La nouvelle loi fondamentale indûment imposée aux Togolais passe très mal. Autant sur la procédure par laquelle elle est imposée que l’”illégitimité” du parlement actuel qui légifère sur la question, les opposants à la nouvelle constitution se comptent dans tous les rangs. Pour l’économiste togolais et Commissaire chargé de l’Agriculture, des ressources en eau et de l’environnement à l’Uemoa, sur le principe du droit et de l’opportunité, dit NON à cette révision constitutionnelle.
Partis politiques, organisations de la société civile, juristes, artistes, bref, la liste des opposants à la nouvelle constitution s’allonge. L’opposition vent debout contre la nouvelle constitution. Les dénonciations et les moyens d’actions pour faire échec à ce que d’aucuns appellent “coup d’état constitutionnel” se multiplient. Depuis l’étape du projet de loi, à l’étape actuelle de relecture en passant par le vote clandestin de la nouvelle constitution, les contestations se font vives. Elles sont insistantes sur les questions de l’opportunité à changer de constitution, de la violation de l’article 59 de la constitution de 92, de l’absence de débat sur cette phase cruciale de la vie de la nation.
“Je suis contre cette réforme constitutionnelle, sur le plan du principe et sur le plan de l’opportunité “, a clairement affiché le Prof Kako Nubukpo à RFI.
Et d’argumenter que la loi fondamentale d’un pays étant le “contrat social, le ferment du vivre ensemble, un contrat stabilisé (…) On prend un risque en le déstabilisant.”
A travers cette nouvelle constitution, le Togo quitte le régime présidentiel pour celui parlementaire. Pour beaucoup d’observateurs avertis, ce changement de régime ne rassure guère de la “stabilité” du pouvoir, mais nécessite un débat préalable et une pédagogie de la réforme.
Le régime parlementaire, la pierre angulaire autrefois rejetée…
Le régime parlementaire auquel aspire désormais le pouvoir en place depuis bientôt 50 ans se définit comme une collaboration des pouvoirs entre le corps législatif (le Parlement) et le corps exécutif (le gouvernement). Dans ce régime, le gouvernement (premier ministre) n’est pas élu directement; il doit son pouvoir au soutien des députés du Parlement élus lors des élections législatives.
Ce n’est pas une nouvelle trouvaille pour le Togo. Le régime parlementaire avait déjà été proposé dans les années 90. “Je ne suis pas sûr que ceux qui veulent ce régime maintenant vont le mettre correctement en pratique. Puisque des régimes précédents, on attend toujours le conseil économique et social, depuis 1992, la cour des comptes n’a traduit personne en justice, on appelle des ministres à l’assemblée qui ne répondent pas… Ce changement sera sur papier comme tous les instruments que le Togo a signé “, a indiqué pour sa part, le Professeur Magloire Kuamvi Mawulé Kuakuvi.
Et au Prof Michel N’buéké Adovi GOEH-AKUE de renchérir : ” Au Togo, nous avons déjà tout essayé. Nous avons même essayé le régime parlementaire. Cela n’a pas marché parce que le pouvoir militaire derrière à tout cassé. Et c’était ça à la sortie de la conférence nationale. Par conséquent, nous pensons que le tripatouillage, c’est non”.
Pour lui, “c’est au peuple de déterminer le modèle du régime souhaité”.
Cependant, il n’est nulle part avéré que le régime parlementaire est plus stable que régime présidentiel ou semi présidentiel. Pour preuve, le Prof Kako Nubukpo rappelle les tourmentes de la quatrième République en France. ” Ce régime fut un parlementaire et le régime le plus instable qu’on ait connu”. C’était un régime avec des coalitions qui se faisaient et se défaisaient”, prévient-on.
L’opportunité de changer de constitution, la question est sur toutes les lèvres. La Vème République offrira telle aux togolais, des réponses pérennes à leurs légitimes aspirations ? L’accès à l’eau potable, à l’électricité en continu, le droit à des hôpitaux et à des écoles dignes, le droit au travail des jeunes, la protection des populations du Nord contre le terrorisme et bien d’autres restent et demeure pour les togolais, l’unique réforme qui en vaut la peine.
Source: lalternative.info; vidéo: RFI