Par Francisco Kossi Gbandi NAPO-KOURA
Depuis le 05 mars 2020, date mémorable de l’enregistrement du premier cas positif du Covid-19 au Togo, le gouvernement n’a eu de cesse de multiplier, au prix de nombreuses mesures économiques et sociales, des initiatives de toutes natures pour mitiger les risques de propagation de cette pandémie devenue une véritable hydre déjouant les pronostics de performance dans tous les secteurs. Cette pandémie de plus en plus sociale et socialisante a des conséquences désastreuses sur toutes les sphères de la vie humaine.
Dans l’incapacité d’élaborer une réponse immédiate et efficace face à la maladie et par mesure de prudence, craignant que les écoles deviennent très vite des foyers de contagion du Covid-19, le gouvernement togolais décidera, dès mars 2020, de la fermeture pure et simple de tous les établissements scolaires et universitaires (publics et privés). Trois mois plus tard, il était question de sauver l’année scolaire 2019-2020. Après plusieurs réunions, le gouvernement décide de la réouverture partielle et progressive des écoles à partir du 15 juin. Ayant expressément ciblé les classes d’examen (CM2, 3ème, 1ère, Terminale et toutes les classes d’examens professionnels de l’enseignement technique), cette réouverture partielle des établissements scolaires a permis, pas sans difficulté, de dérouler presque normalement tous les examens comptant pour l’année scolaire 2019-2020. A l’issue des différents examens déroulés et à l’analyse des résultats déjà disponibles, nous pouvons inférer que le Covid-19 n’a pas eu d’impacts négatifs sur les résultats scolaires au Togo, au contraire, les taux de réussite aux différents examens ont connu une hausse généralisée par rapport à l’année dernière.
En effet, en 2020, le Togo a enregistré 54,21% de réussite au BAC1, 63,1% au BEPC et 89,37% au CEPD contre respectivement, 49,92%, 60% et 78,54% en 2019 soit, respectivement, 4,18 points, 3,1 points et 10,83 points d’augmentation. Ces résultats, pour le moins, élogieux, en attendant celui du BAC II qui ne sera qu’une « copy-paste » des classes inférieures, n’ont pas suffi à rassurer la population quant à la capacité de résilience du système éducatif togolais face à la pandémie du Covid-19.
Le confinement n’a visiblement pas été contre-productif pour les résultats scolaires mais il n’est plus du tout toléré par les parents et les milliers d’élèves pour lesquels les vacances courent gracieusement depuis bientôt neuf mois pour les classes de passage.
Ennuyeuses, ces vacances interminables suscitent depuis un certain moment, des inquiétudes et interrogations chez les autorités gouvernementales et surtout chez les parents et les élèves/étudiants qui se demandent naturellement : A quand et comment envisager la rentrée scolaire 2020-2021 au Togo ? Le gouvernement, les parents et/ou les élèves sont-ils prêts pour une réouverture complète des écoles prévue pour cette fin du mois d’octobre?
Que de questions et d’inquiétudes, et pourtant, le gouvernement a fixé la rentrée scolaire 2020-2021 pour le 26 octobre prochain. Juste une date sans déclinaison de mesures concrètes devant favoriser un endiguement durable du Covid-19, insuffisant pour rassurer les populations. Surtout que le dernier rapport du Comité de riposte délivré par le Colonel Djibril le jeudi 08 octobre dernier continue de faire planer les menaces de couvre-feu de reconfinement sur la ville de Lomé et ses environs malgré les notes de satisfécit qui lèvent l’Etat de siège sur les préfectures de Sokodé, Bafilo et Sotouboua. Une riposte scientifique aurait voulu que le comité de riposte dispose d’une carte épidémiologique afin de mieux planifier les actions.
De nombreuses voix s’élèvent pour proposer un report de la rentrée scolaire, estimant notamment que le gouvernement ne démontre aucune capacité d’endiguement de la pandémie et de protection des apprenants (enfants) en milieu scolaire. D’aucuns estiment que rien n’a véritablement changé depuis la fermeture des établissements scolaires ; les contraintes qui ont justifié la fermeture des écoles en mars dernier étant toujours d’actualité.
C’est en plein cœur de ce carrefour du contraire que Mme Victoire Tomegah-Dogbe a été nommée Premier Ministre du Togo qui sera aidée dans ses tâches au niveau de l’éducation par les Professeurs Ihou Wateba en qualité de ministre de l’Enseignement supérieur et Dodzi Kokoroko (anciennement Président de l’Université de Lomé) pour le Ministère de l’Enseignement primaire, secondaire, technique et de l’Artisanat et qui doivent collaborer avec leurs collègue de la santé et bien évidemment le Comité de riposte. Ce dernier qui semble supplanter le ministère coiffé par le Professeur Mustafa Mijiyawa.
Nous estimons, après analyse, que si après tout ce temps de crise sanitaire, les conditions ne sont toujours pas réunies pour une réouverture sereine des écoles au Togo, le devoir nous appelle tous à faire des propositions pouvant aider à la prise de décisions efficaces et salutaires pour tous.
Nous sommes dorénavant appelés à vivre avec ce mal et le choix de la fuite en avant nous est préjudiciable pour l’avenir de notre pays et du continent dont les défis de l’émergence passent par l’éducation de la grande masse. Nous suggérons conséquemment d’éviter le report de la rentrée scolaire 2020-2021 annoncée pour le 26 octobre 2020. Cependant, pour une rentrée scolaire réussie au Togo, nous prescrivons au gouvernement togolais, l’observation des 12 mesures non exhaustives ci-après :
1. Définir et veiller au respect scrupuleux d’un ensemble de normes et dispositions référentielles d’organisation pratiques des classes scolaires ; statuant notamment sur les effectifs des élèves, la disposition des tables bancs, des élèves et des enseignants dans une salle de classe, etc. ;
2. Définir ou recadrer les horaires scolaires pouvant s’étaler de manière continue et par le jeu de la rotation des sous-classes d’élèves, de 6h45mn à17h00 (pour le secondaire) et de 7h30 et 17h00 (pour le primaire) ;
3. Postposer (remettre à plus tard) la rentrée préscolaire et affecter provisoirement les ressources dédiées (salles, bancs et enseignants) à l’enseignement primaire ;
4. Recadrer/revoir les programmes des matières : la contraction des contenus de certains enseignements s’impose ;
5. Suspendre provisoirement les enseignements non indispensables : il est judicieux, eu égard aux contraintes temporelles, de suspendre temporellement les enseignements facultatifs ou à fort risque de propagation du Covid-19 à l’instar de l’EPS, de l’enseignement ménager, etc. (à étudier au cas par cas en fonction des filières)
6. Créer une plateforme numérique éducative comprenant tous les programmes, cours et exercices donnant la possibilité aux parents ou élèves le souhaitant de faire suivre aux enfants les cours à domicile avec des évaluations (devoirs, compositions et examens) obligatoirement en présentiel dans les établissements où lesdits élèves se seraient préalablement inscrits ;
7. Renforcer les effectifs à travers le recrutement, former, outiller et motiver le personnel enseignant ;
8. Subventionner les frais de scolarité et les fournitures scolaires de tous les élèves (enseignements public et privé) pour soulager les difficultés financières des parents, exacerbées par la crise sanitaire ;
9. Renforcer le dispositif technique et matériel de dépistage et de lutte contre la propagation du covid-19 en milieu scolaire ;
10. Construire de nouveaux bâtiments scolaires et procéder à une occupation rationnelle (réaffectation des élèves) des bâtiments scolaires du centre-ville de Lomé dont plusieurs sont restées quasiment vides en raison de la mutation des populations vers les zones périphériques ;
11. Accentuer la recherche au plan local (universitaire) pour la découverte et la production a l’échelle des remèdes ;
12. Accompagner techniquement et financièrement les inspections et établissements scolaires (privés et publics) dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs projets/microprojets de riposte contre le covid-19 et d’adaptation spécifique de l’enseignement aux réalités du contexte (digitalisation et/ou toutes autres initiatives d’adaptations spécifiques de l’enseignement dans le contexte de la crise sanitaire).
Que fera exactement le gouvernement togolais pour la réussite de la rentrée scolaire 2020-2021 dans le contexte de la crise sanitaire du Covid-19 ? Nous ne le savons pas mais retenez cette assertion de Napoléon Bonaparte : « L’indécision est au gouvernement ce que la paralysie est au mouvement des membres ».
Source : Liberté