Interview exclusive de Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson « On peut organiser des élections locales dans les trois mois à venir si on le veut »


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Depuis plus de 25 ans le Togo n’a plus organisé des élections locales. Acculée le gouvernement aurait sortie la carte du partage des délégations spéciales aux partis politiques lors d’une concertation engagée à leurs intentions. Une proposition qui a suscité un tollé dans l’opinion obligeant le ministre de l’administration auteur de la proposition à la ravaler. La CDPA, membre de la Coalition « Arc-en-ciel », a participé à ces séances. Son secrétaire général par intérim est Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson, clarifie la position de son parti et partant de celle de la Coalition. Elle revient également sur d’autres sujets d’actualité dans cette interview exclusive qu’elle a accordée à la rédaction de Togoactualité.com. Lecture

TOGO ACTUALITE : À la sortie de la concertation que vous avez eue avec le ministre de l’administration territoriale, une polémique s’est enflée dans la presse nationale au sujet d’une proposition que le ministre vous aurait faite. Comment comprenez-vous cette polémique ?

Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson : Je ne sais pas, je ne sais pas comment cette polémique est née, ce que je sais c’est que j’ai vu un article sur koaci.com qui insinuait que certains partis politiques auraient accepté une proposition qui leur aurait été faite de renouveler la composition des délégations spéciales de manière à ce que les représentants de l’opposition y participent tandis que d’autres notamment le CST aurait refusé. Alors moi j’avoue que ce premier article qui est sorti après les concertations m’a mise hors de moi parce qu’en insinuant que certains partis politiques auraient accepté d’en faire partie, dans ces partis là on pourrait tenter d’englober « Arc-en-ciel ». Alors j’ai jugé bon de devoir réagir, de dire ce qui y est. Ce qui y est vraiment c’est qu’on a été invité et reçu. Le pouvoir à essayer de nous montrer qu’il y a encore beaucoup de problème à résoudre avant d’organiser des élections locales et donc a laissé entendre qu’il y a eu une convergence de vue sur une solution qui pourrait être de revoir la composition des délégations spéciales afin de répartir les membres entre l’opposition et le pouvoir.

Je n’y étais pas personnellement mais ce que je sais la CDPA a été représentée et selon le compte rendu qu’on m’a fait c’est que comme nous avions décidé avant d’aller chez M. le ministre, notre position à Arc-en-ciel c’est que les élections locales doivent être organisées. Il faut organiser de manière intégrale ces élections, le peuple a trop attendu. Le peule souffre trop de cette situation où vous avez des délégations spéciales qui n’ont aucune légitimité, qui ne se sentent pas du tout comptable devant le peuple et qui n’ont aucune capacité de mobilisation de ressources à l’extérieur parce que des gens ne veulent avoir affaire qu’avec des élus locaux et du coup les besoins élémentaires des populations que soient en matière de santé, d’accès à l’eau, le droit à vivre dans un environnement sain, aucun de ces problèmes n’a de solution satisfaisante et le peuple est au total dans la pauvreté. Pour cette raison là pour encourager et faire en sorte que la démocratie s’enracine véritablement dans notre pays nous avons dit à Arc-en-ciel et nous nous battrons pour cela. Il faut des élections locales.

TOGO ACTUALITE : Ne trouvez-vous pas tout de même justifiés les arguments avancés par le ministre de l’administration territoriale ?

Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson : Moi je ne suis pas une experte en élection mais nous avons des collègues qui sont des experts et qui nous ont assuré et qui nous ont démontré que tous les problèmes soulevés on peut trouver des solutions de sorte à pouvoir organiser des élections dans les trois mois à venir si on le veut et il faut le faire. Il faut le faire si on a le souci d’utiliser rationnellement les ressources de ce pays. Nous venons de terminer les élections présidentielles pour lesquelles on a eu à poser un certain nombre d’actes par exemple, à déployer les urnes, à confectionner une liste électorale, il faut dans la foulée profiter de ce qui existe déjà pour que les élections locales ne nous reviennent pas trop chères. C’est une question de bon sens à moins qu’on n’a pas la volonté d’organiser ces élections.

TOGO ACTUALITE : 25 ans d’absence d’élection locale quelle incidence cela a sur le développement de nos communautés à la base ?

Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson : Je l’ai dit tantôt c’est la pauvreté qu’on voit partout. La semaine dernière j’étais dans l’Ogou j’ai vu des écoles dans lesquelles pour un effectif de 300 élèves on a 29 bancs. Où est-ce que vous avez déjà vu ça, des élèves qui sont assis parterre. On voit le résultat c’est la révolte des populations à Kparé la dernière fois. Des populations au sein desquels on avait trouvé des gens qui étaient censés être des militants d’UNIR qui disent « assez ça suffit on nous a promis qu’on va avoir de l’électricité, on va avoir l’eau, on va avoir de bonne route, nous voulons avoir cela maintenant ». Tout ça c’est des conséquences de la non organisation des élections locales pour que des élus ayant une légitimité prennent vraiment à cœur le développement des communautés et rendent compte aux populations ?

TOGO ACTUALITE : L’école togolaise connait depuis quelques années des crises récurrentes, quelle solution de sortie de crise envisagez-vous pour cette situation ?

Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson : La solution personne ne l’a en tête mais il faut une démarche. Quand un problème se pose il faut le régler au lieu de pratiquer la fuite en avant. Le problème de ce régime, on a l’impression que le seul fait d’être au pouvoir suffit, peu importe ce qui arrive du moment que pour l’instant je suis sur le siège, ça va. Du moment où tous ceux qui sont tout autour y trouvent leur compte, le peuple peut souffrir. Les enseignants, ils ne sont pas bien payés que voulez-vous qu’on fasse ? Ils peuvent continuer par souffrir. Est-ce que c’est comme ça qu’on doit conduire un pays ? Les revendications des enseignants sont légitimes, si vous avez des contraintes, vous avez l’obligation de leur montrer que vous êtes de bonne foi lorsque vous leur dites que c’est ce que je peux faire. Il faut que vraiment ils voient que vous ne pouvez pas aller plus loin que ce que vous faites. Et ça là, il y a une manière de faire, il y a un savoir-faire que ce régime n’a pas et du coup on prend la fuite en avant. On utilise les méthodes d’un autre temps, on menace. Ce que je voudrais dire et souhaiter véritablement c’est que le pouvoir se ressaisisse qu’on s’assoit avec les représentants des syndicats et qu’on trouve véritablement une solution qui arrange tout le monde de manière à ce que l’école puisse reprendre durablement et dans de bonnes conditions dans notre pays.

Déjà avec ces problèmes que nous avons eu à la rentrée il y a eu un grand retard et pas plus qu’hier je discutais avec un responsable d’établissement qui me disait c’est vrai les congés c’est le vendredi prochain mais on va essayer de faire venir les élèves des classes de troisième et du CM2 parce qu’il faut rattraper les retards. On en est à peine à la fin du premier trimestre. Il est vraiment urgent, si les responsables se sentent vraiment investir de la mission de contribuer réellement au bien-être de la population, il est urgent qu’ils mettent à profit ces périodes qui va de maintenant à la prochaine rentrée pour trouver des solutions durables à la crise de l’enseignement.

TOGO ACTUALITE : Nelson Mandela, l’icône de la lutte contre l’apartheid s’en est allé. Quelles leçons des élites africaines peuvent tirer du combat de ce grand homme ?

Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson : Avant de tirer leçon c’est d’abord une fierté, une fierté que tout africain éprouve d’avoir quelque chose de commun avec un si grand homme et la leçon que nous devons tirer c’est une leçon de persévérance, de détermination. C’est une leçon en particulier pour les dirigeants, cette leçon qui voudrait qu’ils comprennent qu’il ne sert à rien de s’accrocher au pouvoir. Quitter le pouvoir de soi-même grandit, ça grandit beaucoup.

L’autre leçon aussi c’est qu’il ne sert aussi à rien de se servir du pouvoir pour accumuler à tout prix des richesses mais il va valoir laisser un nom quand on est passé par le pouvoir.
Et l’opposition aussi à des leçons à apprendre. Combattre avec détermination, avec intelligence, laisser un espace à l’adversaire pour que des choses puissent se faire. Ne pas l’acculer, l’envoyer dos au mur. Savoir lui créer, lui laisser un espace pour qu’il comprenne que lui aussi a intérêt à jouer le jeu.

Regarder cette belle nation arc-en-ciel, c’est un défi de la renforcer, de la maintenir mais c’est quelque chose de beau. Il faut que nous en apprenions, il faut que nous en retirions le souci de promouvoir l’inclusion même de l’adversaire de manière à ce que nous aboutissions dans nos luttes.

TOGO ACTUALITE : Un message à l’endroit de la population à la vieille des fêtes de fin d’année ?

Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson : C’est un message de détermination, une exhortation à ne pas baisser les bras mais c’est aussi des vœux de bonne et nouvelle année 2014. Nous on se battra à Arc-en-ciel pour que les élections locales aient lieu rapidement et nous sommes convaincus que la tenue de ces élections va créer des conditions pour que les populations puissent être soulagées des poids quotidiens de leur préoccupation de leur misère.

 
Interview réalisée par www.togoactualite.com
 

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