BRUXELLES – La Belgique sort de la crise politique la plus longue de son histoire avec la formation d’un gouvernement de coalition dirigé par le socialiste francophone Elio Di Rupo, qui ne bénéficiera d’aucun état de grâce face aux marchés et à la pression des indépendantistes flamands.
M. Di Rupo, 60 ans, premier francophone à diriger un gouvernement en Belgique depuis plus de 30 ans, devait présenter dans la soirée au roi Albert II la composition d’une équipe resserrée de 13 ministres et de 6 secrétaires d’Etat, contre 15 ministres et 7 secrétaires d’Etat pour l’exécutif sortant.
Dix-huit mois après la chute du gouvernement dirigé par le démocrate-chrétien flamand Yves Leterme et 540 jours après les élections législatives du 13 juin 2010, il a fallu une dernière négociation marathon de 20 heures pour que les six partis appelés à composer la coalition s’entendent sur la répartition des portefeuilles.
Celle-ci devrait être officialisée à l’issue de l’entrevue d’Elio Di Rupo au palais royal, prévue à 21H00 (20H00 GMT), mais les médias belges présentaient comme certaine une liste de ministres où les changements sont peu nombreux par rapport à l’équipe sortante.
Seule différence notable avec l’équipe d’Yves Leterme, les socialistes flamands, dans l’opposition jusqu’ici, rejoignent dans la majorité les socialistes francophones et les libéraux et démocrates-chrétiens, tant flamands que francophones. Les Verts et les nationalistes flamands restent dans l’opposition.
Le principal changement consiste en un échange de portefeuille entre le libéral francophone Didier Reynders, qui céderait les Finances, poste qu’il occupe depuis 1999, à l’actuel chef de la diplomatie, le démocrate-chrétien flamand Steven Vanackere. Didier Reynders, l’un des doyens des cénacles européens, conservera donc un poste à forte visibilité internationale avec les Affaires étrangères.
D’autres ministres clés du dernier exécutif conserveront leur fonctions, à l’instar de la socialiste francophone Laurette Onkelinx, confirmée aux Affaires sociales et à la Santé, ou du démocrate-chrétien flamand Pieter De Crem, maintenu à la Défense.
D’autres ministres en vue changent d’attributions: l’ancienne présidente des centristes francophones et ministre de l’Emploi, Joëlle Milquet, passe à l’Intérieur, tandis qu’un autre centriste, Melchior Wathelet, obtient un secrétariat d’Etat chargé de l’Energie, de l’Environnement et des Transports.
Les libéraux flamands de l’Open VLD, le parti le plus à droite du futur gouvernement, aura en charge la Justice, les politiques de l’Asile et de l’Immigration, ainsi que les Pensions.
Le nouveau cabinet devrait prêter serment mardi devant le roi. Elio Di Rupo présentera ensuite sa déclaration de politique générale devant les députés mercredi, à temps pour assister jeudi et vendredi au sommet de l’Union européenne à Bruxelles.
Arrivant au pouvoir à un moment où partout en Europe la gauche est à la peine, Elio Di Rupo a réussi à forger des compromis entre Flamands et francophones que beaucoup pensaient inaccessibles. Mais il ne devrait pas pour autant connaître d’état de grâce.
Ce francophone qui maîtrise mal le néerlandais, la langue de 60% de la population belge, doit encore convaincre les Flamands qu’il peut mener à bien les réformes économiques et la décentralisation accrue, actées dans l’accord de gouvernement.
Le chef des indépendantistes flamands, Bart De Wever, grand vainqueur des élections en Flandre mais repoussé dans l’opposition, a répété lundi qu’il ne considérait pas M. Di Rupo comme un Premier ministre légitime, sa coalition n’étant pas soutenue par une majorité de députés flamands.
M. Di Rupo devra également mener une politique d’austérité sans précédent, afin de réduire une dette publique dont le montant astronomique inquiète les marchés et alors que les syndicats, qui ont organisé vendredi une grande manifestation contre la rigueur, menacent d’organiser des grèves générales dans les prochains mois.
source : AFP
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