« C’est avec les chèvres immolées aux idoles qu’on prépare à manger aux prêtres et autres invités aux cérémonies officielles »
Ce n’est pas seulement à l’occasion de la fête du 13 janvier que le pouvoir se livre aux pratiques sataniques. Il le fait aussi dans le cadre du 24 janvier célébré depuis l’accident de Sarakawa comme Fête de la Libération économique, l’objectif étant toujours de pérenniser le règne des Gnassingbé.
Dans notre parution du mardi 10 janvier 2012, nous avons publié un article sur les pratiques sataniques exécutées par le pouvoir RPT en vue à la veille de chaque fête du 13 janvier. Des cérémonies faites en souvenir à l’assassinat du premier président du Togo, Sylvanus Olympio, et pour pérenniser le règne des Gnassingbé.
Bien que la filière des phosphates soit sinistrée et l’hôtel de 2 février symbole de l’attentat de Sarakawa, soit hypothéqué aux Libyens qui l’ont ensuite offert aux pipistrelles, Faure Gnassingbé et ses hommes continuent de se prêter aux cérémonies marquant l’anniversaire de l’accident de Sarakawa qui s’est produit le 24 janvier 1974. Ce n’est pas un acte gratuit. Ils sont obligés de pérenniser la tradition dont dépend la survie du régime.
Selon les informations, presque les mêmes pratiques occultes se déroulent dans la nuit de chaque 24 janvier. « A chaque fête du 24 janvier, plusieurs chèvres sont immolées à des idoles implantés dans certains endroits du camp RIT (actuel camp général Gnassingbé Eyadema, NDLR). Le sang de ces animaux immolés est aussi répandu aux différentes entrées du camp. Tout se fait dans la nuit et avant que le jour se lève, les traces sont effacées pour empêcher les habitants et les visiteurs de découvrir l’existence de ces cérémonies. Le comble, c’est qu’avec les chèvres dont le sang est offert aux idoles qu’on prépare à manger aux prêtres et autres invités aux cérémonies officielles. Ces pratiques se poursuivent en dépit de la mort du général Eyadema. Le pouvoir en tire d’énormes profits », raconte un militaire à la retraite.
Il est aussi rapporté que les mêmes cérémonies sont faites à Sarakawa où l’épave du DC-3 est vénérée chaque année par le chef de l’Etat et son bataclan. « Ici, ceux qui sont morts dans cet accident et dont le nom est cité dans les chansons, n’est souvent qu’un canular. C’est plutôt Eyadema qui est vénéré pour être sorti indemne de la prétendue tentative d’assassinat de la haute finance internationale. Le port de la tenue blanche s’inscrit dans cette dynamique », ajoute un ancien député.
En effet, dans son ouvrage « Le Togo sous Eyadema », l’universitaire togolais Comi Toulabor a expliqué l’exploitation symbolique de l’accident de Sarakawa. « Le spectacle est grandiose : dans cette campagne désolée et isolée de toute habitation, les militants en pèlerinage (organisé soit par Eklo, secrétaire administratif du parti, soit par le responsable d’un service public ou privé) viennent chanter et danser pendant que sont immolés des moutons à pelage blanc sur la carcasse du DC-3 pour sceller dans le sang l’alliance du peuple togolais avec le « miraculé de Sarakawa » et les faire participer, dans un élan de solidarité transcendant les particularités régionales, à « l’œuvre intrépide de la construction nationale ». Le 23 octobre 1978, des professeurs de lycée et de l’Université de Lomé sont envoyés en pèlerinage à Sarakawa après leur sortie de prison suite à leur participation présumée à un complot. De même en est-il en mars 1980 des familles métisses de Lomé après leur réhabilitation », précise l’ouvrage.
L’auteur a en outre fait un lien entre le culte de Gu qui est le dieu du Fer dans le panthéon Vodou et qui existe au Sud du Togo, au Bénin et au Nigeria. Les adeptes de ce fétiche sont souvent vêtus de blanc comme le font justement les tenants du pouvoir. Un autre rapprochement est fait entre les « trônes-autels », appelés en Ewé « Togbi-zikpi ». « On distingue trois sortes de trônes ancestraux selon qu’ils sont consacrés aux ancêtres éponymes ou de lignage ou à l’esprit errant des guerriers frappés de mort violente sur le champ de bataille. Dans ce cas, les trônes sont appelés « Ava-zikpi » (ava : guerre). Pour Albert de Surgy, « le culte rendu sur le trône de guerre ne s’adresse nullement à l’ancêtre fondateur du trône et à ses descendants, mais à des esprits errants dont il a été responsable de la mauvaise fortune. C’est pourquoi il peut être institué du vivant même de l’ancêtre fondateur » », explique Comi Toulabor. Et d’ajouter : « Sarakawa rappellerait en le déformant le culte aux trônes de guerre et la philosophie qui le sous-tend. Comme dans le culte de Gu, il assimilerait la symbolique qui est à la base du culte aux trônes de guerre. Pourquoi ? Tout d’abord, Sarakawa est apparu comme un champ de bataille où le pouvoir aurait mené la guerre contre l’impérialisme et où il aurait libéré le peuple de son aliénation économique. L’ordonnance N°79-10 du 22 mars 1979 institue en effet le 24 janvier comme fête nationale de libération économique. Les 24 janvier 1963 et 1967, le général Eyadema aurait libéré politiquement le peuple togolais des mains de ses ennemis intérieurs qui sont les partis politiques ».
Mardi 24 janvier, les mêmes pratiques diaboliques se dérouleront tant à Lomé qu’à Sarakawa. Elles font partie intégrante de la survie du pouvoir.
R. Kédjagni
liberte-togo.com
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