Un rapport conjoint de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) tire la sonnette d’alarme sur la répression brutale des manifestations pacifiques organisées à Lomé les 5 et 6 juin derniers.
Le document fait état de violences policières, d’arrestations arbitraires, de mauvais traitements et de graves atteintes aux droits fondamentaux, visant aussi bien des manifestants que des journalistes et défenseurs des droits humains.
Selon le rapport, au moins 81 personnes ont été arrêtées au cours de ces deux jours de mobilisation contre la réforme constitutionnelle, les difficultés économiques croissantes et la détention prolongée de figures de la société civile, notamment le rappeur Aamron.
Parmi les personnes interpellées figurent un mineur et plusieurs défenseurs des droits humains. Le rapport détaille des traitements inhumains infligés à certains détenus : gifles, coups de matraques, aspersions d’eau, y compris durant leur garde à vue. Plusieurs ont été emmenés dans des commissariats sans pouvoir contacter leur avocat ou prévenir leur famille, en violation flagrante du droit togolais.
Trois personnes ont été inculpées pour « troubles aggravés à l’ordre public », mais les avocats dénoncent de nombreuses irrégularités procédurales, allant de l’interdiction d’accès aux clients jusqu’à la détention de mineurs avec des adultes et de femmes avec des hommes.
La répression n’a pas épargné les professionnels des médias. La journaliste Flore Monteau, correspondante de TV5 Monde, a été interpellée et contrainte de supprimer les vidéos qu’elle avait filmées, sous la pression des forces de l’ordre.
L’Observatoire attire également l’attention sur des cas de détention jugés « préoccupants », notamment celui du rappeur Aamron, interné depuis le 26 mai dans un centre psychiatrique sans décision de justice ni accord familial, et celui du cybermilitant Affectio, emprisonné depuis cinq mois malgré des appels répétés des Nations unies à sa libération.
Ces faits s’inscrivent, selon le rapport, dans une tendance persistante au Togo : arrestations arbitraires, intimidations, détentions prolongées sans jugement. L’Observatoire rappelle, à cet égard, la disparition de membres du mouvement Nubueke en 2017 et les arrestations de figures de la société civile dans les années passées.
Face à cette situation, l’Observatoire exhorte les autorités togolaises à libérer immédiatement toutes les personnes arrêtées pour avoir manifesté pacifiquement, garantir l’intégrité physique et mentale des personnes détenues, enquêter sérieusement sur les allégations de violences policières, mettre fin aux poursuites contre les journalistes et défenseurs des droits humains, réformer la législation sur les manifestations afin de la conformer aux normes internationales.
Enfin, les organisations signataires rappellent que le Togo est partie à plusieurs traités internationaux relatifs aux droits humains, et qu’il est tenu de respecter ces engagements.
Ce rapport vient renforcer les inquiétudes exprimées depuis plusieurs années par les organisations nationales et internationales sur le rétrécissement de l’espace civique au Togo.