes, l´invisible Faure Gnassingbé et sa bande de prédateurs ne sont plus en mesure de continuer à prétendre diriger aux destinées de notre pays. Le déploiement scandaleux de milices tribales samedi 01er août 2020 pour s´opposer à la manifestation initiée par Tempo-Africa et soutenue par la dynamique Kpodzro montre à suffisance que le pouvoir de Lomé est désormais aux abois. Quand un ministre d´un régime illégitime répondant au nom de Payadowa Boukpessi coopère avec une association de miliciens de son ethnie, appelée pompeusement « Les Sentinelles du Peuple » pour décréter l´illégalité de l´existence de la dynamique Kpodzro qui n´est pas une association, mais une mouvance de l´opposition composée de plusieurs partis politiques, à l´instar de la C14, du FRAC en 2010, du CAP 2015 etc…., on comprend aisément que le doute et la débandade se sont emparés de la maison bleue. Ou bien Monsieur Boukpessi veut nous dire que les coalitions de l´opposition précitées, dont certaines comme la C14, avaient même dialogué avec le régime de dictature, n´avaient aucune base légale?
C´est à ce moment précis, où Faure Gnassingbé se trouve au creux de la vague; et où toute opposition responsable devrait s´organiser pour sonner le tocsin et lui asséner le coup de grâce, que les « opposants » togolais décident d´exposer leurs tares en brillant par leur absence totale sur le terrain. Ce qui mériterait d´être exposé au musée des curiosités politiques est le fait que les attaques les plus dures contre l´opposition au Togo ne viennent plus du régime des Gnassingbé, mais de l´opposition elle-même. Le samedi 01er août 2020, c´est une militante de l´ANC au nom de Nadia qui s´est improvisée journaliste en parcourant les quartiers de Lomé au volant d´une voiture pour montrer les images de rues vides de manifestants en se réjouissant que l´appel à manifester n´avait pas fait mouche. Si le Togo était libéré ce samedi, ce ne sont pas les responsables de Tempo-Africa, ni les compatriotes de la diaspora favorables à l´initiative comme nous, ni Agbéyomé Kodjo, ni Monseigneur Kpodzro, ni moins encore tous les partis regroupés au sein de la dynamique qui seront les premiers bénéficiaires, mais le peuple togolais tout entier. Les assassinats sauvages, comme ceux des officiers nawdeba parmi tant d´autres, les arrestations et emprisonnements arbitraires, l´impunité dont jouissent les tueurs et les voleurs prendront fin; le Togolais et la Togolaise se porteraient mieux au quotidien.
Et c´est à dessein que nous avons commencé notre article par une déclaration de notre consoeur et compatriote Fabbi Kouassi, dont nous n´avons pas pu vérifier l´authenticité des propos. Il ne serait pas exagéré de conclure que les leaders actuels de l´opposition ont failli sur tous les plans. Devenus de petits dieux, beaucoup parmi eux ont, des décennies durant, préféré les béni-oui-oui aux esprits éclairés et critiques; c´est pourquoi aujourd´hui, face au désastre et à l´échec total, il n´y a pas de relève valable pour prendre la place de ces leaders défaillants et surtout égoïstes. Le mal qui a tiré l´opposition togolaise depuis presque quatre décennies vers le bas et qui la laisse aujourd´hui désarmée et malade de ses incohérences, n´a pas non plus épargné les Togolais de la diaspora. Orgueil, égoïsme, tribalisme, repli communautaire, sont quelques-unes des tares qui ont empêché la réussite de la formation des ensembles cohérents où tous les Togolais pourraient se retrouver pour parler d´une même voix.
Aujourd´hui où le constat de déconfiture totale du régime Gnassingbé, qui se comporte en force d´occupation, est sans appel; et où la résistance est quasi nulle, il urge que des forces nouvelles, débarassées de toute considération partisane, en collaboration avec des Togolais de l´étranger, pourquoi pas?, voient rapidement le jour pour pallier le dangereux vide laissé par des leaders démisssionnaires d´une opposition qui n´en est plus une. Nous ne le dirons jamais assez: il n´ y a plus de pouvoir politique au Togo, il est dans la rue. Il suffit que des Togolais et Togolaises, civils comme militaires, intelligents et désintéressés, s´organisent pour donner le coup de grâce à un Faure Gnassingbé acculé de tous les côtés.
Samari Tchadjobo
05 août 2020
Allemagne