On ne les voit plus. Il y a quelques jours, le Premier ministre Victoire Tomégah-Dogbé a fait le bilan de ses 100 jours à la Primature et a soutenu que du travail se fait. Dans la réalité, le Togo est entré dans une ère d’inertie. Le boucan des ministres suite à leur nomination a fait place au silence.
«Nous n’avons pas de temps à perdre», disait Victoire Tomegah-Dogbé. Dans une interview accordée le 19 octobre 2020 à Radio France Internationale (RFI), Madame le Premier ministre dévoilait ses ambitions en sa qualité de cheffe du gouvernement. Elle expliquait aussi ce qu’elle voulait dire par « gouverner autrement », cette expression qui a fait le tour de la toile, à sa nomination en tant que première femme Premier ministre de Faure Gnassingbé. « Gouverner autrement, disait-elle, cela veut dire que vous devrez travailler pour démontrer des résultats. Donc cela nécessite de la cohérence, de la discipline, de la rigueur. Vous savez qu’à la fin du séminaire, chaque ministre s’est engagé sur sa feuille de route sur laquelle il sera constamment suivi et évalué, sur laquelle il va rendre compte aux populations togolaises ».
Pour réaliser cette « vision » de sa gouvernance, cette proche collaboratrice du chef de l’Etat a fait signer des engagements aux ministres, à l’issue d’un séminaire au cours duquel ils ont été briefés sur la feuille de route qui doit guider leurs actions. Comme galvanisés par la promesse d’une récompense intarissable, les ministres ont envahi l’espace médiatique, à l’image d’un troupeau de bœufs lâchés dans un pâturage dans le but de concourir pour le prix du meilleur brouteur d’herbe. Du matin au soir, les réseaux sociaux étaient inondés de messages de tel ministre et de tel autre. Chaque minute était précieuse et devrait être utilisée pour convaincre dame Tomégah-Dogbé du respect des consignes données. Les populations voyaient les ministres partout, même dans les rêves, tant ils sont devenus envahissants. Ils sont allés à la plage, au marigot, certains à la mare, d’autres sont allés balayer les rues, d’autres encore sont allés visiter les travaux en cours de réalisation. Tout le gouvernement était en ébullition. C’était du déjà vu qu’on tentait de présenter comme du jamais vu. L’essentiel, c’est de faire quelque chose, inviter les médias pour la couverture médiatique pour entendre citer son nom dans le journal. Il faut taper dans l’œil de Madame le Premier ministre.
Et le calme est très vite revenu dans la maison. Le boucan, le tapage médiatique n’a pas longtemps duré. Tout est redevenu calme, sûrement parce que les gens se tournent les pouces, ne sachant pas vraiment avec quoi s’occuper. En dehors de Victoire Tomégah-Dogbé qui se signalait beaucoup plus par son style vestimentaire que le travail qu’elle est censée abattre, les autres ministres sont restés dans leurs coquilles. Ils ne se signalent que lorsque les médias leur font l’honneur de les inviter sur leurs plateaux. Les rares à réussir à se rendre visibles, malgré l’inertie légendaire du gouvernement sont Christian Trimua, Dodzi Kokoroko, « Sa Majesté » Ihou Watéba et Payadowa Boukpessi. Ils sont régulièrement sous le feu des projecteurs, non pas parce qu’ils sont travailleurs, mais à cause des contre vérités qu’ils répandent et les polémiques qu’ils contribuent à alimenter à travers leurs sorties.
Malheureusement, le bilan des cent jours de règne de Victoire Tomégah-Dogbé et le tapage médiatique organisé autour pour faire croire qu’un travail se fait au Togo n’ont pas fait long feu. Quelques jours après, plus personne n’en parle. Ceux qui ont passé deux heures de leur existence à écouter le Premier ministre sont plutôt déçus. Pas déçus du fait que durant 100 jours, les gens ont passé le temps à organiser leur existence médiatique au lieu de travailler. La déception vient de ce qu’ils ont passé deux heures pour, au final, ne rien saisir de tout ce qu’a raconté l’ancienne ministre du Développement à la Base. La vérité c’est que rien ne semble bouger.
G.A. / Liberté