Au Togo, l’institution militaire est la seule qui fonctionne assez correctement, avec une relative stabilité dans son organisation et dans ses structures. Même si ce n’est pas la première fois que j’affirme cela, certains seront surpris par une telle déclaration de ma part, et ils ont de bonnes raisons. Pour commencer, je donne les miennes, et elles sont factuelles.
Je respecte l’institution militaire, car elle est composée dans sa très grande majorité, de femmes et d’hommes de qualité engagés dans la défense de la patrie, avec courage, dévouement et patriotisme.
Je respecte l’institution militaire, car beaucoup de nos militaires projetés sur les théâtres d’opération à l’extérieur du Togo, sous l’égide de l’Onu, reviennent auréolés de reconnaissances par leurs pairs internationaux. C’est leur travail et leurs compétences qui forcent ces distinctions. Ils font honneur au Togo.
Je respecte enfin l’institution militaire, car, en dehors de quelques privilégiés qui jouissent d’une aisance matérielle, l’immense majorité de nos militaires a les mêmes conditions de vie que tous les autres Togolais qui croupissent dans la misère. Malgré cela, elle est prête au sacrifice suprême pour la sécurité des Togolais. Cela force mon respect et mon admiration.
Je me limite à ces quelques faits, même si je peux rallonger cette liste avec d’autres éléments tout aussi concrets. Et, à tous ceux de mes compatriotes qui font des reproches aux Forces Armées Togolaises (FAT) d’une manière générale, je leur réponds que je comprends leur motivation.
Je comprends cela, parce que des généraux ont posé des actes anticonstitutionnels en imposant leurs volontés au peuple, par la force des armes. Notamment en 2005, quand ils ont forcé la succession dynastique au prix d’un grand nombre de victimes, civils et militaires, toutes des Togolaises.
Je comprends les reproches faits globalement à l’armée, car depuis le temps du Général Gnassingbé Eyadéma, des éléments de cette armée sont instrumentalisés pour réprimer la population. Et cela se poursuit sous le règne de Faure Gnassingbé. Ce sont des choses qui marquent durablement un peuple et qui nourrissent ses récriminations.
Je comprends enfin le ressenti des Togolais à l’égard de l’armée, parce que sans la contribution de cette minorité de militaires qui constitue un solide pilier du pouvoir, le régime ne peut survivre depuis 56 ans en faisant souffrir les Togolais.
Là également, on peut énumérer d’autres faits, tout aussi avérés. Toutefois, malgré nos peines et malgré nos grandes souffrances, nous devons avoir le recul et la lucidité nécessaires, afin de faire la différence au sein de l’armée. En effet, nous devons distinguer cette minorité qui soutient et maintient la dictature en place, de l’immense majorité des militaires qui pâtit gravement de cette situation, comme le reste de la population civile.
C’est pour cela, que nous ne devons pas mettre tous les militaires dans le même panier, en jetant l’anathème sur l’ensemble de l’institution militaire. Si on peut comprendre que la colère nous y pousse, on doit néanmoins laisser la raison nous conduire au pragmatisme.
Ainsi, si la composante politique de la Nation, spécifiquement celle qui dirige le pays, n’est pas prête à œuvrer sérieusement pour renforcer la cohésion nationale, de peur que cela ne serve pas ses intérêts, alors, il revient aux autres composantes, notamment, le peuple et l’armée, de cesser de se regarder en chiens de faïence.
Dans ces deux composantes, nous devons agir en tant que citoyens, en renforçant les fondations de la cohésion nationale, avec une confiance mutuelle. Cette construction est un fondamental de la République, elle ne peut donc être dirigée contre personne. Bien au contraire, c’est cela que chaque citoyen doit promouvoir pour consolider notre Nation.
Voilà pourquoi, je respecte l’armée togolaise et j’invite mes concitoyens à en faire autant.
Gamesu
Nathaniel Olympio
Président du Parti des Togolais