En conférence de presse ce mercredi 10 janvier 2024, l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) est revenue sur la question de la fin de mandat des députés, le découpage électoral et la fiabilité du fichier électoral en vue des élections législatives et régionales prévues avant la fin du premier trimestre de l’annee.
Des questions qui préoccupent la formation politique dirigée par Jean-Pierre Fabre depuis quelques mois
CONFERENCE DE PRESSE
Déclaration liminaire
L’ANC demeure préoccupée par la fin de mandat de l’Assemblée nationale, le respect de la Constitution, le découpage électoral et le fichier électoral
L’objet de la présente conférence de presse est d’éclairer l’opinion nationale sur les principaux enjeux de l’heure en relevant les circonvolutions auxquelles se livre le pouvoir en place pour perpétrer un énième coup de force électoral au lieu de favoriser, pour une fois, une amélioration effective du cadre électoral de notre pays.
L’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) est vivement préoccupée par la fin du mandat de l’Assemblée nationale, le 31 décembre 2023. En effet, cette situation rend illégitime et illégale le gouvernement actuel qui est issu de la majorité parlementaire et qui ne peut plus désormais mener aucune action ou prendre une décision majeure qui ne provienne d’un consensus de la classe politique. L’ANC veut aussi, en raison de la tournure que prennent les questions du découpage électoral et du fichier électoral, attirer l’attention du gouvernement sortant et de la classe politique sur l’impérieuse nécessité de s’en tenir au strict respect de la Constitution et des Lois de notre pays.
1) La fin de mandat de l’Assemblée nationale emporte la caducité de la majorité parlementaire et, subséquemment, celle du gouvernement
Le mandat des députés de la troisième législature a pris fin le 31 décembre 2023.
Conformément à l’article 52 de la Constitution, les élections législatives auraient dû se tenir « dans les trente jours précédant l’expiration du mandat des députés’’. Ce qui veut dire en clair, entre le 1 et le 31 décembre 2023. La non tenue des législatives dans les délais constitutionnels enlève aux députés la légitimité que leur a confiée le peuple et rend caducs la majorité parlementaire ainsi que le gouvernement issu de cette majorité. Lesquels, tous les deux, perdent également toute légitimité. Ce qui fait que notre pays n’a plus qu’un gouvernement de fait.
Au total, n’ayant plus de légitimité, l’Assemblée nationale et le gouvernement ne peuvent plus agir légalement au nom du peuple togolais. En conséquence, faute d’un consensus de la classe politique autour d’un accord politique, aucun acte gouvernemental ne saurait désormais s’imposer au peuple togolais.
Voilà pourquoi l’ANC appelle à une organisation consensuelle des élections régionales et législatives prochaines.
L’ANC en appelle particulièrement au Chef de l’État pour favoriser des discussions politiques ouvertes, sincères et positives, visant notamment l’amélioration du cadre électoral, en vue de l’organisation d’élections équitables et transparentes qui garantissent la quiétude sociale dans un Etat de droit.
2-Pour être conformes à la Constitution, le découpage électoral pour les élections législatives doit obligatoirement être fondé sur le poids démographique de chaque circonscription électorale.
Le gouvernement, à la suite de la 12e séance du CPC, a envoyé à l’Assemblée nationale, le 18 décembre 2023, un projet de loi dans lequel il prétend qu’un consensus aurait été trouvé par la classe politique, pour porter le nombre de sièges de députés à 117.
Ceci ne correspond nullement à la réalité puisque l’ANC, par lettre en date du 18 décembre 2023 adressée au ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et du Développement des territoires (MATDDT), faisant comprendre à celui-ci que la demande faite aux partis politiques de faire des propositions de découpage était inopportune, car le découpage proprement dit ne doit être effectué qu’une fois le nombre de députés fixé à travers une loi organique, conformément à la Constitution.
Dans sa lettre, l’ANC a rappelé qu’il faudra déterminer le quotient de représentativité nationale des députés, une fois que leur nombre aura été fixé. L’ANC a appelé à la mise en place, au sein du CPC, d’une commission à laquelle elle se propose d’être membre pour examiner la proposition de découpage du gouvernement afin de contribuer aux aménagements éventuels permettant d’assurer la conformité avec les dispositions Constitutionnelles.
Rappelons que le 4 décembre 2023, l’ANC a saisi la CNDH pour qu’elle constate la violation des droits de l’homme qui découle du découpage électoral en vigueur. Contre toute attente, cette requête est rejetée au motif qu’elle contiendrait des propos outrageants vis-à-vis de l’administration pourtant auteur des violations des droits des citoyens ainsi que de la Constitution.
Rappelons en outre, qu’en réponse à une requête sur la même question, introduite par le Front Citoyen Togo Debout, une organisation de la société civile, la même CNDH a, dans sa décision rendue le 22 décembre 2023, se basant fondamentalement sur l’étude de l’ANC, affirmé : « …les préoccupations relatives au découpage en vigueur sont réelles et récurrentes ». On comprend dès lors qu’un nouveau découpage devient inévitable et devra nécessairement respecter la loi.
Il importe de noter toutefois que la CNDH a visiblement biaisé sa recommandation en appui à ses conclusions quant au nouveau découpage. En effet, tout en reconnaissant et en justifiant le bien-fondé du critère démographique qui permet de respecter les articles 2 et 11 de la Constitution, la CNDH tente subrepticement d’exhiber le critère géographique qu’elle propose de combiner avec le critère démographique sans pouvoir en donner aucune base légale, ni constitutionnelle. Parce qu’il n’y en a pas
La référence faite aux découpages électoraux d’autres pays n’est pas recevable d’autant plus que ces découpages reposent sur les lois des différents pays. Au Togo, les critères géographiques et communautaires sont pris en compte au parlement par le Sénat qui est l’émanation des collectivités territoriales.
Voilà pourquoi l’ANC demande à l’ensemble de la classe politique togolaise de faire un examen approfondi de la Constitution togolaise en la matière, avant d’avancer des propositions qui sortent du droit en laissant entiers les problèmes d’inégalité et d’iniquité que le nouveau découpage électoral doit permettre de régler.
En réalité, la proposition « une commune, un député’’ que veulent nous vendre le RPT/UNIR et ses amis viole la Constitution de notre pays puisque les 117 communes n’ont pas le même poids démographique. Si une telle proposition venait à être retenue, cela signifierait que ceux qui l’ont proposée accompagnent le régime dans sa propension à violer les lois de la République, ce qui créerait encore plus de disparités dans le découpage et cristalliserait la création de Bantoustans en terre togolaise, comme dans le système d’Apartheid jadis en Afrique du Sud.
3) Le fichier électoral manque de fiabilité et demeure inconstitutionnel du fait du refus de la CENI d’inscrire des milliers de concitoyens consacrant ainsi, une violation flagrante de leurs droits
L’ANC continue de réclamer que la CENI revienne enregistrer les nombreux concitoyens qu’elle a abandonnés sans les enrôler, en violation des articles 44 et 45 du Code Electoral afin d’établir un fichier électoral correct et consensuel.
On se souvient que la CENI avait invoqué faussement un standard international pour refuser d’enrôler des milliers de personnes qui étaient dans les files d’attente quand la CENI a arrêté l’opération en signifiant qu’elle a déjà enregistré la moitié de la population.
Or, à l’épreuve de ce standard et selon les statistiques de la CENI elle-même, plus de la moitié de la population ont été enregistré dans toutes les régions à l’exception de la région maritime pour laquelle ces statistiques font ressortir qu’il manque au moins 22.470 personnes (cf. tableau ci- dessous) pour atteindre la fameuse norme internationale!
L’ANC sur le sujet a saisi le 05 janvier 2024 la CNDH pour qu’elle constate cette violation par la CENI, du droit des citoyens à figurer sur la liste électorale et à se porter candidats aux élections
4) Achats de conscience et autres actes de corruption
L’ANC constate avec réprobation que les dirigeants du parti RPT/UNIR, le chef de l’État lui-même en tête, ont pris d’assaut l’ensemble du territoire et se livrent à des activités de corruptions et d’achats de conscience par la distribution de vivres et de non-vivres à des populations paupérisées à dessein et survivant dans la misère et le dénuement.
L’ANC dénonce et condamne ces actes répréhensibles qui sont prévus et punis par la Loi, en période de pré-campagne et de campagne électorales.
L’ANC appelle les populations togolaises à demeurer vigilantes pour ne pas se faire berner par ce régime prédateur qui pense acheter les Togolaises et les Togolais avec un bol de riz et une boite de sardines à l’huile, après les avoir affamés pendant plus de 60 ans.
5) Modifications unilatérales des lois et règlements électoraux à moins de 6 mois des élections
L’ANC rappelle que la convention de la CEDEAO sur la démocratie et son protocole additionnel auxquels le Togo est partie, imposent « qu’à 06 mois des élections, il n’est pas possible de changer les lois sur les élections a moins d’avoir le consensus de tous les acteurs ».
L’ANC engage les autorités togolaises à prendre leurs responsabilités pour ne plus violer les textes et les principes de la CEDEAO, comme ce fut le cas en 2019 lorsque, en pleine campagne électorale pour les élections communales, la loi sur la décentralisation a été révisée et adoptée à l’Assemblée nationale par le seul RPT/UNIR et ses amis, puis aussitôt promulguée et mise en vigueur.
6) Institutions, prisonniers politiques, exilés volontaires ou contraints, libre exercice des activités des partis politiques sur l’ensemble du territoire national
A sa dernière conférence de presse, le 08 décembre 2023, I’ANC a également exprimé des préoccupations relatives à la situation d’illégitimité et d’illégalité des institutions de notre pays, notamment celles concernées par les processus électoraux. L’ANC réitère les mêmes préoccupations et appelle la diligence du gouvernement sortant pour accélérer le règlement des cas comme ceux de la CENI et de la Cour Constitutionnelle.
De plus, l’ANC considère que la veille des élections et de surcroît le début de la nouvelle année sont une occasion propice à la création d’un climat d’apaisement sociopolitique permettant la libération des prisonniers politiques, le retour sans crainte de tous les exilés volontaires ou contraints, la levée définitive des inculpations dans l’affaire des incendies des marchés de Lomé et de Kara, l’ouverture de discussions structurées en vue du dédommagement conséquent de toutes les victimes des incendies des marchés. En conséquence l’ANC appelle le gouvernement sortant à initier dans ce sens, toute mesure pertinente.
Au demeurant, les Togolaises et les Togolais vivent mal de voir leur Chef d’Etat s’auréoler de grandes médiations dans tous les sens, obtenant la libération de 49 prisonniers par-ci et celle du fils d’un ancien président par-là, alors que dans son propre pays, nombre de ses compatriotes, d’opinion politique divergente, croupissent toujours en détention.
En outre, l’ANC engage le gouvernement sortant à instruire le Ministre de l’Administration Territoriale, le Ministre de la Sécurité et de la Protection Civile, le Ministre de la Défense Nationale et des Anciens Combattants, les préfets, les autorités municipales et les chefs traditionnels, à s’astreindre au respect rigoureux de la Loi portant Charte des partis politiques ainsi que de la Loi portant statut de l’opposition, notamment en vue d’assurer et de protéger le libre exercice des activités des partis politiques sur toute l’étendue du territoire national
Enfin, l’ANC tient à rappeler que la situation institutionnelle créée par la fin du mandat de l’Assemblée nationale fait obligation au pouvoir en place et à la classe politique d’œuvrer de concert et ce, jusqu’à meilleure fortune, dans un cadre de discussions et de décisions politiques où le consensus doit prévaloir,
Fait à Lomé, le 10 janvier 2024
Pour le Bureau National
Le Président National
Jean-Pierre Fabre