Affaire Cité OUA / Les bizarreries de la Justice togolaise
Le « recherché » Hope Agboli toujours en poste à l’Ambassade du Togo en France
C’est un secret de polichinelle, le Togo est une terre de bizarreries. Ce qui n’est même pas imaginable sous d’autres cieux, est bien possible chez nous. On s’en convainc au regard des différents faits et décisions sur le plan politique qui portent les griffes des gouvernants. Et chaque jour qui passe, le Togo confirme cette triste réputation. Surtout avec sa justice, pourtant dite en modernisation.
Le jeudi 21 juillet dernier, la Cour d’assises siégeait sur l’affaire de détournement de fonds dans le cadre de la construction de la cité OUA. Etaient mis en cause l’ancien Premier ministre Eugène Koffi Adoboli et deux de ses collaborateurs, Saïbou Issa Samarou et Hope Agboli. Il leur était reproché d’avoir détourné huit cent (800) millions de FCFA. A l’issue de l’audience, les trois inculpés ont été reconnus coupables des faits qui leur sont reprochés et lourdement sanctionnés. Eugène Koffi Adoboli a été condamné à cinq (05) ans de prison ferme et à cent (100) millions de FCFA d’amende. Quant à ses coaccusés, ils ont écopé de huit (08) ans de réclusion chacun et d’une amende de cinq cent (500) millions. Par-dessus tout, les trois serviteurs du pouvoir Rpt devraient payer cinq cent (500) millions FCFA à titre de dommages et intérêts et, ne résidant pas sur le territoire togolais, des mandats d’arrêt internationaux ont été lancés contre eux.
On l’avait dit, c’était manifestement un simulacre de procès au regard des conditions dans lesquelles il s’était déroulé. Les accusés, surtout l’ancien Premier ministre n’a été informé du jugement que la veille, et par un proche. Personne ne croit d’ailleurs aux accusations portées contre Eugène Koffi Adoboli. Ses pairs Joseph Kokou Koffigoh et Agbeyomé Kodjo sont même montés au créneau pour balayer du revers de la main cette accusation. Il était apparu clair que les réelles motivations de ce procès étaient ailleurs. C’était juste un clin d’œil à la communauté internationale, comme quoi, le Togo est décidé à poursuivre les cas de prévarications et autres détournements de deniers publics, surtout que l’inénarrable ambassadrice des Etats-Unis au Togo Mme Patricia Hawkins dénonçait quelques jours plus tôt dans son discours, à l’occasion de la célébration de l’indépendance de son pays le 4 juillet dernier, le laxisme des autorités togolaises à poursuivre les cas de corruption.
A l’époque nous avions qualifié de « comédie judiciaire sous les tropiques » ce procès, du fait que l’un des trois inculpés, Hope Agboli, assure jusque-là des fonctions officielles au nom de l’Etat togolais à l’étranger et qu’on ne l’ait pas appréhendé et qu’il faille lancer un mandat d’arrêt international contre lui. L’ancien ministre de l’Urbanisme à l’époque des faits était, jusqu’au procès, en fonction à l’Ambassade du Togo en France en tant que Conseiller et chargé de la Culture. On pensait que les autorités judiciaires allaient nous donner tort et normaliser la situation. Mais ce n’est malheureusement pas le cas.
Hope Agboli serait toujours en poste à l’Ambassade. Selon le confrère en ligne « mo5-togo », il était même en séance de travail le jeudi 11 août dernier. C’est ce qu’aurait constaté son correspondant en France. « Face à cette situation, on se demande qui trompe qui dans cette affaire de l’ancien Premier ministre Eugène Adoboli. Est-ce que Faure Gnassingbé et son gouvernement sont vraiment sérieux ? On condamne un fonctionnaire à 8 ans de prison et il continue d’officier pour le gouvernement », peste le confrère, qui y voit un traitement de faveur, une politique de deux poids deux mesures. « Cependant d’autres personnes n’ont pas eu droit à ces privilèges. Bertin Agba continue de clamer son innocence aux frais. Eugène Attigan est en prison depuis plusieurs mois et attend toujours son jugement. Quant au bouillant Kpatcha Gnassingbé et les autres interpellés dans l’affaire d’atteinte à la sûreté de l’Etat, ils sont toujours en détention sans jugement », regrette-t-il, avant de s’interroger : « Qu’est-ce qui se passe vraiment au sein de la justice togolaise et du clan au pouvoir ? ».
Selon le site wikipedia, un mandat d’arrêt international appelle généralement à l’interpellation puis à l’extradition d’un criminel vers le pays demandeur. Les mandats d’arrêt internationaux sont en fait des « notices rouges » délivrées par l’Organisation internationale de police criminelle : Interpol. Sous le nom de « notice rouge Interpol », le mandat d’arrêt international s’entend la demande d’un pays pour obtenir le retour d’un suspect ou d’un criminel en vue de son jugement ou de la purge de sa peine. Bref, le mandat d’arrêt international est généralement lancé contre un inculpé qui est à l’extérieur du pays où il est recherché ou qui s’y cache, pour éviter de répondre de ses actes. Son lancement induit donc l’arrestation de l’incriminé et son extradition au pays où il est recherché. Dans le cas d’espèce, comment comprendre alors que Hope Agboli, contre qui un mandat d’arrêt international a été lancé par la Justice togolaise, puisse encore occuper des fonctions officielles au nom du Togo ? Voilà visiblement les preuves de la comédie judiciaire qu’a été ce procès du 21 juillet. Ah on oubliait, les moutons se promènent ensemble mais ils n’ont pas le même prix. Hope Agboli est le fils de Togbui Agboli Agokoli IV, Chef traditionnel de Notsé et des Ewe, président des Chefs traditionnels du Togo et membre de la CVJR, bref, un activiste au service du pouvoir Rpt. Qui dit que la Justice togolaise n’est pas en modernisation ?
Tino Kossi
source:liberté hebdo togo
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