Les débats nourris de l’actualité commentent abondamment une certaine crise au sein de la coalition des 14 partis de lopposition. Les plus austères critiques vont jusqu’à prophétiser l’éclatement du groupe des partis politiques mettant au centre de la polémique les deux principaux leaders : Jean Pierre Fabre, Chef de file de l’opposition et Tikpi Atchadam, le Président du PNP, le cerveau de la relance des manifestations populaires.
Alors que les uns s’en félicitent et s’en frottent les mains, priant pieusement que la dislocation de l’opposition fasse belle affaire au pouvoir, plusieurs acteurs de cette opposition restent sereins et pensent que tout peut arriver, tout , sauf l’éclatement de la C14. Bonne nouvelle pour les partisans de l’alternance, coup dur pour les réactionnaires du pouvoir qui ont toujours joué sur les clivages au sein des unions de l’opposition pour reprendre la main. Mais la substance des malentendus reste simplement une question de stratégie de lutte pour atteindre l’objectif : arriver à bout d’un régime monarchique.
Gageons sur le gain et la perte en supposant que depuis le 19 aout 2017, le PNP de Tikpi Atchadam reste seul devant les manifestations populaires quil a déclenchées. Posons un autre postulat en supposant que le PNP n’avait jamais existé et que l’ANC maintienne sa pression sur le régime face à la détermination d’un peuple qui en a marre. Pesons les deux. Dans l’une ou l’autre alternative, le pouvoir sera sous pression.
Pour l’un ou l »autre cas, le pouvoir politique togolais pourra résister comme il le fait actuellement, ou céder selon les circonstances. Cette démonstration cartésienne permet simplement de démontrer que seul ou ensemble, la révolution populaire finit par renverser un pouvoir qui décide de tourner le dos au peuple. Et c’est la réalité. Dans l’histoire politique, ce sont les peuples qui se sont montrées déterminées. Aucune équation mathématique ne peut démontrer la stratégie la plus efficace et indiquée pour en arriver. Il y a sans doute des balbutiements, des erreurs, des dissensions et c’est dans l’harmonie de ces contraires que naît la véritable révolution qui fini par faire tomber la dictature.
Lorsque l »on analyse la supposée crise qui secoue la coalition des partis politiques de l’opposition, l’on ne devrait pas s »en étonner, lorsqu’on sait qu’il s’agit de 14 entités disparates qui ont décidé de mettre leurs individualités en veilleuse pour oeuvrer dans l’unicité d’action. Les incompréhensions sont donc inévitables.
Mais ce qui est certains donc aujourd’hui est que, face à la publicité gratuite qui s’alimente autour de la question de malentendu, la cohésion règne sur l’essentiel. Le départ de Faure Gnassingbé, thématique, qui reste l’objectif du peuple incarné par la coalition.
Au sein de la C14, tous ne sont pas bons, tous ne sont pas purs. Il y en a qui nourrissent des ambitions, quitte à saboter, à s’interposer, à vendre la mèche ou à créer de la zizanie au service du pouvoir. Mais, ceux là feront long feu, face à la détermination et à l’esprit sacré qui règne.La semaine dernière, le représentant du PNP, Tchatikpi Ouro Djikpa appelait à de nouvelles marches de la coalition.
C’est comme d’habitude, lorsqu’après une réunion, les 14 décident de la marche, chacun en son sein appelle à la mobilisation. Sauf que l’esprit de la marche n’était pas calé de façon aussi définitive. Personne dans le groupe n’était opposé à continuer à manifester. Mais la pomme de discorde se situait donc à l »opportunité de la marche dans le temps et dans l’espace.
Pour l’ANC, il faudra obéir à la volonté du médiateur de suspendre les manifestations pour lui donner le temps de mener les consultations afin de s’engager dans le fond du sujet.
Position partagée par d’autres leaders.
Le PNP a pour terrain de prédilection la marche. Normal que ce parti s’impose dans le retour aux manifestations, étant donné que le pouvoir politique semble profiter de la trêve des manifestations pour non seulement poursuivre son lobbying diplomatique et économique dans un Etat tombé en disgrâce sur tous les plans, mais aussi de continuer à provoquer l’opposition dans un processus électoral inapproprié.
L’une et l’autre des préoccupations restent dans la logique stratégique et aucun des porteurs de ces stratégies na besoin de se faire corrompre pour la soutenir. Ce qui revient à conclure que Fabre de l’ANC et Tikpi Atchadam du PNP s’engagent dans une même direction avec des sens différents, ce qui est normal dans la définition de stratégie politique.
C’est vrai, la marche aujourd’hui constitue la pomme de discorde. C’est vrai, le leadership peut nourrir une certaine division. C’est encore vrai, chacun a un agenda caché, mais depuis près de huit mois déjà, et c’est inédit, les partis politiques de l’opposition protègent le seul et unique objectif. L’alternance. L’opposition a réussi à maintenir le peuple dans cette revendication et le peuple reste déterminé. Aucune trahison ne sera tolérée, aucune défection non plus. Ce qui revient à conclure que toute erreur d’un parti de ‘l’opposition sera synonyme de suicide politique.
C’est ce qui se traduit dans la satisfaction de certains sbires du pouvoir qui, se réjouissant intérieurement de la situation inventée et amplifiée de crise au sein de la coalition satisfont dans les névroses leur désir de voir la C14 se disloquer.
L »heure n’est pas encore venue et d’après nos informations, Jean Pierre Fabre, autant Tikpi Atchadam restent dans le mouvement unitaire de faire aboutir la lutte.
Les autres partis politiques resteront de gré ou de force dans la danse. Pile ou face. Normal que cela fasse rougir.
Carlos Ketohou
Source : L’Indépendant Express N°444 du 20 mars 2018