Les 13 et 14 novembre 2020, le Président de la transition du Mali, Bah N’Daw était en visite au Togo. Une visite qui se veut la première du genre à l’étranger depuis son accession, au lendemain du putsch qui a déposé le Président Ibrahim Boubacar Keïta. Si officiellement la visite de premier malien est décrite comme une visite dite d’amitié et de travail, elle cacherait parallèlement mal, des raisons plutôt bien inavouées.
Curieux rapprochement entre Lomé et Bamako
Si officiellement, ce séjour à Lomé du Président de la Transition malienne, pris pour la première étape d’une tournée sous-régionale, a été marqué par des rencontres de haut niveau et des visites de terrain, il n’en demeure pas moins vrai, selon le confrère Afrique Intelligence, basé à Paris, qu’il s’agirait, en réalité, d’une consécration de plus de trois mois et demi de très discrets contacts entre les nouveaux hommes forts de Bamako et la présidence togolaise. Selon notre confrère, dans sa parution du jeudi 19 novembre 2020, abondamment relayée par d’autres confrères togolais, les premiers contacts avec Lomé remontent au 20 août 2020. Ceci, par l’intermédiaire du numéro deux du CNSP, Malick Diaw, du haut de son statut de Chef de la diplomatie de la Junte, a organisé une discrète conversation téléphonique entre le leader des officiers putschistes, Assimi Goita – aujourd’hui vice-président de la transition et le Chef de l’Etat togolais.
Suivra quelques jours plus tard, le débarquement discret à Lomé, d’une délégation du CNSP. Composée des Colonels Diaw et Ismaël Wagué, la délégation qui a effectué le déplacement à bord d’un jet affrété par la présidence de la République du Togo a, d’après le confrère, passé la soirée en compagnie de Faure Gnassingbé et de son ministre des affaires étrangères, Robert Dussey. Une première visite suivie d’une seconde à la fin du mois d’août. Ce, « alors que les relations de la junte avec la Cedeao étaient au plus mal et que l’organisation régionale était sur le point d’ostraciser Bamako, déjà sous le coup de sanctions », rapporte Africa Intelligence.
Dos au mur, les jeunes putschistes maliens auraient sollicité l’appui mais surtout les conseils du président togolais qui n’a pas manqué d’étayer ses conseils de son expérience personnelle.
A la suite de ces deux visites, ce fut le tour du ministre togolais Robert Dussey de se rendre à Bamako. « Arrivé en jet aux couleurs de la présidence togolaise, l’ancien conseiller diplomatique de Faure Gnassingbé a été exfiltré dès son arrivée sur le tarmac de l’aéroport de Bamako-Modibo Keïta-Senou vers le camp militaire de Kati, où le CNPS avait pris ses quartiers. Une opération fantôme qui a été renouvelée une seconde fois quelques jours plus tard, là encore sans que rien ne filtre », écrit le confrère.
Robert Dussey s’est, à chaque fois, entretenu avec le président du CNPS, Assimi Goita, et son numéro deux, Malick Diaw. Il a notamment tenté de les convaincre de prendre davantage en considération les recommandations de l’Ua. Ce qui se fera après avec les organes de transition mis en place, mais toujours animés par des hommes de mains.
Les rôles incestueux de Lomé
De ces révélations du confère Afrique Intelligence, se dégage un constat pour le moins si curieux. Celui du rôle incestueux que joue le Togo dans la sous-région ouest africaine.
En effet, par ces récits d’un journal qui se veut la jumelle, en termes Éditorial et d’investigations, de La lettre du Continent, un confrère généralement bien introduit dans les palais présidentiels avec des secrets croustillants, l’on comprend, dès lors, pourquoi Lomé constitue une étape cruciale de la tournée du président de la transition malienne dans la sous-région ouest africaine.
Les détails des rapprochements, mouvements et conciliabules entre Lomé et Bamako depuis le lendemain du coup d’État, tels que décrits par le confrère, dénotent, à l’analyse, que les services d’État français ont certainement mal pris cette démarche de Lomé. Et de bonnes raisons d’ailleurs lorsqu’on connait les relations visiblement tumultueuses entre Lomé et Paris depuis l’arrivée de Macron. En effet, outre le ministre Jean Yves Le Drian qui a effectué un bref séjour de quelques heures à Lomé, pour des raisons sécuritaires et surtout commerciales, le Président français a longuement snobé le Prince de Pya, dans toutes ses interventions jusqu’ici.. En témoigne sa dernière interview accordée au confrère Jeune Afrique où il a passé en revue, la gouvernance politique dans la sous-région sans un mot placé sur le Togo de Faure Gnassingbé qui est, pourtant, à son quatrième mandat. Un mandat de trop pour lequel Macron n’a toujours pas adressé ses félicitations à Faure, si ce n’est un courriel dont l’authenticité est jusqu’alors remise en cause. C’est donc une certitude. L’axe Lomé-Paris, n’est pas au mieux de sa forme.
Lomé, un hérisson
À ce climat de méfiance, vient de s’ajouter la posture de taupe qu’adopte Faure vis-à-vis de ses collègues de la sous-région, partant du cas Mali. En effet, les révélations telles que faites par le confrère Afrique Intelligence induisent que pendant que le Président Ouattara tenait la ligne dure aux jeunes putschistes maliens, Faure Gnassingbé, lui, ricanerait face aux répliques du Président Bissau Guinéen Omaru qui, ne s’inscrivant pas dans le discours de la CEDEAO, taclait ouvertement ses homologues de la Côte d’Ivoire et de la Guinée Conakry.
Un comportement de Lomé qui est à l’antipode des normes de confiance et de loyauté. Une attitude aux allures d’ingratitude et de défiance qui devrait logiquement être mal prise par la CEDEAO et ses dirigeants qui ont pourtant permis à Faure de décrocher son 4e mandat. Et ce malgré la force du tsunami déclenché le 19 août 2017.
Et ces comportements de barbouze sont légion de la part du pouvoir de Lomé de père à fils. On se souvient combien ène fois le nom de Lomé a été cité dans des dossiers des plus vicieux contre ses voisins de la sous-région comme :
- l’affaire du bateau Pitea arrêté en Guinée bissau avec des tonnes de cargaison de drogues,
- l’affaire des hélicoptères souscoille dans la crise ivoirienne contre Gbagbo pendant que Lomé était médiateur dans cette crise,
- les spéculations sur des éléments des Forces de défenses et de Sécurité togolaises qui auraient franchi la frontière burkinabé pour soutenir la tentative du coup d’État du Général Diendéré en 2015…
Aujourd’hui, tout porte à croire que Faure Gnassingbé a tourné le dos à ses homologues bienfaiteurs qu’il snobe royalement au détriment des jeunes putschistes. Et c’est en ce sens que Lomé serait pris raisonnablement pour un hérisson. Mieux, un véritable danger pour tous les dirigeants de la sous-région. Tel un serpent à deux têtes qui mordrait tout le monde, après qu’on l’ai sauvé de la boue pour le zoo, et ce, au gré de ses intérêts. Et c’est bien dommage !
Source : Fraternité